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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
23 avril 2022 6 23 /04 /avril /2022 09:45
Une lettre aux enchères! Rosa Luxemburg à André Morizet, 28 novembre 1904

Une lettre de Rosa Luxemburg aux enchères, valeur plusieurs milliers d'euros. No comment! Et une erreur sur la date : il faut lire 1904 et non 1901 comme dans le descriptif.

Son contenu : intéressant pour ce qu'il dit en particulier de sa relation à certains socialistes français.

Une lettre aux enchères! Rosa Luxemburg à André Morizet, 28 novembre 1904
Une lettre aux enchères! Rosa Luxemburg à André Morizet, 28 novembre 1904

28 novembre 1904, à André Morizet

Merci de votre beau souvenir, qui nous a fait, à nous tous ici, beaucoup d joie. C´était en effet une semaine très agréable, que nous avons passée ensemble à Amsterdam. Je trouve la photographie excellente, on admire ici votre habileté. Seulement - voyez comme nous sommes difficiles a satisfaire nous autres ''allemands''! - nous allons vous dmeamder, si possible, encore 2 autres exemplaires pour Kautsky et et pour notre ami Görter d'Amsterdam, qui fait partie

Si vous voulez bien satisfaire ces solliciteurs, la reconnaissance de quatre pays - Allemagne, Pologne, Autriche et Hollande - vous est sûre éternellement´

Je regrette encore d´avantage que Bebel s'est laissé faire par la ''Vie'' juvénile de Longuet & Co. Espérons que l´illusion ne durera trop longtemps. Bebel ne connait malheureusement pas les personnes du mouvement français - sauf les vieux chefs et il s'est laissé fasciner par la bonhomie de Renaudel.

Encore une prière! Veuillez bien m'envoyer votre M.S, je réglerai le compte de l'abonnement vers le Nouvel An.

Cordialement à vous

Rosa Luxemburg

J'espère que vous ne partagez pas l'optimisme de Lagardelle sur le syndicalisme
 

Une lettre aux enchères! Rosa Luxemburg à André Morizet, 28 novembre 1904
Une lettre aux enchères! Rosa Luxemburg à André Morizet, 28 novembre 1904

La photo : Elle écrit à Henriette Roland Holst le 17 décembre 1904 : "Ci-joint une photographie pour Görter de Morizet; il nous en a envoyé une à Bebel et à moi, comme personne concernée. N'ayez pas peur de mon profil!" GB, T. 6, P 104

Renaudel :"C'est dommage seulement que notre Bebel, par méconnaissance de ce que sont ces personnes, prend très au sérieux les Renaudel, Longuet&Co,  comme  promoteurs patentés de l'unification  ...",  27.10.1904, GB, T. 6, P 100

M.S. : Le Mouvement Socialiste, revue.

 

Texte : repris du descriptif et des photographies du site d'enchères. Incomplet.

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10 mars 2022 4 10 /03 /mars /2022 11:01
Liebknecht et Luxemburg régulièrement cités. Difficile de parler en temps de guerre ...

Les recherches sur Liebknecht et Luxemburg sur le net nous conduisent régulièrement à la guerre que mène le pouvoir russe en Ukraine. Et à la référence à leur refus du premier conflit mondial.

 

Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg ont lutté il est vrai pied à pied contre le militarisme, la course aux armements et la guerre, contre l’aliénation des sociétés qui bientôt se lancèrent à corps perdus dans une guerre mondiale fratricide, qu’ils ont vu s'approcher et contre laquelle ils ont tenté de mobiliser les prolétaires.

Ils en ont analysé les causes, le capitalisme, le nationalisme, l’impérialisme, dénoncé les Etats impériaux ou dits démocratiques au service de la politique coloniale et impérialiste. Ils ont tenté jour après jour de faire prendre conscience aux masses opprimées, des dangers de l’aliénation à laquelle elles étaient soumises, de l’importance d’une prise de conscience de classe, de la nécessaire utilisation par les masses des moyens dont elles disposent pour s’opposer au pire : la grève de masse, le refus de servir le militarisme.

Tous deux ont connu pour cela la prison comme nombre de ceux du courant dont ils faisaient partie.

 

C'est pourquoi certaines de leurs phrases marquent aujourd’hui encore  les esprits et sont régulièrement citées comme celle de Liebknecht, « L’ennemi principal est toujours dans notre propre pays ». Elles sont reprises par les courants les plus divers parfois à contre-sens. La phrase de Karl Liebknecht est tirée d'un tract spartakiste de 1915 qui s'adresse au prolétariat en Allemagne et au-delà international.

Il apparaît juste cependant que l’on souhaite rechercher auprès d’eux des éléments d’analyse et de « solution », car nous sommes toujours dans un monde impérialiste qui opprime et exploite, aliène et ne connaît comme solution que la guerre et toujours la guerre. Même si les protagonistes et les formes ont aujourd'hui  changé.

 

Pour ce qui précède l’agression du pouvoir russe aujourd’hui, notre responsabilité d’hier est engagée dans chacun de nos pays. Pour nous, dans les pays occidentaux, du fait  :

  • De l’abandon d’une analyse et d’une pratique de classe, de l’invisibilisation systématique des prolétaires
  • De l’inexistence d’un mouvement fort et de classe contre l’OTAN, comme il a pu en exister, même minoritaire, dans les années 70, et contre ses agissements et ceux de l’Union européenne depuis 1989
  • De l’absence de prise de conscience et de dénonciation de ce que l’action des Occidentaux pouvait faire naître de nationalisme, allant jusqu’au fascisme, dans les pays « vaincus », comme ce fut le cas il y a plus de 100 ans après Versailles en Allemagne.

 

Maintenant que la guerre est là, notre impuissance paraît tout aussi grande que celle de Liebknecht ou Luxemburg. Comme l’indiquait Liebknecht dans la déclaration motivant son refus de voter les crédits de guerre en décembre 1914 :

« La libération du peuple russe comme du peuple allemand doit être l'œuvre de ces peuples eux-mêmes. »

« Seule, une paix basée sur la solidarité internationale de la classe ouvrière et sur la liberté de tous les peuples peut être une paix durable.

Quatre ans de guerre et une révolution auront été nécessaires, et des millions de morts. La révolution mit fin à la guerre, mais son assassinat par les forces dites "démocratiques" fit naître et prospérer le nazisme.

 

Aussi aujourd'hui,  nous ne pouvons être partie de cette libération

- qu'en montrant le développement d'un pouvoir russe de plus en plus nationaliste, quelles que soient les raisons de son action

- qu’en soutenant la volonté des forces progressistes qui luttent sur des bases de classe en Russie

- qu'en dénonçant le repartage impérialiste du monde qui a de nouveau conduit et qui de nouveau conduira au pire

- qu'en menant encore et toujours un combat contre toutes les guerres impérialistes, et en luttant pour un monde libéré de l'oppression, de la répression, de l'aliénation créées par le capitalisme.

 

Rappelons pour cela que, dans certains pays de l'Europe, être marxiste est un crime, qu'en Pologne par exemple, Rosa Luxemburg est mise à l'index et la plaque sur sa maison natale arrachée par le pouvoir.

 

Il est difficile de parler en temps de guerre alors que les populations souffrent. On peut dire cependant que seule une action de classe, anti-impérialiste pourra permettre dans l'avenir de combattre les guerres.

 

La déclaration de Karl Liebknecht s’adresse au prolétariat, pour qu'il se lève et résiste, tout comme celle de Rosa Luxemburg qui déclarait dans la brochure de Junius :

 

« Cette folie cessera le jour où les ouvriers d'Allemagne et de France, d'Angleterre et de Russie se réveilleront enfin de leur ivresse et se tendront une main fraternelle couvrant à la fois le choeur bestial des fauteurs de guerre impérialistes et le rauque hurlement des hyènes capitalistes, en poussant le vieux et puissant cri de guerre du Travail : Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! »

 

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26 avril 2021 1 26 /04 /avril /2021 13:01
Rosa Luxemburg "La course aux armements et les guerres continueront, tant que régnera le capital."

Rosa Luxemburg "La course aux armements et les guerres continueront, tant que régnera le capital."

Inauguration à Leipzig pour le 150e anniversaire.

 

Rosa Luxemburg "La course aux armements et les guerres continueront, tant que régnera le capital."

On peut lire cette phrase maintenant sur le sol à l'entrée de la Felsenkeller où Rosa Luxemburg a tenu l'un de ses plus importants meetings

 

Leipzig a joué un rôle essentiel dans la vie de Rosa Luxemburg. C'est dans le journal le "Leipziger Volkszeitung que l'on peut lire nombre de ses articles.

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Extraits traduits d'un article en ligne paru à cette occasion : https://kreuzer-leipzig.de/2021/03/05/so-lange-das-kapital-herrscht/

 

Lettre à Leo Jogiches

Elle décrit ce meeting dans une lettre à Léo Jogiches le 28 mai  1913 : "Hier soir, j'ai tenu un meeting magnifique dans la plus grande salle de Leipzig. J'ai parlé de la politique mondiale et attaqué fermement le groupe parlementaire et l'ensemble de la tactique qui domine dans le parti. Mon discours a été accueilli par des tonnerres d'applaudissements et j'ai été remerciée officiellement. ...

Le discours de Francfort et la condamnation pour incitation à la désobéissance

Après le discours de Leipzig sur l'inanité des guerres en référence à la guerre des Balkans de 1913 ... elle réitère en septembre 1913 dans un discours à Francfort son appel au refus de servir et d'obéir en cas de guerre ; "Non, nous ne le ferons pas" [tirer sur d'autres prolétaires] et sera condamnée à un an de prison, le discours étant considéré comme une incitation à la désobéissances contre les lois et les décisions de l'autorité

Je me sens comme un chien perdu

 

En janvier 1912, elle descend à l'hôtel Sedan lors de la campagne électorale et elle écrit : "Ici, à Leipzig, je tourne et je vire et me sens comme un chien perdu. Tout est froid, désagréable, les gens sont énervants, je n'ai pas de chambre à moi. Mais je cherche à me libérer et à m'isoler intérieurement de tout cela."

 

[Note du blog : Il faut lire cette citation en sachant que Rosa Luxemburg a tenu un nombre incalculable de meetings attachant une importance primordiale à la lutte pour une prise de conscience du prolétariat, ceci sans ménager sa fatigue et malgré sa aspiration profondément ancrée au calme et à la solitude. Il faut aussi comprendre le courage qu'il lui fallait pour attaquer de front sur ce terrain majeur le pouvoir impérial, alors même que le parti social-démocrate était dominé par le réformisme, qui trouvera sa triste apogée avec le ralliement officiel à la guerre  en 1914.]

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Felsenkeller. Mouvement ouvrier dans les années 20.

Felsenkeller. Mouvement ouvrier dans les années 20.

Le texte est disponible en allemand sur le net.

Die weltpolitische Lage -(Rede am 27. Mai 1913 in Leipzig-Plagwitz)
Nach einem Zeitungsbericht

 


Leipziger Volkszeitung, Nr. 121 vom 29. Mai 1913.
Rosa Luxemburg, Gesammelte Werke, Bd. 3, S. 212–219.
Transkription: Oliver Fleig und Sozialistische Klassiker.
HTML-Markierung: Einde O’Callaghan für das Marxists’ Internet Archive.


