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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 12:36

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

Cet article fait partie de ceux traduits en 1988/1989, articles peu connus car articles de circonstances mais qui permettent de comprendre l'arrière-plan des grands textes de Rosa Luxemburg (ils sont contemporains de Réforme sociale ou Révolution?) et l'extraordinaire continuité de la pensée et des analyses de Rosa Luxemburg.

 

Il appartient à la chronique signée "ego" et qui s'intitule "Tour d'horizon politique et social". La chronique parue dans la Sächsische Arbeiterzeitung comporte 27 articles. Voir sur le blog : Une chronique nommée ego

 

Ces traductions font partie d'un travail "Elaboration d'une pensée contre la guerre", commencé avec Gilbert Badia, dont il n'est pas interdit de rêver qu'il trouvera peut-être un jour son aboutissement?.

 

Dominique Villaeys-Poirré

rosa.jpg

 


Les travailleurs des Etats-Unis et la politique annexionniste

 

Article publié le 8 janvier 1899 dans la Sächsische Arbeiterzeitung

 

Dans deux articles intéressants, "L'American Federationist", organe central des syndicats des Etats-Unis, a pris position - comme l'indique la "Soziale Praxis" -  sur la politique actuelle d'annexion de l'Union . Selon ces articles, les travailleurs américains se déclarent de la manière la plus ferme opposés à l'annexion des Philippines et des Iles Hawaii.

 

Et ceci, non comme l'on pourrait s'y attendre, du fait de l'éventuelle concurrence de forces productives bon marché provenant des territoires annexés et du danger, qui en découlerait, d'une réduction générale des salaires.

 

Les syndicalistes se laissent guider par des motifs bien plus élevés. Ce qu'ils craignent, ce sont les conséquences fatales provenant de l'annexion de pays où règne encore l'esclavage et où le travail est encore complètement soumis à la volonté des exploiteurs et du pouvoir d'Etat, sur les institutions démocratiques de l'Union et sur la situation sociale et politique de la classe ouvrière .

 

Le "Federationist" indique qu'à Hawaii, sur les  moins de 100 000 habitants que comptent les Iles, près de la moitié est condamnée effectivement à un véritable travail d'esclave par des contrats longs en moyenne de sept ans, que parmi eux il y a 80% de Chinois et de Japonais et environ 20% de Portugais et d'habitants des îles du Pacifique, que les travailleurs sont menés par des contre-maîtres armés de baguettes, et qu'ils sont mis en prison s'ils abandonnent leur travail. Des conditions semblables règnent aux Philippines et le "Federationist" prédit avec raison qu'avec l'annexion des Iles par les Américains, on ne changera pas de situation et de système mais simplement de domination.

 

Il est vraisemblable que de telles conditions ne resteront pas sans influence sur la situation des travailleurs de l'Union. "Combien de temps s'écoulera", écrit le journal syndical "avant que, dans de telles conditions, les classes supérieures de ce pays (les Etats-Unis),  préfèrent utiliser la force plutôt que de respecter la volonté de la majorité, pour réaliser leurs plans? Ne leur sera-t-il pas aisé d'appliquer de la même façon aux travailleurs de notre sang et de notre pays, cette indifférence méprisante qu'ils témoignent face aux droits et aux aspirations naturelles des salariés à la peau sombre des Philippines.?" L'annexion "conduira au mépris du travailleur manuel et encouragera cette vision indigne qui pense que le fort peut légalement exploiter le faible et que celui-ci peut être utilisé pour produire à moindre frais le luxe destiné aux classes dirigeantes".

 

Le journal syndical s'oppose aussi avec la plus grande détermination à l'instauration de l'armée de métier et à la politique mondiale de l'Union et exprime en conclusion une phrase que nos hommes politiques qui rêvent de domination du marché mondial, feraient bien de méditer: "Une nation qui veut dominer le marché mondial doit garantir aux travailleurs la liberté et doit ouvrir la voie vers le plus haut niveau de vie et de développement actuel possible. Seul le peuple au sein duquel cela aura été réalisé, exercera une influence décisive sur le marché mondial et dirigera l'histoire du monde".

 

Les idées développées ici montrent que les syndicalistes des Etats-Unis sont pour ce qui concerne ces questions du militarisme et de la politique coloniale sur les positions du mouvement ouvrier moderne et qu'ils sont  tout à fait au clair sur les questions de la politique générale de leur pays.

 

Certes, leur protestation contre les annexions de l'Union restera une voix dans le désert, car en Amérique comme en Europe, la politique étrangère est complètement dominée par les partis bourgeois. Mais étant donné cette conscience claire qu'ont les travailleurs des dangers qu'ils courent, cette nouvelle ère de l'évolution des Etats-Unis ne manquera pas de provoquer une union plus forte de la classe ouvrière et de donner une nouvelle impulsion au mouvement ouvrier.

 

Traduction c.a.r.l. 1988/1989

Publié sur le blog comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

Texte allemand, Gesammelte Werke

le 6 juillet 2014

 

Merci pour toute proposition d'amélioration de la traduction.