 

Wir leben in einer merkwürdigen Zeit, in der die Aufmerksamkeit der Arbeiterklasse durch ein ganz spezielles Gebiet des öffentlichen Lebens in steigendem Maße in Anspruch genommen wird; dies Gebiet ist die auswärtige Politik. Für den Begriff und geistigen Horizont des Durchschnittsspießers gehört die auswärtige Politik zu jenem Abteil der Morgenzeitung, das er beim Morgenkaffee liest zur Zerstreuung seiner Sorgen oder von dem Gekeife seiner besseren Hälfte. Für die Arbeiterklasse dagegen ist die auswärtige Politik tief ernst und äußerst wichtig. Es ist nicht immer so gewesen. Wenn man das geistige Leben der Arbeiterschaft in den letzten Jahrzehnten verfolgt, so kann man förmlich den Puls dieses geistigen Lebens fühlen und beobachten, wie von Jahr zu Jahr bei der Arbeiterschaft die Aufmerksamkeit für die auswärtige Politik wächst. Trotzdem ist es noch immer nicht genug, es muss dahin gebracht werden, dass jede Arbeiterin und jeder Arbeiter verstehen lernt, dass es gilt, mit derselben Energie, Aufmerksamkeit und Leidenschaft wie die Fragen der inneren Politik alle Geschehnisse der Weltpolitik zu verfolgen. Jede Proletarierfrau und jeder Proletarier müssen sich heute sagen, es geschieht nichts in der auswärtigen Politik, was nicht die eigensten Interessen des Proletariats berührt. Wenn in Afrika von den deutschen Militärs die Neger unterdrückt werden [1], wenn auf dem Balkan die Serben und Bulgaren die türkischen Soldaten und Bauern niedermorden [2], wenn in Kanada bei den Wahlen die konservative Partei plötzlich die Oberhand gewinnt und die liberale Herrschaft zertrümmert [3], in allen Fällen müssen sich die Arbeiterinnen und die Arbeiter sagen, um eure Sache handelt es sich, eure Interessen stehen dort auf dem Spiel. Es ist Karl Marx gewesen, der uns schon viele Jahrzehnte, bevor diese Entwicklung so ausgeprägt zu erkennen war, Fingerzeige für die Erkenntnis dieser Erscheinung gegeben hat. In seiner berühmten Inauguraladresse sagte er unter anderem: Kämpfe um die auswärtige Politik bilden einen Teil des allgemeinen Kampfes für die Emanzipation des Proletariats, sie sind also ein Teil des Klassenkampfes. [4]

 

Gerade wenn wir die jetzige weltpolitische Lage vergleichen mit der Zeit, in der die Inauguraladresse erschien, können wir den Wandel der Zeiten ermessen. In den 60er Jahren noch waren der Drehzapf der weltpolitischen Lage die Nachwehen und Folgen der Teilung Polens durch Preußen, Österreich und Russland. [5] Die gegenseitige Reibungsfläche der Mitschuldigen an dem Raube war es, um die sich die weltpolitische Läge drehte. Wenn heute jemand fragt, was der Mittelpunkt der weltpolitischen Ereignisse ist, so würde selbst ein ernsthafter Politiker über diese Frage in große Verlegenheit kommen. Heute haben wir in der Nordsee einen solchen Punkt, in der Rivalität zwischen England und Deutschland. Im Mittelmeer besteht ein ganzer Knäuel von Gegensätzen und Widersprüchen. Der Frieden am Balkan [6] bedeutet die Zerreißung der europäischen Türkei und gleichzeitig die sichere Gewähr für den nächsten Krieg um die asiatische Türkei. Aber darin erschöpfen sich die internationalen Gegensätze nicht. Auf dem Leibe des unglücklichen Persiens wird der Kampf zwischen Russland und England ausgefochten. [7] Im vollsten Frieden wird ein Land und ein Volk zerstückelt. Ein Stück weiter nach Osten liegt der gewaltige Herd der Revolution in China. Von Asien führt der Weg über den Stillen Ozean nach Amerika. Hier erleben wir in den letzten Jahrzehnten immer neue Überraschungen. Seit die Vereinigten Staaten 1898 ihren ersten Kolonialkrieg mit Spanien um die Philippinen ausfochten, sehen die amerikanischen Kapitalisten begehrlich nach Asien. Daraus ist der Gegensatz zwischen Japan und den Vereinigten Staaten und England entstanden.

 

Auch wenn wir die Kriege der letzten 10 bis 15 Jahre betrachten, erkennen wir, wie sich der politische Horizont nach und nach erweitert hat. Man kann, grob gehauen, den Beginn dieser Umwälzung mit dem japanisch-chinesischen Kriege im Jahre 1895 beginnen. Der Krieg zeigte ein Land, das zum erstenmal zur Selbständigkeit erwachte. 1898 folgte der Krieg zwischen Amerika und Spanien, bei dem die Vereinigten Staaten zum erstenmal außerhalb ihres Landes kämpften. Der Burenkrieg von 1899 krönte eine Anzahl stiller Eroberungen, die England dort unten gemacht hatte. Dann kam der Hunnenfeldzug nach China, bei dem Wilhelm II. den Soldaten die Parole mit auf den Weg gab: Pardon wird nicht gegeben, Gefangene werden nicht gemacht. Die Soldaten sollten hausen wie die Hunnen, so dass nach tausend Jahren kein Chinese wagt, einen Deutschen scheel anzusehen. [8] 1904 brach der Krieg zwischen Russland und Japan aus, dem die russische Revolution folgte, an die sich die Revolution in Persien, in der Türkei und zum Teil in Indien anschloss. Wir haben dann in den letzten paar Jahren eine Reihe zuckender Blitze und Gewitter in China gehabt. Der Streit zwischen Frankreich und Deutschland um Marokko hat den Raubzug Italiens nach Tripolis und dieser wieder den Balkankrieg zur Folge gehabt. Die Triebkraft dieser Kriege ist das Bestreben, die noch nicht vom Kapitalismus erreichten Gebiete aufzuteilen.

 

Bis vor kurzer Zeit gab es in der Sozialdemokratie ein ganz einfaches Mittel, um zu entscheiden, wie wir uns zu einem Kriege zu stellen haben. Der Angriffskrieg wurde abgelehnt und verdammt, dagegen müsse auch die Sozialdemokratie für den Verteidigungskrieg eintreten. Genosse Bebel, der so viel Ausgezeichnetes, manchmal aber auch, wie jeder Mensch, weniger Ausgezeichnetes gesagt hat, hat ja einmal im Reichstage erklärt, er wolle bei einem Verteidigungskriege trotz seiner alten Tage noch die Flinte auf den Buckel nehmen. [9] Diese Weisung ist schon deshalb nicht brauchbar, weil die Unterscheidung zwischen Angriffs- und Verteidigungskrieg unter den Händen zerrinnt oder wie eine Seifenblase zerplatzt. In den Kriegen der französischen Revolution gab die französische Regierung die Kriegserklärungen ab, und doch waren es Verteidigungskriege, die das Werk der Revolution gegen die Reaktion schützten. Der Krieg auf dem Balkan ist formal genommen ein Angriffskrieg gegen die Türkei. Aber die Machthaber der angreifenden Nationen zerfließen in Beteuerungen über die Verteidigung der heiligsten nationalen Rechte und des christlichen Glaubens gegen die Türken, und auch sie haben recht. Daraus haben wir den Schluss zu ziehen, wir als Proletarier haben uns gegen jeden Krieg zu wenden, gleichviel ob Angriffs- oder Verteidigungskrieg. Wir erkennen in ihm eine Folge des Imperialismus, und wie den Imperialismus als Ganzes, so bekämpfen wir auch jede seiner Teilerscheinungen.

 

Ein Notbehelf in unsrer Taktik ist, dass sich die deutsche Sozialdemokratie auf den Boden des Dreibunds stellt, das heißt, dass sie die Vereinigung der deutschen, österreichischen und italienischen Diplomatie unterstützt. Es ist tief bedauerlich, dass erst vor einigen Wochen, als die neue Militärvorlage im Reichstage verhandelt wurde [10], Genosse David der Regierung im Auftrage der Fraktion öffentlich erklärte, wir Sozialdemokraten stehen auf dem Boden des Dreibunds, wobei nur der Vorbehalt gemacht wurde, der Dreibund müsse ein braver Knabe sein und für den Frieden wirken. [11] Leider sind wir nicht allein damit geblieben, denn fast am gleichen Tage hat im Wiener Parlament Genosse Renner eine ähnliche Erklärung für die österreichische Sozialdemokratie abgegeben. Vom Dreibund, von einer kapitalistischen Bündnispolitik, die den Krieg vorbereiten soll, erwarten, sie solle für den Frieden wirken, das ist das Beginnen eines Menschen, der vom Distelstrauch Feigen pflücken will Man muss nur einmal die Resultate des Dreibunds betrachten. Seine erste Folge war, dass Frankreich zu der schmachvollen Allianz mit Russland förmlich getrieben wurde und dass England mit Frankreich und Russland zu jenem dreieckigen Verhältnis gebracht wurde. [12] Eine andre Folge des Dreibunds sind die ungeheueren Rüstungen Deutschlands gegen Frankreich und Russland und ebenso die Rüstungen Österreichs. Wo war denn auch der Dreibund, als es galt, den Frieden zu erhalten, als eine Dreibundmacht Tripolis überfiel oder als Österreich Bosnien und die Herzegowina annektierte? Es ist eine alte Binsenwahrheit, dass, wo zwei oder drei kapitalistische Staaten die Köpfe zusammenstecken, es sich immer um die Haut eines vierten kapitalistischen Staates handelt. Welche Naivität gehört dazu, von diesem Bündnis zu erwarten, es sollte eine Gewähr sein für den Frieden. Es gibt ein internationales Bündnis, das sich als einzige Gewähr für den Frieden herausgestellt hat. Das einzige Bündnis, auf das zu rechnen ist, das ist das Bündnis aller revolutionären Proletarier der Welt!

 

Wir haben auch noch mit einer andern Illusion, die Verwirrung anrichten kann, reinen Tisch zu machen, nämlich mit der Illusion von der Abrüstung. Vor einigen Jahren gefiel es dem englischen Minister Grey, eine schöne Rede zu halten, in der er für eine Verständigung über die Rüstungen eintrat. [13] Kaum hatte man dies bei uns gehört, so sagten einige Genossen unsrer Reichstagsfraktion: Bravo, der Mann spricht wie ein Buch. Sie glaubten, auf diese Weise könnten wir von dem Krieg nach rückwärts zu dem Frieden kommen. Als aber Grey so sprach, hatte er schon eine neue Flottenvorlage in der Tasche und statt der Abrüstungen kamen ungeheuere neue Rüstungen. Auch in Deutschland war es ja ähnlich. In der Budgetkommission redete der Kriegsminister einer Verständigung mit England das Wort. [14] Das gab ein großes Hallo! Ein deutscher Kriegsminister, der wie eine Taube den Ölzweig des Friedens im Schnabel hielt; das war in Wirklichkeit das Vorspiel zu der ungeheueren Militärvorlage. Man muss doch geradezu die Augen schließen, um nicht zu sehen, dass die Rüstungen eine naturnotwendige Konsequenz der ganzen ökonomischen Entwicklung sind. Solange das Kapital herrscht, werden Rüstungen und Krieg nicht aufhören. Alle großen und kleinen kapitalistischen Staaten sind jetzt in den Strudel der Wettrüstungen gerissen. Es war immer das Vorrecht der Sozialdemokratie, dass sie mit ihren Bestrebungen nicht im Wolkenkuckucksheim wurzelte, sondern mit festen Füßen auf dem realen Boden stand. Wir haben bei allen Erscheinungen in der Politik immer gefragt, wie sich diese Erscheinungen mit der kapitalistischen Entwicklung vereinbaren. Wie haben wir doch über die bürgerlichen Friedenspolitiker gelacht, diese guten Leute und schlechten Musikanten. Es ist eine hoffnungslose Utopie, zu erwarten, dass durch unsre Propaganda für die Abrüstung die kapitalistischen Staaten aufhören werden zu rüsten. Die Rüstungen sind eine fatale Konsequenz der kapitalistischen Entwicklung, und dieser Weg führt in den Abgrund.

 

Wir haben ein ganz anderes Ziel zu verfolgen, das uns klar und deutlich unsre historische Aufgabe stellt, das Milizsystem, die Bewaffnung des Volkes, wie sie unser Programm verlangt. Wir haben die Pflicht, dem Volke zu sagen, dass es aufhören muss, Kadavergehorsam zu zeigen, dass es seine eignen Interessen wahrnehmen muss. Allerdings, die Forderung der Miliz ist etwas ganz anderes als die Abrüstung der herrschenden Klasse; das Milizsystem kann einzig und allein nur aus der Tatkraft des Proletariats hervorgehen. Wir täuschen uns nicht, wir glauben nicht, dass wir von heute auf morgen die Miliz einführen können. Eine Heeresorganisation, bei der das Volk in Waffen entscheidet, ob es in den Krieg ziehen will oder nicht, lässt sich nicht vereinbaren mit der Herrschaft der Krupps und der Rüstungskartelle. Um die Miliz einzuführen, müssen wir die herrschenden Klassen stürzen, das bedeutet eine Revolution, ein gewaltiges Stück historischer Arbeit. Aber soll das ein Anlass sein, unsre Forderung wie ein Familienheiligtum sorgfältig im Schrank aufzubewahren, um es immer bei besonders feierlichen Gelegenheiten hervorzuholen?

 

Nein! Wir müssen die Miliz fordern im täglichen Aktionsprogramme; das Volk muss wissen, dass die Durchführung der Forderung den Sturz der Junkerherrschaft voraussetzt. In Frankreich erleben wir jetzt den stürmischen Protest gegen die dreijährige Dienstzeit, dort beginnt schon die Opposition gegen den militärischen Kadavergehorsam. Sollte der deutsche Arbeiter dümmer und schlechter und feiger sein? Ich glaube, dass wir nicht umsonst vier Millionen sozialdemokratische Stimmen zählen und nicht umsonst 50 Jahre sozialistischer Geschichte hinter uns haben. Auch die Zeit wird kommen, wo die deutsche Arbeiterschaft sich nicht mehr kommandieren lässt, wo Sie sich wie ein Mann erhebt und sagt: Ich will es nicht, ich tue es nicht! (Lebhafter Beifall)

 

Eine Folge der Rüstungsdelirien ist der schmachvolle Niedergang des Parlamentarismus. In Deutschland ist jede bürgerliche Opposition aus dem Parlament verschwunden, es gibt keine Rüstungsvorlage, die nicht von den getreuen Regierungsmamelucken bewilligt würde. Die Regierung braucht nur zu pfeifen, und die Parlamente springen wie die Pudel. Wir arbeiten bei Reichstagswahlen im Schweiße unseres Angesichts, um soviel Vertreter als möglich in den Reichstag zu schicken, wenn es aber einen Arbeiter gibt, der da meint, es genüge, einen Stimmzettel abzugeben, so kann er mir nur leid tun. Im gleichen Maße, in dem mehr Sozialdemokraten in die Parlamente geschickt werden, sinken diese Parlamente immer mehr zu einem Feigenblatt des Absolutismus herab. Als die Chinaexpedition [15] ausgerüstet wurde, waren die Abgeordneten bei Muttern, nachher gewährten die Vertreter des Bürgertums für die schon verausgabten Mittel mit hündischer Beflissenheit Indemnität. In England, wo das Zeremoniell des parlamentarischen Hokuspokus besonders ausgebildet ist, liegen die Verhältnisse genauso, schrieb doch ein englisches Blatt, der dreimal heilige Parlamentarismus ist auf dem besten Wege, den Laden zu schließen. Wie in Deutschland und England ist es auch in Österreich und in andern Staaten: Der Parlamentarismus gerät immer tiefer in den Sumpf. Was wären wir Sozialdemokraten wert, wenn wir unsre Hoffnungen auf den Parlamentarismus setzen wollten? Die Schwerkraft der sozialdemokratischen Politik muss in die Massen verlegt werden, das Parlament bleibt nur noch eine – allerdings bedeutende – Rednertribüne, von der aus die sozialistische Aufklärung erfolgen und die Masse aufgepeitscht werden soll. Dass die Masse handeln kann, wenn es nötig ist, dafür haben wir in der letzten Zeit genug Beweise gehabt. Man sagt uns oft mit den Kassen- und Mitgliedsbüchern in der Hand, wir haben noch nicht genug Mitglieder, die Kassen sind noch zu schwach, um große Aktionen durchführen zu können. O über diese kleinen Rechenmeister! Ich unterschätze nicht den Wert der Organisationen, man kann sie nicht hoch genug schätzen, Aber es wäre höchst falsch, wenn man annehmen wollte, erst müsste der letzte Arbeiter und die letzte Arbeiterin eingeschriebenes Mitglied der Partei sein, ehe der große Marsch gegen den Kapitalismus angetreten werden könne. In Belgien haben erst jetzt 400.000 Mann 10 Tage lang mit verschränkten Armen dagestanden, um politische Rechte zu erobern, wenn ich auch der Meinung bin, dass man sie nicht zur rechten Zeit ins Feuer geführt hat. [16] Dabei hat die belgische Arbeiterschaft bei weitem nicht so gute Organisationen wie die deutsche. Auch das Beispiel der russischen Revolution hat ja bewiesen, was die Masse kann. 1906 hatte das russische Proletariat keine gewerkschaftlichen und keine politischen Organisationen, und wenige Jahre darauf waren im Feuer der Revolution feste proletarische Organisationen geschmiedet.

Es ist nötig, dass wir unsre Kraft, die elementare Kraft der großen Masse, nicht unterschätzen, denn die Gefahr, dass wir unsre Kräfte unterschätzen, ist größer als etwa eine Überschätzung unsrer Kräfte. Wir müssen den Proletariermassen sagen, wenn wir jetzt, nach 50 Jahren der Entwicklung, in unsern Reihen Millionen zählen, dass dies nicht bloß zum Stolz berechtigt, sondern auch zu Taten verpflichtet. Je mehr wir wachsen, um so mehr sind wir verpflichtet, die ganze Wucht unsrer Masse in die Waagschale zu werfen. Wir müssen die Massen aufklären und ihnen sagen, wenn die Kapitalisten die Welt verteilen, so sind wir die Erben dieser halsbrecherischen Unternehmungen. Wir müssen jenen Mut, jene Entschlossenheit und Rücksichtslosigkeit in der Verfolgung unsrer Aufgaben zeigen, die von den bürgerlichen Revolutionären aufgebracht wurde, die Danton zusammenfasste, als er sagte, in bestimmten Situationen brauche man als Parole nur drei Worte: Kühnheit, Kühnheit und noch einmal Kühnheit! (Stürmischer Beifall)

Anmerkungen

1. Im Jahre 1904 hatten sich in Südwestafrika die Völker der Hereros und der Hottentotten gegen die Kolonialherrschaft des deutschen Imperialismus erhoben. Der Aufstand, der den Charakter eines Freiheitskrieges trug, endete mit einer verlustreichen Niederlage dieser Völker, nachdem die deutschen Kolonialtruppen drei Jahre lang mit äußerster Grausamkeit gegen sie vorgegangen waren.

2. Von Oktober 1912 bis Mai 1913 führten Bulgarien, Serbien, Griechenland und Montenegro Krieg gegen das türkische Reich, der mit einer Niederlage der Türkei endete. Dieser Krieg war in seiner Haupttendenz ein nationaler Krieg gegen die türkische Fremdherrschaft auf dem Balkan. Infolge der Einmischung der imperialistischen Großmächte gefährdete er den Frieden in Europa.

3. Mit dem Sieg der konservativen Partei bei den Wahlen zum Unterhaus in Kanada im September 1911 war eine fünfzehnjährige Herrschaft der liberalen Majorität beseitigt worden.

4. Siehe Karl Marx, Inauguraladresse der Internationalen Arbeiter-Association, in Karl Marx u. Friedrich Engels, Werke, Bd. 16, Berlin 1971, S. 13.

5. Im Ergebnis der die Teilungen Polens in den Jahren 1772, 1793 und 1795 wurden die Westgebiete von Preußen, Galizien von Österreich und die Ostgebiete von Russland annektiert. 1815 wurde vom Wiener Kongress das Königreich Polen (Kongresspolen) geschaffen, das in Personalunion mit Russland verbunden wurde.

6. Im Friedensvertrag von London, der am 30. Mai zwischen den Balkanstaaten und der Türkei abgeschlossen wurde, musste die Türkei fast alle Gebiete auf der Balkanhalbinsel an die Balkanstaaten abtreten.

7. Unter dem Einfluss der Revolution in Russland von 1905 bis 1907 hatte sich in Persien eine bürgerlich-demokratische Massenbewegung entwickelt, die zur Einschränkung des Absolutismus und zur Einführung der konstitutionellen Regierungsform geführt hatte. Mit aktiver Unterstützung Großbritanniens und des zaristischen Russlands, die im Süden bzw. Norden Persiens die revolutionären Kräfte mit Waffengewalt unterdrückten, gelang es den reaktionären Kräften in Persien, Ende 1911 die Revolution niederzuschlagen.

8. Am 27. Juli 1900 hatte Wilhelm II. in Bremerhaven die Truppen der Chinaexpedition mit einer chauvinistischen Hetzrede, berüchtigt geworden als Hunnenrede, verabschiedet und zu äußerster Brutalität gegenüber den chinesischen Freiheitskämpfer aufgefordert.

9. August Bebel hatte am 7. März 1904 im Reichstag zur Haltung der Sozialdemokratie im Falle eines Angriffskrieges ausländischer Mächte gegen Deutschland gesprochen. Dabei war er von der von Karl Marx und Friedrich Engels wie auch von ihm selbst oft betonten, für das 19. Jahrhundert richtigen Erkenntnis ausgegangen, dass ein nationaler Verteidigungskrieg gegen den Zarismus und mit ihm verbündete Mächte im Interesse der Entwicklung der Arbeiterbewegung möglich und notwendig hätte sein können. Bebel hatte nicht gesehen, dass diese Auffassung durch die Veränderung des nationalen und internationalen Kräfteverhältnisses im Imperialismus überholt war.

10. Ende 1913 war im Reichstag ein Militär- und Deckungsvorlage eingebracht worden, die die größte Heeresverstärkung seit Bestehen des Deutschen Reiches vorsah. Ein Teil der zusätzlichen finanziellen Mittel sollte durch einen außerordentlichen Wehrbeitrag und durch Besteuerung aller Vermögen über 10.000 Mark aufgebracht, der übrige teil auf die Schulter der werktätigen Bevölkerung abgewälzt werden. Die sozialdemokratische Fraktion lehnte die Militär- und Deckungsvorlage ab, stimmte aber einer einmaligen Vermögensabgabe (dem sogenannten Wehrbeitrag) und einer Vermögenszuwachssteuer zur Finanzierung der Heeresvorlage zu. Der Abstimmung waren scharfe in der Fraktion vorausgegangen, die damit endeten, dass die Revisionisten unter Missbrauch der Fraktionsdisziplin den Widerstand von 37 abgeordneten unterdrückten. Diese Zustimmung zu den Gesetzen bedeutete das Aufgeben des Grundsatzes „Diesem System keinen Mann und keinen Groschen!“

11. Diese Erklärung hatte der Opportunist Eduard David bereits am 3. Dezember 1912 im Namen der sozialdemokratischen Fraktion abgegeben. Er befürwortete die imperialistische Außenpolitik und erklärte die deutsche Sozialdemokratie zu einer Stütze des Dreibundes, sofern dieser ein „Defensivbündnis“ darstellte.

12. Nachdem Frankreich und Russland sowie Großbritannien und Frankreich bereits verbündet waren, hatten sich Großbritannien und Russland im August 1907 über die Abgrenzung ihrer Interessensphären geeinigt. Damit war die Triple-Entente als imperialistischer Machtblock entstanden.

13. Am 13. März 1911 hatte der Außenminister Sir Edward Grey anlässlich der Vorlage des neuen Marineetats im britischen unterhaus über Möglichkeiten der Rüstungseinschränkung, speziell eines Vertrages mit Deutschland gesprochen, da die Rüstungsausgaben ein „Verbluten in Friedenszeiten“ bedeuten würden. Der Marineetat wurde angenommen und brachte gegenüber dem Vorjahr eine Erhöhung der Ausgaben um vier Millionen Pfund Sterling.