 

 


Rosa Luxemburg a consacré une analyse d'un grand intérêt à la guerre hispano-américaine et à ses conséquences: Le prix d'une victoire! Texte inédit en français de Rosa Luxemburg sur la guerre hispano-américaine, 

 

MEYER-VAN LOO, F. - Guerre Hispano-Américaine.. Carte de Cuba, des petites Antilles et des Iles Philippines.

MEYER-VAN LOO, F. - Guerre Hispano-Américaine.. Carte de Cuba, des petites Antilles et des Iles Philippines.

Title : Guerre Hispano-Américaine.. Carte de Cuba, des petites Antilles et des Iles Philippines..
Map maker : MEYER-VAN LOO, F..
Date : Gent , 1898.
Size : 19.7 x 28.0 inches. / 50.0 x 71.0 cm.
Colouring : Coloured.

Description :Interesting map of North and Central America. In upper right corner: 2e édition Revue et Completée. Text on verso relating to the history of Cuba Histoire de Cuba depuis sa découverte par Christohe Colomb le 28 Octobre 1492 jusqu' à nos jours.
The map has two inset maps with Cuba and the Philippines and a legend with a key of the 39 States of America.
On April 11, 1898, McKinley went before Congress to ask for a declaration of war against Spain. By the end of the month, what came to be called a splendid little war had begun. The war was short.
After only 113 days of fighting on land and sea, the United States claimed victory. Its troops occupied the Spanish colonies of Cuba, Puerto Rico, and part of the Philippines.
In December 1898, Spain signed the Treaty of Paris, by which Cuba was granted its independence and Gaum, Puerto Rico, and the Philippines were ceded to the United States.

Condition : Printed in colours. Folded, minor tears and splits along the folds. With French text on the reverse.

 

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11 juillet 2014 5 11 /07 /juillet /2014 19:21

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http://pierreburaglio.blogspot.fr/

 


A lire sur le site du journal Sud-ouest.

 

Jusqu'au 31 août, le Centre d'art contemporain de Lescombes accueille Pierre et Claude Buraglio ainsi que le collectif BGB, sous le double thème de la commémoration des deux dernières Guerres mondiales. L'exposition présente un travail sur les différentes formes d'oppression. Un art militant, véritable plaidoyer pour la paix et la liberté.

 

D'entrée le ton est donné, avec la série « Kamerad » de Pierre retraçant ce qui était commun dans les tranchées de 14-18 entre les soldats allemands et français. Les objets qu'ils auraient pu ou ont réalisé, chacun dans leur camp, se ressemblent étrangement. On pense alors aux séquences du film « À l'ouest rien de nouveau », lorsque les soldats s'interrogent sur le pourquoi de la guerre et à qui elle profite.

Le reflet de l'histoire


Elle se poursuit sur l'expression d'autres combats, comme celui de Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg, deux figures emblématiques du mouvement spartakiste et acteur de la révolution « prolétarienne » allemande de 1918 à 1919. Pour Pierre Buraglio, cet événement est délibérément associé à « la der des ders » avec un travail sur les gueules cassées, victimes entre autres du Chemin des Dames.


L'exposition est complétée par une série intitulée « Juin poignardé ». Il s'agit d'illustrations du poème « Les lilas et les roses » d'Aragon sur la défaite de juin 1940 et de l'« Olympia » de Manet. Une œuvre qui converse avec « Mireille à la plage », sous-entendant ainsi un autre combat : celui du féminisme ou la fin d'une époque et le début d'une autre.


À l'étage, le visiteur peut contempler le travail du collectif BGB, composé de Jo Brouillon, Franck Garcia et Claude Buraglio. Le combat est cette fois plus contemporain. Les artistes s'attaquent principalement aux rapports humains et à la société de consommation, plus particulièrement avec la série « CB sous influence », et à la marchandisation du corps humain et de sa souffrance avec « Extrait » et « Ste Rita organise ses icônes ».

Pour les compositions collectives signées BGB, les trois artistes ont utilisé la méthode du cadavre exquis. Il s'agit d'un jeu qui consiste, selon un thème éventuellement défini au départ, à poursuivre une narration figurative en partant du point visible de ce qu'a fait l'artiste précédent et dont l'essentiel est caché. Il résulte de cette expérience des expressions très surréalistes mais toutefois significatives.


Michel David

 



Claude Buraglio - Casque allemand et Casque français
2013, papier mâché, 15 x 30 x 23 cm

Très longtemps, très tôt aussi, Pierre Buraglio a été un peintre sans pinceau, sans toile. De 1968 à 1974, il a choisi d’être un peintre sans peinture, abandonnant le « métier » pour rejoindre ses camarades ouvriers à l’usine. Longtemps, il a préféré les outils de l’artisan à ceux de l’artiste, interrogeant, à l’instar de certains de ses contemporains de Supports-Surfaces ou de BMPT, l’acte même de peindre, ses matériaux et sa réalité. Pourtant, à la relire, quelle vie de peintre, résolument, fondamentalement, fidèlement. http://www.macval.fr/francais/collection/oeuvres-de-la-collection/article/pierre-buraglio

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5 juillet 2014 6 05 /07 /juillet /2014 19:10

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Nous avons modifié le titre suite à ce commentaire reçu:

Bonjour,
Je suis surprise de voir que vous associez directement la lettre de Rosa Luxembourg à la chanson d'Angelique Ionatos (musique d'E. Karaïndrou). En réalité, les paroles sont de Christophoros Christophis qui, oui, s'est inspiré de Rosa Luxembourg...
J'en parle ici dans mon blog:http://dornac.over-blog.com/article-eleni-karaindrou-l-aria-de-rosa-120808910.html
Votre site est intéressant. Bonne continuation.