14. Nicht der Kriegsminister, sondern der Staatssekretär im Reichsmarineamt Alfred von Tirpitz hatte am 6. Februar 1913 in der Budgetkommission des Reichstags ausgeführt, dass er eine Verständigung mit Großbritannien begrüßen würde und dass Verhandlungen möglich seien, sobald Großbritannien damit beginnen wolle und Vorschläge unterbreite.

15. Im Jahre 1900 hatte die deutschen Imperialisten die Ermordung des deutschen Gesandten in Peking während des Aufstandes der Ihotuan zum Anlass genommen, um durch die Entsendung eines Expeditionskorps nach China ihr Vordringen in Ostasien zu sichern. Zusammen mit den Truppen anderer Imperialistischen Mächte schlugen die deutschen Interventionstruppen die chinesische Befreiungsbewegung grausam nieder.

16. Am 14. April 1913 begann in Belgien ein politischer Massenstreik für das allgemeine Wahlrecht, der seit Juni 1912 durch ein spezielles Komitee organisatorisch, finanziell und ideologisch im ganzen Land sorgfältig vorbereitet worden war. Am Streik beteiligten sich etwa 450.000 Arbeiter. Am 24. April 1913 beschloss der Parteitag der belgischen Arbeiterpartei den Abbruch des Streiks, nachdem sich das belgische Parlament dafür ausgesprochen hatte, die Reform des Wahlrechts in einer Kommission erörtern zu lassen.

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5 mars 2021 5 05 /03 /mars /2021 14:07
Parler - enseigner - lutter - réfléchir - écrire
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Révolutionnaire

Après d'innombrables années de fréquentation quotidienne avec la pensée, l'action, la vie de Rosa Luxemburg, s'il me fallait retenir un terme pour la définir, je dirais : révolutionnaire. Dépassant toutes les divisions, elle aura mis au centre de sa pensée, de son action, tout ce qui unit les opprimés pour mener un combat commun. Rejetant le nationalisme, le militarisme, le colonialisme, elle sera de celles et ceux peu nombreux qui combattront la boucherie de 1914. Sa lutte contre le réformisme politique est le rejet de toute décision qui pourrait mettre en danger la réalisation de ce but final. Sa pensée s'appuie sur une approche marxiste. Et ce qui est certainement le plus précieux de son héritage politique et sensible, c'est sa volonté constante d'aider à éclairer le prolétariat dans ses luttes : dans les centaines d'articles et meetings, ses interventions aux Congrès du parti et de l'Internationale, elle n'aura comme volonté que d'accompagner le prolétariat dans sa prise de conscience. Elle sera attentive à tous les mouvements, même les plus surprenants. Dans sa vie, elle paiera le prix de cette action :de la prison jusqu'à son assassinat. D.V.P.

Nous préparons pour ce double 150e anniversaire de la naissance de Rosa Luxemburg et de la Commune, avec Sabrina Lorre, comédienne qui avait initié et animé une formidable quinzaine Rosa Luxemburg à Saint-Etienne un travail et une lecture des textes de Rosa Luxemburg sur la Commune que nous tenons à disposition de celles et ceux qui voudraient organiser par Internet ou ailleurs des événements.

En ce jour anniversaire de la naissance de Rosa Luxemburg, ne pas oublier.

Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution en Allemagne pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires. Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne. Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement? Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution. Dominique Villaeys-Poirré

Sa plus belle description de la lutte politique :

Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

Sur la Commune et les révolutions

« … Dans la nuit des misères que font naître les crises du capitalisme, des fantômes s’élèvent, annonçant l’inexorable destin, qui déjà se pouvait prévoir à l’aurore même de l’ère capitaliste. La lutte de classes, génératrice de ces crises qui déchire la société bourgeoise et qui, fatalement, causera sa perte, fait comme une trainée rouge à travers toute l’histoire d’un siècle. Elle se dessinait confusément dans la grande tourmente de la Révolution française. Elle s’inscrivait en lettres noires sur la bannière des canuts de Lyon, les révoltés de la faim qui, en 1834, jetèrent le cri : « Vivre en travaillant ou mourir en combattant ! » » Elle alimentait le feu rouge des torches allumées par les chartistes anglais de 1830 et de 1840. Elle se levait comme une colonne de flammes du terrible massacre de juin 1848 à Paris. Elle jetait son éclat de pourpre dans la capitale de la France, sur le mouvement de 1871, lorsque la canaille bourgeoise victorieuse se vengeait sur les héros de la Commune par le fer meurtrier des mitrailleuses. … » 1er mai 1909

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4 mars 2021 4 04 /03 /mars /2021 11:09
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16 février 2021 2 16 /02 /février /2021 12:09
150e anniversaire de la naissance de Rosa Luxemburg (1) - 5 mars, 17 heures inauguration de l'exposition Rosa Luxemburg, une vie de lutte., collages de Fritz Hundt
5 mars, 17 heures inauguration de l'exposition Rosa Luxemburg, une vie de lutte.
 
En hommage à ceux qui rendent hommage, cette information sur une exposition montrant des collages réalisés à partir de photos et illustrations. Touchée par cette photo qui annonce l'événement, le titre de l'exposition : Une vie de luttes, la démarche du collage.
 
"Les oeuvres de Fritz Hundt ne sont pas imprimées, ne sont pas conçues sur ordinateur, mais le fruit d'un long travail avec crayons et ciseaux."
 
Si l'inaugurationphysique ne peut avoir lieu, un "live" est prévu sur le facebook "Wir sind Grünau"
 
 
Information & Anmeldung KOMM-Haus Büro Oliver Kobe
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8 juillet 2020 3 08 /07 /juillet /2020 10:46
Rosa Luxemburg dans le Maitron (Le tome V, sur l'Allemagne, en ligne)

Cinquième volume du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier international, le volume consacré à L’Allemagne, fut publié en 1990 aux Éditions ouvrières sous la direction de Jacques Droz. Numérisé et océrisé en 2019, il est désormais en ligne, avec l’appareil critique d’origine et enrichi de liens hypertexte au sein des 539 articles qui le composent

ROSA LUXEMBURG

 

https://maitron.fr/spip.php?article216457

 

De toute la social-démocratie allemande du début du XXe siècle, Rosa Luxemburg, en dépit de son origine (juive polonaise), est aujourd’hui la figure la plus connue, la plus vivante aussi. Tandis que les Liebknecht (Wilhelm et Karl), les Bebel ou les Ebert semblent appartenir à une époque et un monde révolus, Rosa Luxemburg pourrait être notre contemporaine. Cela tient à la fois aux problèmes qu’elle a soulevés et abordés (le nationalisme, le rapport entre les réformes et la révolution) mais aussi et peut-être plus encore à l’exemple qu’elle a donné : celui d’une militante, d’une révolutionnaire prête à mourir pour ses idées et en même temps sensible à toutes les souffrances, ouverte à toutes les joies, à tous les arts (littérature, peinture, musique). Journaliste et oratrice brillante, elle a prolongé les analyses de Marx sur le plan théorique. Contre Eduard Bernstein d’abord, contre Karl Kautsky ensuite, elle se battait pour un socialisme fidèle à la doctrine de Marx qui se proposait, non d’amender le système et la société capitalistes, mais de les remplacer par un système et une société différents : socialistes.
Animatrice du mouvement spartakiste, elle hésitait à rompre organisationnellement avec la social-démocratie de gauche jusqu’au moment (décembre 1918) où toute cohabitation au sein de l’USPD lui paraissait impossible ; elle participa à la fondation du Parti communiste d’Allemagne. Elle critiqua (dans un texte posthume : La Révolution russe) des aspects de la politique de
Lénine et Trotsky, Rosa Luxemburg s’opposant aux dérives réformistes et autoritaires.
Rosa Luxemburg eut, sans doute plus que
Lénine, le respect « de quiconque pense autrement » qu’elle. Dans une lettre écrite pendant la guerre, de sa prison de Wronke, elle écrivit à Mathilde Wurm : « Tâche donc de demeurer un être humain. C’est vraiment là l’essentiel. Et ça veut dire : être solide, lucide et gaie, oui gaie malgré tout et le reste. »

Rosa Luxemburg naquit dans une famille juive aisée qui vint s’établir à Varsovie. C’est là que, de 1884 à 1887, elle fréquenta le lycée de jeunes filles. À seize ans (1887), elle faisait partie d’un groupe de socialistes révolutionnaires (Proletariat). Menacée d’arrestation, elle émigra en Suisse (1889) où elle entreprit des études (sciences naturelles, mathématiques, puis sciences politiques et économie) à l’Université de Zurich. C’est à Zurich qu’elle fit la connaissance de Leo Jogiches dont elle devint la compagne. Avec lui, Marchlewski et Warski, elle édita une publication socialiste polonaise, la Sprawa Robotnicza (La cause ouvrière, 1893) et fonda le parti Social-démocratie du royaume de Pologne (1894) qui devint en 1900 le parti Social-démocratie du royaume de Pologne et de Lituanie (SDKPiL). En tant que déléguée de ce parti, elle participa jusqu’en 1912 à tous les congrès de la IIe Internationale. En 1894-1895, elle séjourna à Paris, où elle travaillait à sa thèse, avenue Reille (XIVe arr.) et rue Feutrier (XVIIIe arr.).
En 1896, elle entra en relation avec le rédacteur en chef de Die Neue Zeit,
Karl Kautsky et publia dans cette revue plusieurs articles sur la Pologne. L’année suivante elle soutint sa thèse de doctorat sur Le développement industriel de la Pologne, qui fut éditée. Après avoir acquis la nationalité prussienne par un mariage blanc avec Gustav Lübeck, elle s’établit à Berlin où elle adhéra au SPD (1898). À partir de cette date, sans cesser de contribuer aux activités du SDKPiL, Rosa Luxemburg consacra la majeure partie de son temps à militer au sein de la social-démocratie allemande.
Peu de temps après son arrivée, on lui confia la rédaction de la Sächsische Arbeiterzeitung, mais en conflit avec une partie de la rédaction, elle abandonna ce poste au bout de trois mois (septembre-novembre 1898).

Une série d’articles dans lesquels elle attaquait brillamment les théories révisionnistes d’Eduard Bernstein, publiés en septembre 1898 dans la Leipziger Volkszeitung, avaient tout de suite attiré sur elle l’attention. Elle poursuivit sa réfutation du révisionnisme l’année suivante dans une deuxième série d’articles (avril 1899) et publia l’ensemble dans une brochure intitulée Sozialreform oder Révolution ? (Réforme sociale ou révolution ?). Cette jeune femme de vingt-sept ans, hier inconnue, n’hésitait pas à s’en prendre à l’un des exécuteurs testamentaires d’Engels, ancien rédacteur en chef du Sozialdemokrat, en lui opposant la doctrine de Marx dont elle montra une connaissance approfondie. Contre l’idée de Bernstein, faire du SPD un parti démocrate « comme les autres », elle soulignait la vocation révolutionnaire de la social-démocratie, seul moyen au demeurant d’obtenir des réformes importantes pour la classe ouvrière.
À partir de 1898, Rosa Luxemburg fut déléguée aux congrès annuels de la social-démocratie et y défendit avec verve ses positions. Elle gagna l’amitié de
Bebel et de Kautsky, prit part aux campagnes électorales du parti et y fit la preuve de ses qualités d’oratrice. Elle s’exprimait régulièrement lors de réunions publiques.
Déléguée au congrès de l’Internationale à Paris, elle y présenta un rapport sur le militarisme et s’en prit vivement à la politique coloniale des grandes puissances (1900). En 1904, Rosa Luxemburg fut condamnée à trois mois de prison pour offense à l’empereur.
À partir de 1904 et jusqu’à la guerre, elle représentait le SDKPiL au Bureau socialiste international. Sa connaissance du français et du russe lui permettaient de traiter avec compétence des problèmes internationaux (affaire Dreyfus, grèves belges, participation du socialiste Millerand à un gouvernement « bourgeois »). En 1904, elle publia dans Die Neue Zeit un article intitulé Organisationsfragen der russischen Sozialdemokratie (« Questions d’organisation de la social-démocratie russe »), dans lequel elle critiqua la conception du parti (bolchevik) exposée par
Lénine, qu’à l’époque quasiment personne ne connaissait. Rosa Luxemburg montrait le danger de la mise en place « d’un centralisme bureaucratique », préconisant au contraire « l’activité révolutionnaire autonome du prolétariat ».

Lorsque éclata la révolution russe de 1905, elle abandonna la rédaction du Vorwärts où elle venait d’entrer, pour se rendre clandestinement à Varsovie, sous un faux nom. Arrêtée en mars 1906, elle subit une détention éprouvante, puis fut libérée en juillet à la suite du versement d’une caution par le SPD et assignée à résidence en Finlande. C’est là qu’elle rédigea Massenstreik, Partei und Gewerkschaften (Grève de masse, parti et syndicats), une brochure dans laquelle elle analysait les méthodes d’action utilisées par le mouvement révolutionnaire en Russie, en les donnant en exemple au Parti social-démocrate d’Allemagne. Elle notait que la lutte avait été dirigée « autant contre l’exploitation capitaliste que contre le vieux pouvoir d’État ». Elle considérait que les travailleurs d’Allemagne devaient « regarder la révolution russe comme leur propre affaire ; il ne suffit pas qu’ils éprouvent une solidarité internationale de classe avec le prolétariat russe, ils doivent considérer cette révolution comme un chapitre de leur propre histoire sociale et politique ».

Mais la direction du parti, en accord avec les syndicats, faisait passer le maintien et le développement de l’organisation avant l’agitation et l’action révolutionnaires. Dès lors, les positions nettement minoritaires de Rosa Luxemburg ne furent défendues que par une aile gauche au demeurant peu structurée et représentée par moins du tiers des délégués aux différents congrès dominés, à partir de 1907-1908, par une direction soucieuse de pragmatisme et d’efficacité immédiate. Au congrès du POSDR de Londres (13 mai-1er juin 1907) auquel elle participa au nom du SDKPiL, elle vota souvent, mais pas toujours, avec les bolcheviks contre les mencheviks. Au congrès international de Stuttgart (août 1907), elle fit adopter des résolutions condamnant la politique coloniale et faisant obligation aux sociaux-démocrates, en cas de guerre, de s’opposer au conflit et d’utiliser la situation de crise pour hâter le renversement du système capitaliste.
Les divergences entre Rosa Luxemburg et les directions du parti et des syndicats s’accentuèrent après 1906, au point qu’elle ne parvenait que difficilement à placer des articles dans la presse sociale-démocrate, étroitement contrôlée par la direction du SPD. En décembre 1913, elle fut amenée à éditer, avec
Marchlewski et Franz Mehring, son propre bulletin de presse, la Sozialdemokratische Korrespondenz. En 1910, sa proposition de propager l’idée de la grève de masse et de préconiser la transformation du Reich en République provoqua sa rupture avec Karl Kautsky.
Dès lors, elle consacra une grande partie de son temps à l’enseignement et à la recherche. À partir du 1er octobre 1907, elle enseigna l’économie politique à l’École centrale du parti, à Berlin. Ses cours donnèrent la matière à un ouvrage sur lequel elle travailla pendant des années, Introduction à l’économie politique, qu’elle n’acheva pas, mais dont les éléments rédigés furent publiés après sa mort par son ami
Paul Levi. En 1908 et 1909, elle publia une série d’articles en polonais consacrés à « La question nationale et l’autonomie ». Elle y argumentait contre le mot d’ordre d’indépendance de la Pologne, et défendait l’internationalisme.
En 1913 parut son ouvrage Die Akkumulation des Kapitals (L’Accumulation du capital) dans lequel, prolongeant des idées esquissées au tournant du siècle, elle essayait d’établir les limites de l’expansion du capitalisme à l’époque impérialiste. Aux critiques que cet ouvrage souleva, Rosa Luxemburg répondit pendant la guerre par un essai polémique : Die Antikritik, qui est depuis ajouté dans chaque publication de L’Accumulation du capital. Cependant l’histoire n’a pas confirmé certaines conclusions de l’Accumulation qui prévoyaient l’effondrement du capitalisme dès lors qu’il se serait étendu au globe tout entier.

Ses discours antimilitaristes valurent à Rosa Luxemburg deux procès en 1914, dont l’un se termina par sa condamnation à un an de prison, peine qu’elle accomplit de février 1915 à février 1916.
En juillet 1914, elle prit part à la dernière réunion du Bureau socialiste international à Bruxelles. Dès que la guerre éclata, elle commença à rassembler le petit nombre de militants sociaux-démocrates opposés à l’Union sacrée. Elle contribua à la parution (avril 1915) du premier numéro d’une revue, Die Internationale, aussitôt interdite. Son emprisonnement l’empêcha de participer en mars 1915 à la conférence internationale des femmes socialistes, tenue en Suisse à l’initiative de son amie
Clara Zetkin, où fut adopté un manifeste contre la guerre.
En prison, elle analysa les erreurs et les fautes de la social-démocratie allemande et dénonça le caractère de la guerre dans une brochure, Die Krise der Sozialdemokratie qui fut diffusée clandestinement, signée du pseudonyme Junius. Dans des Leitsätze (Principes directeurs) adoptés par le groupe Internationale, elle définit les bases d’une nouvelle Internationale. Son rôle fut décisif dans la constitution du mouvement spartakiste et la définition de ses objectifs.
Arrêtée préventivement en juillet 1916, elle passa le reste de la guerre en prison, mais parvint à rédiger des tracts, des articles qui parurent dans les Lettres de Spartacus. C’est en prison qu’elle écrivit en septembre 1918 ses notes sur la révolution russe, où elle reprochait à
Lénine et Trotsky d’avoir divisé la terre en petites parcelles individuelles, d’avoir cédé aux revendications nationalistes, d’avoir dissous l’Assemblée constituante en janvier 1918. Cela n’empêcha pas Rosa Luxemburg de réclamer, à partir de novembre 1918 en Allemagne, tout le pouvoir pour les conseils ouvriers et de s’opposer à l’élection d’une Assemblée nationale. Fondamentalement, elle reprochait aux bolcheviks de « supprimer la démocratie » et de mettre en place la dictature « d’une poignée de politiciens, c’est-à-dire une dictature au sens bourgeois ». Préconisant de tout autres moyens, elle affirmait que « sans une liberté illimitée de la presse, sans une liberté de réunion et d’association sans entraves, la domination des larges masses populaires est inconcevable ».

Libérée de la prison de Breslau début novembre 1918 par la révolution, elle fut chargée à Berlin de la rédaction du journal spartakiste Die Rote Fahne. Elle y dénonça avec véhémence la politique des socialistes majoritaires qui favorisait la contre-révolution. Toutefois elle n’approuva pas, au début janvier, les proclamations signées par Karl Liebknecht qui parlaient de vacance du pouvoir et qu’elle jugea, non sans raison, aventureuses.
Le 14 décembre 1918, Die Rote Fahne avait publié le programme de la Ligue spartakiste élaboré par ses soins, qui prévoyait une journée de travail « de six heures au maximum », la socialisation des grandes entreprises mais aussi des propriétés agricoles grandes et moyennes. Elle y écrivait que la réalisation du socialisme ne pouvait pas « résulter des décrets d’une autorité quelconque », mais uniquement être menée à bien « par les masses populaires elles-mêmes ». Elle en appelait également à l’abolition du travail salarié.
À la conférence qui donna naissance au Parti communiste d’Allemagne (Berlin, 30 décembre 1918-1er janvier 1919), Rosa Luxemburg présenta sa proposition de programme, qui fut adoptée. Dans son discours, elle en appelait à la « révolution mondiale du prolétariat ». Elle préconisa par ailleurs, sans succès, la participation du nouveau parti aux élections à l’Assemblée nationale, considérant que la révolution n’en était qu’à son commencement. Elle avait une vue beaucoup plus réaliste de la situation que la plupart des délégués emportés par la fougue et l’optimisme.
Toute sa vie, Rosa la Rouge avait été l’objet de calomnies. En novembre-décembre 1918, cette campagne s’intensifia au point de faire de cette militante qui ne voulait pas verser, la guerre finie, une seule goutte de sang, « Rosa la sanguinaire » (Die blutige Rosa).
Pendant la semaine sanglante de Berlin, elle refusa, par solidarité avec le prolétariat berlinois, de quitter la capitale. Dénoncée, elle fut arrêtée, avec
Karl Liebknecht, par une patrouille d’un régiment de la cavalerie de la garde (15 janvier 1919) qui ratissait Berlin sur ordre de Noske. Assassinée dans la nuit, son corps fut jeté dans un canal et retrouvé seulement cinq mois plus tard. Le 13 juin 1919, la population berlinoise lui fit de grandioses funérailles.

Rosa Luxemburg dans le Maitron (Le tome V, sur l'Allemagne, en ligne)

https://maitron.fr/spip.php?article229751

Ce volume retrace l’histoire du mouvement ouvrier allemand répertoriant les noms de ses acteurs classés suivant des bornes chronologiques précises de 1848, à 1918, à 1933, pour finir avec 1945. Le travail, né d’une première liste de 4 000 militants que Alexandre Adler avait donné à Jean Maitron, a été complété par Jacques Droz avec l’aide de spécialistes de différents domaines :
« ... Alain Ruiz pour la période de la Révolution française et Annelise Callede-Spaethe pour Wilhelm Liebknecht et son entourage. Comme collaborateurs attachés à de plus vastes ensembles de militants politiques et syndicalistes, je me suis adressé à Pierre Ayçoberry pour les activités de la Ligue des communistes à Cologne autour de 1848, à Alain Boyer pour Moses Hess et les « socialistes vrais », ainsi que pour Lassalle, à Jacques Grandjonc pour les relations entre ouvriers allemands et français au cours du Vormärz, à Irène Petit pour les conflits d’opinions autour de Bernstein et de Kautsky, à Gilbert Badia pour Rosa Luxemburg et les personnalités s’inspirant du marxisme sous le Second Reich et la République de Weimar, à Claudie Weill pour les milieux plus proches de l’anarchisme, à Pierre Broué pour les communistes oppositionnels qui ont connu leur calvaire soit sous le régime nazi, soit sous le stalinisme en URSS. Serge Cosseron a bien voulu compléter ces biographies en apportant l’appoint des personnalités de l’ultra-gauche. »
Jacques Droz, quant à lui, s’est intéressé « aux militants des deux partis ouvriers qui ont été impliqués avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, en Allemagne et à l’étranger, aux luttes antifascistes. » Il a aussi rédigé l’Avant-propos et l’Introduction historique qui sont présentés dans leur intégralité dans cette version numérique.

Nous retrouverons dans ce volume les acteurs d’un mouvement ouvrier qui prit racine au XVIIIe siècle, avec des penseurs influencés par la révolution française, comme Franz Ziegenhagen, Georg Rebmann et Johann Gottlieb Fichte, qui se développa avec Marx, Engels et Lassalle, jusqu’à retracer les parcours des politiques ou syndicalistes ayant milité avant l’arrivée de Hitler au pouvoir, mais qui furent aussi des figures de premier plan dans l’Allemagne d’après-guerre, comme Willy Brandt, Erich Honecker.

Suivant la chronologie de l’histoire allemande, nous retrouverons la naissance du mouvement ouvrier allemand (Wilhelm Weitling, Theodor Schuster et Wolfgang Strähl, entre autres), la diffusion des idées socialistes (Ludwig Börne et Heinrich Heine), la naissance des idées communistes. Avec la révolution de 1848 « sous le contrôle de la petite bourgeoisie commerçante ou intellectuelle », nous serons les témoins de la naissance du parti socialiste allemand fondé en 1869 par August Bebel et Wilhelm Liebknecht, et de celle du parti des travailleurs de Ferdinand Lassalle à l’origine de la social-démocratie allemande.
Tout au long des XIXe et XXe siècles, nous croiserons les figures connues d’hommes et femmes politiques comme Franz Hitze, Karl Kautsky, Ignaz Auer, Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, Franz Mehring, Friedrich Ebert, Paul Levi, Rudolf Hilferding, Ernst Thälmann et Clara Zetkin.

Tant de parcours qui n’oublient pas non plus de souligner l’importance de la dimension culturelle par l’œuvre de journalistes comme Willi Münzenberg ou d’artistes comme George Grosz ou Käthe Kollwitz, d’écrivains, poètes ou dramaturges tels que Johannes R. Becher, Erwin Piscator, Bertolt Brecht ou d’architectes du Bauhaus (Gropius).

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30 avril 2020 4 30 /04 /avril /2020 15:38
Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital – Transcription et traduction de la conférence de Raphaëlle Chappe.
Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital – Transcription et traduction de la conférence de Raphaëlle Chappe,  2020/05/07 admin

Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital

 

Transcription et traduction de la conférence de Raphaëlle Chappe, tenue le 8 octobre 2016 à Vienne, « Rosa Luxemburg : l’Accumulation du capital 11 ans plus tard. ». L’exemple des Iphones n’a pas été retenu, nous considérons qu’il n’aide pas véritablement à la compréhension de la dynamique d’expansion et de conquête de nouveaux marchés.

 

Nous vivons dans un « monde plat » pour citer un best-seller mondial, dans un marché et une économie mondialisés avec une libre circulation des marchandises, de la technologie. Les marchés financiers sont devenus presque complètement mondialisés, et la politique étrangères des USA par exemple, des pays riches, soutiennent les politiques de privatisation qui sont menées dans d’autres pays, permettant notamment à ces pays d’y assurer leur présence. Dans les déclarations que l’on trouve dans la presse financière, il apparaît que ce processus est vraiment bon pour la croissance économique, la productivité, qu’il aide à créer de meilleurs produits. Mais force est de constater que toutes ces décennies néolibérales nous ont mensé à la crise de 2007-2008. Donc voici la première question : l’expansion du capital par la conquête de marchés étrangers, est-elle guidée par la croissance ou par des difficultés de croissance ? Et c’est sur ce point où l’Accumulation du capital de Rosa Luxemburg est d’actualité pour nous, et peut nous aider à répondre à ce problème.

 

Dans ce livre, Rosa Luxemburg identifie une dynamique générale qui se situe au croisement du processus général d’accumulation du capital et de l’expansion géographique : c’est la tendance chronique à produire des crises de suraccumulation, ce qui implique que le capitalisme a constamment besoin d’ouvrir de nouveaux territoires pour éviter la crise, c’est une nécessité pour la survie du système.

 

Son analyse est fondée sur une analyse critique des schémas de reproduction de Marx contenus dans le Livre II du Capital, ce sont des arguments techniques, mais pour résumer on peut dire que dans le Livre II, il y a le circuit du capital dans le contexte d’une reproduction simple, dans lequel il n’y a pas de réinvestissement par les capitalistes dans de nouveaux moyens de production. Dans ce cas, toute la plus-value qui a été extraite du travail est dépensée en biens de consommation, notamment de luxe. Dans ce schéma, l’ensemble de l’économie se reproduit, mais reste inchangée dans son échelle et ses proportions. D’un autre côté, vous avez la reproduction dite élargie, dans laquelle une portion de la plus-value est réinvestie ce qui permet au système de s’agrandir en termes de proportions. Et c’est alors que vous arrivez à une situation où la plus-value est réinvestie mais où la composition du capital est changeante : c’est-à-dire qu’il y a de plus en plus de réinvestissement dans des moyens de production. Et c’est une situation où Rosa Luxemburg identifie un problème dans la réalisation de la plus-value. Donc si le système économique est fermé il ne peut pas perdurer. L’approche de Rosa Luxemburg consiste à se concentrer sur le rôle joué par les marchés extérieurs non capitalistes. Donc l’idée c’est qu’il y aura une crise sauf si l’on se tourne vers des marchés non-capitalistes extérieurs pour réaliser la plus-value. Mais où ces marchés extérieurs ont-ils l’argent pour acheter les produits ? Il y a trois possibilités : ils peuvent en obtenir en ayant des travailleurs vendant leur force de travail pour un salaire. Mais à partir du moment où ils vendent leur force de travail contre un salaire, ils ne sont plus extérieurs au capitalisme, ils ont été absorbés, donc cela ne résout pas le problème de la réalisation de la plus-value. La deuxième possibilité est de puiser dans les richesses existantes, matières premières, réserves d’or, mais ces réserves seront épuisées à un certain moment, donc vous évacuez cette valeur qui existe en dehors du capital mais à un moment vous atteignez des limites.

 

Et la troisième option, c’est celle de passer par les mécanismes de la dette. C’est ainsi que nous pouvons évaluer le rôle que joue la finance internationale et le lien qu’entretiennent finance et impérialisme. L’argument de RL, c’est que les fonds prêtés ou éventuellement, déjà remboursés, servent à acheter du capital productif dans les pays d’où le capital provient à l’origine, et c’est ainsi que la plus-value est réalisée, et ceci s’ajoute au processus d’accumulation. Comment cela fonctionne-t-il exactement ?

 

Tout d’abord les profits sont extraits de la force de travail d’un pays capitaliste développé et riche, mais au lieu d’être redéployé dans ce même pays, la plus-value est transformée en argent prêté, en de la dette dans d’autres pays. Les pays pauvres l’utilisent pour acheter des biens capitalistes importés, donc les fonds se transforment ainsi en capital productif. Et ceci fournit les moyens aux pays pauvres d’acheter de l’équipement, et développer leur infrastructure industrielle.
 

RL donne l’exemple de l’Egypte. Suite à la guerre civile aux USA dans les années 1860, survient ce qu’on a appelé la « bulle du coton », et tout le monde a pensé qu’il serait bon pour l’Egypte de produire du coton, et donc comment cette production de coton a-t-elle été financée ? Elle a été financée par des crédits provenant d’Angleterre. Et RL montre qu’en 1874 la dette publique de l’Egypte est passée de 3 à 94 millions de livres. S’ensuit donc une crise de surendettement : ce pays achète du capital productif, il finance cela par la dette, la dette augmente, et on en arrive à un point où la crise de surendettement (le fait de se s’endetter pour rembourser, même pas la dette elle-même, ni non plus les intérêts en totalité, mais seulement une partie) implique qu’il est nécessaire d’emprunter plus d’argent encore pour payer les intérêts déjà existants. Or ce cycle n’est pas viable sur le long terme, et mène à des crises.

 

Si on retrace le chemin qu’empruntent les fonds, on constate qu’ils reviennent de là où ils sont partis, parce que le pays endetté utilise des fonds pour acheter des biens capitalistes produits dans les pays d’où sont originaires les fonds, donc ainsi, l’argent revient, et c’est ainsi que la plus-value est réalisée dans les pays riches. Mais en dernier terme, qui rembourse ces dettes ? Voici la dernière pièce du puzzle, et dans le cas de l’Egypte, la source était l’économie paysanne, donc trois sources de remboursement : la terre, en la vendant aux détenteurs de la dette, deuxièmement par la force de travail, par du travail forcé, et aussi au travers du système de taxes, dans ce cas on ponctionne le produit social total. Donc trois sources possibles de remboursement.

 

Bien que les investissements capitalistes dans les pays étrangers et la demande de ces pays en importation de capital pourraient être saisis comme quelque chose de positif, parce qu’au premier coup d’oeil, ils fournissent les moyens de contribuer au développement de ces pays, dans l’analyse de RL, l’ensemble du schéma fait apercevoir quelque chose de bien plus sinistre : l’extraction de plus-value par le système capitaliste possède également une dynamique de puissances et de domination politique. Quelle est cette dynamique de puissances ? On peut identifier ici la finance comme une tour de contrôle, comme un mode de l’impérialisme. Mais ce qui est particulièrement intéressant, c’est qu’en Egypte, en 1882, l’armée britannique occupe l’Egypte. Quelle coïncidence ! La raison officielle était de réprimer des rébellions, mais en réalité, dans l’analyse de RL, l’occupation était le bras armé de collecteurs de dettes. Ce qui ressort de ces analyses, c’est que la finance est un mécanisme d’extraction de produit social national dans des pays non-capitalistes constituant une base vitale pour l’accumulation capitaliste, et en fait, comme un moyen nécessaire pour éviter une crise structurelle.

 

Le cas de la Grèce l’illustre bien, la propriété de la dette grecque, même si elle a connu plusieurs propriétaires, a été pour la plupart du temps détenu par des fonds étrangers. Pour RL la dette est détenue par un pays qui utilise la finance internationale pour pouvoir réaliser sa plus-value et y empêcher l’apparition d’une crise. Le système ne peut pas supporter qu’une dette ne soit pas payée. En Grèce par exemple, l’enjeu principal était que le pays ne soit pas en faillite. Il ne s’agissait pas, on s’en doute, de venir porter secours à un pays surendetté, mais bien d’assurer aux créanciers qu’ils soient remboursés. Donc on peut alors penser les liens entre ces mécanismes d’extraction financière et l’impérialisme. Ainsi en Grèce, le remboursement était accompagné d’un ensemble de mesures de restriction budgétaires que l’on peut analyser comme une extraction ayant lieu dans une sphère non-capitaliste, en effet, qui en dernier terme paye pour ces dettes ? Pour ce qui est de la Grèce, en passant par les taxes, il s’agissait de la population.

 

Il existe des différences entre le moment où RL écrit et aujourd’hui. Les différences entre l’avant première guerre et aujourd’hui sont le développement de la finance, le rétrécissement des sphères non capitalistes (conséquence de l’expansion du mode de production capitaliste), ce qui fait qu’il est plus dur aujourd’hui de trouver des régions du monde dans lesquelles vous n’avez pas d’économie capitaliste.

 

Il y a une complexité grandissante de la finance. Il y a potentiellement de nombreuses couches d’intermédiaires entre l’extraction domestique de profits, d’une part, et son redéploiement sur les marchés financiers internationaux. C’est pourquoi il n’est pas simple de retracer les circuits que l’argent emprunte et les mouvements qu’il connaît comme pouvait le faire RL. Quand RL écrivait, il n’y avait pas un contexte de coopération internationale, le capital était libre de se mouvoir. Si le capital se déplace aujourd’hui, ce n’est plus aussi simplement, puisqu’il y a des régimes légaux très divers. Un autre point intéressant aujourd’hui c’est le taux d’intérêt. RL ne parle pas vraiment du taux d’intérêt, alors qu’aujourd’hui, le taux d’intérêts est une clé pour comprendre les dynamiques des marchés capitalistes, puisque ces derniers l’utilisent pour savoir combien ils obtiendront en retour, ce qui fait partie du processus d’extraction aujourd’hui.

 

Si vous lisez l’Akk, pensez à sa description de la finance internationale, le lien entre la finance comme moyen d’éviter les crises.

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 L’Accumulation du capital, Contribution à l’explication économique de l’impérialisme est paru aux Editions Agone/Smolny.
 
Agone/Smolny - Préface de Guillaume Fondu et Ulysse Lojkine - Postface de Mylène Gaulard et Loren Goldner - Traduction de l’allemand par Irène Petit et Marcel Ollivier, entièrement revue par Marie Boudoussier
 

« Le capitalisme tend à se répandre sur le globe et à détruire toutes les autres formes économiques, n’en supportant aucune à côté de lui. Et pourtant il est en même temps la première forme économique incapable de subsister seule, à l’aide de son seul milieu. Ayant tendance à devenir une forme mondiale, il se brise à sa propre incapacité d’être cette forme mondiale. Il offre l’exemple d’une contradiction historique qui, à un certain degré de développement, ne peut être résolue que par l’application des principes du socialisme, c’est-à-dire par une forme économique qui est par définition une forme mondiale harmonieuse, fondée sur la satisfaction des besoins de l’humanité travailleuse. »

Ouvrage majeur de Rosa Luxemburg, écrit en 1913, L’Accumulation du capital est le premier texte de l’économie politique marxiste à formuler une théorie d’ensemble de l’impérialisme. En montrant la nécessité inscrite au coeur du mode de production capitaliste de s’étendre à l’échelle du monde en asservissant des territoires non capitalistes et leurs populations, il éclaire les mécanismes qui allaient bientôt déclencher la grande guerre pour le repartage du monde.

Parution : 22/11/2019 - ISBN : 9782748903720 - Format papier : 768 pages - 28.00 € - Format numérique 21.99 €

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30 avril 2020 4 30 /04 /avril /2020 10:48
Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital – Présentation

Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital

Présentation

 2020/05/07 admin https://rednotes.noblogs.org/post/2020/05/07/rosa-luxemburg-laccumulation-du-capital-presentation/

Voici un aperçu général de la structure et des développements de l’Accumulation du capital. Rappelons tout d’abord de manière synthétique la thèse centrale de Rosa Luxemburg. Elle identifie une dynamique du capital qui se situe au croisement du processus général d’accumulation du capital et de l’expansion géographique. Cette dynamique provient d’une tendance chronique à produire des crises de suraccumulation, qui implique que le capitalisme a constamment besoin d’ouvrir de nouveaux territoires, ou plus généralement, conquérir des marchés qui échappent encore au rapport social capitaliste avec pour seul finalité : éviter la crise. Cette constante sortie de lui-même est une nécessité pour la survie de ce système économique, elle constitue sa spécificité par rapports aux autres modes de production, tout en manifestant son impossibilité à perdurer indéfiniment. La thèse de Rosa Luxemburg se résume comme il suit :

Le processus de la production capitaliste est dominé par le profit. Pour chaque capitaliste la production n’a de sens et de but que si elle lui permet d’empocher tous les ans un « bénéfice net », c’est-à-dire le profit qui subsiste après déduction des frais de renouvellement du capital, mais la loi fondamentale de la production capitaliste, à la différence de toute autre forme économique fondée sur l’exploitation, n’est pas simplement la poursuite d’un profit tangible, mais d’un profit toujours croissant. À cette fin le capitaliste, à la différence essentielle des autres types historiques de l’exploiteur, utilise le bénéfice qu’il tire de l’exploitation, non pas exclusivement ni même d’abord pour son luxe personnel, mais toujours davantage pour augmenter le taux de l’exploitation. La plus grande partie du profit obtenu devient du capital nouveau et sert à élargir la production. Le capital s’amoncelle ainsi, il est, selon l’expression de Marx, « accumulé » et — condition première aussi bien que conséquence de l’exploitation — la production capitaliste s’élargit indéfiniment.1

Le livre se décompose en trois parties. Tout d’abord, l’exposé du problème d’un point de vue « logique », dans le cadre d’un capitalisme pur, puis Rosa Luxemburg examine comment ce problème a été posé dans l’économie politique au travers de polémiques sur des périodes historiques, et finalement Rosa Luxemburg se demande comment le capital, historiquement, a pu tout de même accumuler autant. La division générale du livre est en 32 chapitres. Enfin, on trouve dans ce volume édité par les éditions Smolny et Agone, « L’Anticritique », les réponses de Rosa Luxemburg aux critiques qui lui avaient été faites, après la parution de son livre, notamment par Karl Kautsky et Otto Bauer.

I-Le problème de la schématisation de la reproduction

Rosa Luxemburg commence à définir les contours du problème (chapitre 1-7). Rosa Luxemburg part des schémas du Livre II du Capital qui posent le problème de la reproduction, c’est-à-dire, le rapport entre les cycles production-consommation-année suivante. Dans cette formalisation, au terme du processus de reproduction, la société doit avoir produit de quoi renouveler ses machines et nourrir sa population, ouvriers et capitalistes.

Dans les chapitres 1-3, Rosa Luxemburg réinscrit Marx dans la tradition économique, Quesnay, Smith et Ricardo pour montrer la spécificité de sa contribution. Dans le chapitre 4, Rosa Luxemburg pose donc les garanties formelles de la reproduction, comme étant celle des rapports entre secteur I et II.

Son analyse est fondée sur une analyse critique des schémas de reproduction de Marx contenus dans le Livre II du Capital, ce sont des arguments techniques, mais pour résumer on peut dire que dans le Livre II, il y a le circuit du capital dans le contexte d’une reproduction simple, dans lequel il n’y a pas de réinvestissement par les capitalistes dans de nouveaux moyens de production. Dans ce cas, toute la plus-value qui a été extraite du travail est dépensée en biens de consommation, notamment de luxe. Dans ce schéma, l’ensemble de l’économie se reproduit, mais reste inchangée dans son échelle et ses proportions. D’un autre côté, vous avez la reproduction dite élargie, dans laquelle une portion de la plus-value est réinvestie ce qui permet au système de s’agrandir en termes de proportions. Et c’est alors que vous arrivez à une situation où la plus-value est réinvestie mais où la composition du capital est changeante : c’est-à-dire qu’il y a de plus en plus de réinvestissement dans des moyens de production. Et c’est une situation où Rosa Luxemburg identifie un problème dans la réalisation de la plus-value. Donc si le système économique est fermé il ne peut pas perdurer.

A partir du chapitre 7, Rosa Luxemburg expose la spécificité de l’accumulation capitaliste. Elle boutit à la conclusion que le degré de généralité des schémas de reproduction ne permet pas de penser la spécificité du mode de production capitaliste. En ressort la condition de l’accumulation : la réalisation de la survaleur produite (conversion M-A) qui pourra ensuite être capitalisée. Donc il faut une demande pour les marchandises additionnelles produites.

Rosa Luxemburg cherche à démontrer logiquement l’impossibilité de cette réalisation dans un système capitaliste clos. Elle montre l’insuffisance de la solution de Marx (chapitres 8 et 9). Il ne s’agit plus de poser la question comme Marx le faisait en terme de monnaie excedentaire permettant l’accroissement de la demande solvable, et de chercher alors des « sources de monnaie »2, mais bien plutôt de considérer que cet accroissement est rendu possible par des « besoins économiques réels ».

C’est la partie qui sera tout d’abord la plus débattue après sa parution en 1913. On y voyait un problème formel de la réalisation de la survaleur (schémas de reproduction). L’impossibilité du développement endogène du capitalisme serait postulée et non démontrée.

II-Tentatives de résolution du problème dans le champ de l’économie politique

Dans la deuxième partie, l’exposé historique du problème correspond à une discussion dans le cadre de trois polémiques distinctes portant sur trois périodes historiques différentes au sujet du problème de l’accumulation. Chacune des polémiques est menée dans un contexte différent, mais sont toutes structurées de la même manière. On retrouve constamment, pour l’essentiel, deux camps, d’une part les harmonicistes bourgeois pour qui l’offre et la demande finissent toujours par coïncider, et d’autre part ceux qui estiment que le problème se situe au niveau de la réduction de la part des salaires dans le produit social global.

Les deux premières controverses apparaissent suite à d’importantes crises économiques. Tout d’abord les premières crises en Angleterre (1815-1819), puis les crises entre 1837 et 1857 partant des Etats-Unis. Enfin, la dernière polémique porte sur la Russie pendant les deux dernières décennies du XIXe siècle. Rosa Luxemburg montrera l’insuffisance de toutes les solutions des économistes qui se sont confrontés au problème, avant Marx, après lui et par ceux qui s’en réclament.

La première polémique (chapitres 10-14) a lieu entre Sismondi et Malthus VS Ricardo, McCulloch, Say. Cette polémique est née suite aux crises des années 1815-1818-1819 en Angleterre. Ces deux premières crises furent d’une part de surproduction (les marchandises ne se vendaient pas) et d’autre part, humanitaires : la ruine de l’artisanat, le dépeuplement de la campagne, la prolétarisation des couches moyennes, la paupérisation des ouvriers, leur éviction par les machines, le chômage, etc3.

Pour Sismondi la source de tous les maux est la disproportion entre la dynamique d’accumulation et la répartition du revenu qu’elle conditionne4. Mais c’est une manière macro-économique de poser le problème qui n’est pas toujours adoptée, notamment par Jean-Baptiste Say, pour qui tout se résoud au niveau d’échanges interindividuels, que des crises proviennent d’une disharmonie ponctuelle entre les volontés des individus. Rosa Luxemburg montre les erreurs de l’harmonicisme, mais surtout relève le fond commun que tous les auteurs engagés dans la polémique partagent : le dogme de Smith, l’idée selon laquelle la production annuelle d’une économie se décompose en salaires, profits et rentes foncières. La spécificité de la contribution de Marx est d’avoir aperçu qu’ils ne prenaient pas en compte le capital constant (machines). La conclusion que tire Rosa Luxemburg est qu’ il faut partir à la fois de la nature contradictoire du mode de producton capitaliste et de son histoire effective, puisque toute compréhension de la dynamique du capitalisme n’est compréhensible que dans les rapports qu’il entretient avec les autres modes de production, et plus généralement avec les autres formes de l’activité sociale pas encore soumises à la valorisation du capital.

Deuxième controverse (chapitres 15 à 17) a lieu entre Rodbertus et von Kirchmann. Les crises de 1837, 1839, 1847 et 1857 laissaient voir encore des contradictions internes du développement capitaliste qui démentirent encore une fois les doctrines de l’harmonie. Rodbertus fournira une analyse semblable à celle de Sismondi : que la part du salaire dans le produit national est toujours plus petite. Von Kirchmann estimera que les crises sont provoquées par manque de débouchés, non pas une production insuffisante, mais une vente insuffisante5. Premiers représentants du réformisme au sens où limitation par voies juridiques et légales de l’accumulation, régulation « par l’extérieur ».

Pour Von Kirchmann, il faut que les capitalistes dépensent plus dans le luxe pour absorber l’excédent, qu’ils « renoncent à l’accumulation » et Rodbertus, comme Sismondi : il faut que les ouvriers soient mieux payés pour réajuster la part des salaires dans le produit global. Ajustement du salaire sur la productivité du travail. Mais les crises sont une forme du mouvement de la reproduction du capital, et aucun renoncement à l’accumulation qu’il soit forcé par la légalité ou le résultat d’une contrition des capitalistes n’y changera rien6.

La troisième controverse (chapitres 18-24) a lieu entre Struve, Boulgakov, Tougan Baranovski contre Danielson et Vorontsov et porte sur la Russie pendant les deux dernières décennies du XIXe siècle. La question est de déterminer su le capitalisme peut se développer dans l’économie semi-féodale de la Russie. D’un côté, il y a les populistes russes, dont Danielson et Vrontsov : ceci n’est pas nécessaire, il faut s’appuyer sur les masses paysannes et leurs institutions soi-disant égalitaires, l’obchtchina, comme point de départ d’un socialisme sans passer par le capitalisme. Un débat qui est marqué par la parution en Russie du Livre II du Capital en 1885 par Danielson, ce qui change fortement la nature du débat.

De l’autre côté, pour les marxistes légaux (parce qu’autorisés par le régime tsariste, Struve, Boulgakov, Tougan Baranovski), ce développement est nécessaire. Tougan Baranoski affirme que la demande de machine viendra stimuler l’accumulation et développer le secteur I, même s’il y a régulièrement des crises de disproportion entre les deux secteurs, le capitalisme créé un marché sans limites et au final, comme chez Say et Ricardo, un équilibre naturel se forme entre offre et demande. Mais en voulant montrer que capitalisme pouvait s’imposer en Russie, ils ont fini par prouver qu’il était éternel7.

III-Le procès historique d’accumulation du capital

Dans les chapitres à 25-32, Rosa Luxemburg poursuit sa réflexion. La contradiction fondamentale identifiée entre la capacité de production et la capacité de consommation ne peut pas être résolu par le schéma de la reproduction élargie, donc sa résolution doit être trouvée à l’extérieur. Rosa Luxemburg entreprend d’examiner la manière dont le capitalisme ne cesse de sortir de lui-même pour aller parasiter les diverses formes non capitalistes de l’activité sociale. Et cela tombe bien, historiquement, au départ, le capitalisme se trouve dans un milieu social non capitaliste, milieu féodal en Europe, puis dans une économie marchande « simple », le milieu paysan et artisan, et les vastes régions géographiques aux diverses formations sociales.

Le problème de la réalisation de la survaleur est résolu par l’extorsion violente de valeur dans les sociétés périphériques ou dans les fractions de l’activité économique qui échappe encore au rapport social cap. L’expropriation n’est pas seulement le moment de l’accumulation dite primitive, avec les enclosures (enrichissement et prolétarisation), mais c’est un processus permanent, comme le rappelleront Mylène Gaulard et Loren Goldner dans la postface.

L’anthropologie marxiste à partir des années 60 s’est concentrée sur la troisième partie. Un courant se dresse alors contre une approche quantitative des rapports d’échange inégal entre centre et périphérie, ils vont suivre cette intuition de Rosa Luxemburg et proposer une approche qualitative.

Dans le chapitre 27, Rosa Luxemburg analyse le rapport entre mode de production capitaliste et mode de production non-capitaliste en terme de « métabolisme » :

Si le capitalisme vit des formations et des structures non capitalistes, il vit plus précisément de la ruine de ces structures, et s’il a absolument besoin pour accumuler d’un milieu non capitaliste, c’est qu’il a besoin d’un sol nourricier aux dépens duquel l’accumulation se poursuit en l’absorbant. Vue dans une perspective historique, l’accumulation capitaliste est une sorte de métabolisme entre les modes de production capitaliste et précapitaliste.8

Rosa Luxemburg suit une taxinomie des sociétés que l’on retrouve dans l’histoire de l’évolution des rapports entre mode de production capitaliste et mode de production non-capitaliste : économie naturelle, économie marchande simple, la troisième, le capitalisme, la production marchande avec capitalisation de plus-value9.

Au départ, il y a une société d’économie naturelle n’a pas besoin de marchandises étrangères ; la production est domestique, close et autosuffisante. Dans son extension première, le capital peut rencontrer des résistances puisqu’il opère une dissolution des liens de « l’économie naturelle », la liaison organique et réciproque entre terre et hommes et hommes entre eux. La destruction se fait par institution de la propriété privée de la terre, comme par exemple, la France en Algérie. Il s’agit de privatiser pour faire de ces propriétés des cibles potentielles du capitalisme. Il est possible alors d’entrer dans la production marchande simple, là où différentes unités de production sont reliées par l’échange monétaire, mais où il n’y a pas encore ni de salariat et ni d’accumulation.

Dans le chapitre 28, Rosa Luxemburg analyse quand le capitalisme s’impose par la violence (comme par les Guerres de l’opium), il y a des résistances. Les révolutions permettent de briser les formes d’État périmées10.

Dans le chapitre 29, Rosa Luxemburg analyse la lutte contre l’économie paysanne : les rapports capitalistes s’imposent en dehors des lois du marché, expropriation, guerre, résultat : séparation agriculture et artisanat, fermiers deviennent ouvriers agricoles = prolétaires.

Dans cette partie, il est très important de remarquer que la question des débouchés n’apparaît qu’à la fin (chapitres 30-32) : puisque la réalisation de la survaleur non consommée à l’extérieur n’est qu’un terme ultime du rapport qui s’est développé entre les sociétés non capitalistes et capitalistes. C’est seulement à ce moment, celui où le capitalisme est déjà en train de s’établir en périphérie, que Rosa Luxemburg emploie le terme d’impérialisme : « celui-ci se manifeste par l’exportation des capitaux du centre vers les nouvelles sociétés capitalistes »11, il utilise le militarisme, les emprunts et les investissements dans les infrastructures.

Rosa Luxemburg va analyser cette ultime phase qui consiste en l’industrialisation des pays aux dépens desquels le capital réalisait jusque-là sa survaleur. Les méthodes spécifiques de cette phase sont les emprunts internationaux, la construction de chemin de fer, les révolutions et les guerres. La période caractéristique de ce phénomène s’étend de 1900 à 1910.

Les emprunts servent à acheter du capital productif dans les pays d’où le capital provient à l’origine, et c’est ainsi que la survaleur est réalisée, et contribue au processus d’accumulation. Tout d’abord les profits sont extraits de la force de travail d’un pays capitaliste développé, mais au lieu d’être redéployés dans ce même pays, ils sont transformés en argent prêté, en de la dette, dans d’autres pays encore peu développés. Ces pays l’utilisent alors pour acheter des biens capitalistes importés, ainsi les fonds se transforment ainsi en capital productif. Et ceci fournit en plus les moyens aux pays encore peu développés industriellement d’acheter de l’équipement, et de développer leur infrastructure industrielle, faisant s’accélérer le procès d’expansion du capital.

Cette édition établie à partir des différents appareils critiques (allemands, anglais et français, de l’édition Maspero) permet au lecteur de saisir, au moyen d’un appareil critique de notes, tout aussi précis que réduit au minimum, tous les enjeux du texte. La préface permet de lire l’ouvrage dans son contexte de production et expose les étapes de sa réception, une réception qui s’est concentrée dans un premier temps sur les schémas de reproduction et leur validité, une discussion de théorie économique. Puis les préfaciers exposent quels usages il en a été fait, par les keynésiens et l’anthropologie marxiste (par la question des sociétés non-capitalistes). La postface expose son actualité et sa pertinence par rapport aux économistes aujourd’hui, notamment le fait que Rosa Luxemburg n’est pas à ranger dans les sous-consommationnistes keynésiens, et qu’elle permet de penser les tensions internationales aujourd’hui et surtout la question de la dette.

L’analyse par Rosa Luxemburg des investissements capitalistes dans les pays étrangers et la demande de ces pays en importation de capital permet d’apercevoir quelque chose de bien sinistre : l’extraction de survaleur par le système capitaliste possède également une dynamique de puissances et de domination politique. On peut estimer que la finance joue alors le rôle d’une tour de contrôle, qu’elle est un mode de l’impérialisme.

Ce qui ressort de analyses de Rosa Luxemburg, c’est que la finance est un mécanisme d’extraction de produit social national dans des pays non-capitalistes constituant une base vitale pour l’accumulation capitaliste, et en fait, est un moyen nécessaire pour repousser une crise structurelle. Ce qui a été démontré comme une impossibilité « abstraite », une contradiction logique (dans la première partie), ne peut se résoudre que par la force et la violence, par l’extorsion permanente, l’accumulation primitive permanente, nous laissant face à l’alternative socialisme ou barbarie que Rosa Luxemburg avait énoncé dans la Brochure de Junius.

1Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital, Œuvres complètes, Tome V, Agone-Smolny, novembre 2019, p. 495.

2Ibid. p. 141.

3Ibid. p. 166.

4Ibid. p. 167.

5Ibid. p. 225.

6Ibid. p. 269.

7Ibid. p. 336.

8Ibid. p. 434.

9C’est une taxinomie que Rosa Luxemburg expose notamment dans l’Introduction à l’économie politique mais de manière différente et en certains points, plus approfondie.

10Ibid. p. 437.

11Ibid. p. XXXII.

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 L’Accumulation du capital, Contribution à l’explication économique de l’impérialisme est paru aux editions Agone/Smo,y
 
Agone/Smolny - Préface de Guillaume Fondu et Ulysse Lojkine - Postface de Mylène Gaulard et Loren Goldner - Traduction de l’allemand par Irène Petit et Marcel Ollivier, entièrement revue par Marie Boudoussier
 

« Le capitalisme tend à se répandre sur le globe et à détruire toutes les autres formes économiques, n’en supportant aucune à côté de lui. Et pourtant il est en même temps la première forme économique incapable de subsister seule, à l’aide de son seul milieu. Ayant tendance à devenir une forme mondiale, il se brise à sa propre incapacité d’être cette forme mondiale. Il offre l’exemple d’une contradiction historique qui, à un certain degré de développement, ne peut être résolue que par l’application des principes du socialisme, c’est-à-dire par une forme économique qui est par définition une forme mondiale harmonieuse, fondée sur la satisfaction des besoins de l’humanité travailleuse. »

Ouvrage majeur de Rosa Luxemburg, écrit en 1913, L’Accumulation du capital est le premier texte de l’économie politique marxiste à formuler une théorie d’ensemble de l’impérialisme. En montrant la nécessité inscrite au coeur du mode de production capitaliste de s’étendre à l’échelle du monde en asservissant des territoires non capitalistes et leurs populations, il éclaire les mécanismes qui allaient bientôt déclencher la grande guerre pour le repartage du monde.

Parution : 22/11/2019 - ISBN : 9782748903720 - Format papier : 768 pages - 28.00 € - Format numérique 21.99 €

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 13:33
Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht ... , "L'ennemi principal est dans notre propre pays" - accès gratuit sur le site les bons caractères

Belle initiative. Pour nous qui refusons de faire travailler des ouvriers, des employés, des postiers pour nous faire livrer.

L’ennemi principal est dans notre propre pays

écrit par Lénine, Karl Liebknecht, Rosa Luxemburg, Pierre Monatte, Alfred Rosmer, Khristian Rakovsky, Léon Trotsky mis à disposition gratuitement sur le site des "Bons caractères"
 
 
Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht ... , "L'ennemi principal est dans notre propre pays" - accès gratuit sur le site les bons caractères

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Nous mettons gratuitement à votre disposition sur notre site une sélection de 6 livres électroniques à découvrir ou redécouvrir en cette période de confinement.

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Alors, à vos liseuses !

 

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1. Table des matières

 

Introduction 5

 

1. Lénine 17

 

Les tâches de la social-démocratie révolutionnaire dans la guerre européenne (septembre 1914)

 

2. Léon Trotsky 23

 

La guerre et l’Internationale (31 octobre 1914)

 

3. Karl Liebknecht 99

 

Déclaration au Reichstag contre le vote des crédits de guerre (2 décembre 1914)

 

4. Pierre Monatte 103

 

Lettre de démission au Comité confédéral de la CGT (décembre 1914)

 

5. Alfred Rosmer 109

 

Un îlot en 1914 : La Vie ouvrière (février 1936)

 

6. 117

 

Les socialistes français et la guerre : discussion entre le député socialiste français Charles Dumas et le socialiste roumain Christian Rakovsky(mai 1915)

 

7. Rosa Luxemburg 149

 

La crise de la social-démocratie (écrit en 1915, publié pour la première fois en 1916)

 

8. Lénine 161

 

Le socialisme et la guerre (août 1915)

 

9. Karl Liebknecht 199

 

L’ennemi principal est dans notre propre pays ! (27 mai 1915)

 

10. Karl Liebknecht 205

 

Lettre à la conférence de Zimmerwald (septembre 1915)

 

11.209

 

Compte-rendu de la conférence de Zimmerwald (5-8 septembre 1915)

 

12. Lénine 221

 

Projet de résolution de la gauche de Zimmerwald (2 septembre 1915)

 

13. Afred Rosmer 225

 

Lettre aux abonnés de la Vie ouvrière (1er novembre 1915)

 

14. Léon Trotsky 237

 

Projet de manifeste pour la conférence de Kienthal (Janvier 1916)

 

15. Résolution de la conférence de Kienthal 243 

 

L’attitude du prolétariat en face des problèmes de la paix (24-30 avril 1916)

 

16. Karl Liebknecht 247

 

Lettre au tribunal gouvernemental allemand de Berlin(17 août 1916)

 

Chronologie 251

 

Table des matières

 

 

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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009