 

Angélique Ionatos "L'aria de Rosa"


" Au milieu des ténèbres, je souris à la vie, comme si je connaissais la formule magique qui change le mal et la tristesse en clarté et en bonheur. Alors, je cherche une raison à cette joie, je n'en trouve pas et ne peux m'empêcher de sourire de moi-même. Je crois que la vie elle-même est l'unique secret.(...) La vie chante aussi dans le sable qui crisse sous les pas lents et sourds de la sentinelle, quand on sait l'entendre." Rosa Luxembourg. Lettres de prison

 

 
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4 juillet 2014 5 04 /07 /juillet /2014 17:13

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Jean-Michel Kay - mardi 1er juillet 2014- sur le site divergences
Rosa Luxemburg face à la guerre

1915-c-rls 

Rosa Luxemburg en 1915

 

En 1907, à Stuttgart, lors de son congrès, l’Internationale socialiste avait adopté une résolution sur le militarisme qui se concluait ainsi :


« Le Congrès déclare :


Si une guerre menace d’éclater, c’est un devoir de la classe ouvrière dans les pays concernés, c’est un devoir pour ses représentants dans les Parlements, avec l’aide du bureau international, force d’action et de coordination, de faire tous leurs efforts pour l’empêcher par les moyens qui leur paraissent les mieux appropriés, et qui varient naturellement selon l’acuité de la lutte des classes et la situation politique générale.


Au cas où la guerre éclaterait néanmoins, ils ont le devoir de s’entremettre pour la faire cesser promptement et d’utiliser de toute leur force la crise économique et politique créée par la guerre pour agiter les couches populaires les plus profondes et précipiter la fin de la domination capitaliste. »


C’est Rosa Luxemburg, intervenant en tant que représentante du parti polonais, qui avait fait adopter ces deux paragraphes qu’elle avait rédigés avec Lénine et Martov, les deux chefs du parti russe momentanément réunifié. Fort de cette résolution, Jaurès avait pu écrire à la une de L’Humanité : « On peut dire désormais qu’il y a une Internationale vivante, réelle, agissante, qui se constitue la gardienne de la paix [1]. » Mais si les socialistes de l’empire russe avaient jugé nécessaire de compléter ainsi la résolution, qui décrivait toutes les actions que les partis socialistes menaient contre la course aux armements, le bellicisme et les provocations guerrières de leurs gouvernements, c’est que l’accord n’avait pu se faire sur la conduite à tenir au cas où la guerre éclaterait : dans un camp se tenait la délégation allemande, conduite par Bebel et où les responsables syndicaux étaient nombreux, qui refusait de prendre des engagements qu’elle ne se sentait pas capable de tenir ; à l’autre extrême se tenait le socialiste français Gustave Hervé, qui proclamait que les membres de l’Internationale devaient s’engager en cas de guerre à déclencher une grève générale mondiale.


La formulation adoptée était beaucoup moins explicite — ce qui permit aux socialistes allemands de ne pas s’y opposer, même si Hervé n’obtint pas d’eux un ralliement sans arrière-pensée — mais elle introduisit aussi une perspective nouvelle, reflétant la pensée de Lénine, celle que la mobilisation contre la guerre devrait viser à renverser le régime en place. Ainsi, le mot d’ordre Plutôt l’insurrection que la guerre ! lancé l’année précédente lors du congrès de la SFIO prenait un sens plus concret et Gustave Hervé put voter la résolution « des deux mains ». Lors de ses congrès suivants, en 1910 et même en 1912 — les socialistes se réunissent à Bâle en pleine Guerre balkanique —, l’Internationale adopta de nouvelles résolutions sur la défense de la paix mais ne progressa pas dans la définition des moyens à utiliser pour mettre fin à une guerre qui aurait éclaté.


Si, en 1907, une guerre entre puissances européennes semblait toujours possible, elle ne paraissait pas imminente ; par contre, des campagnes antimilitaristes étaient menées, sinon par les partis socialistes, du moins par certains militants particulièrement engagés, aussi bien en France qu’en Allemagne. Ainsi Gustave Hervé venait pour cette raison de passer près d’un an en prison, et il y retournera de 1910 à 1912 ; pour ses campagnes et écrits antimilitaristes, Karl Liebknecht fut condamné en 1907 à 18 mois de prison. Pour Rosa Luxemburg, la lutte contre le militarisme n’était qu’un combat parmi d’autres à mener contre la répression croissante que le régime impérialiste était obligé de faire peser sur une classe ouvrière de plus en plus nombreuse et organisée. Depuis la révolution russe de 1905, elle constatait que la direction du parti allemand était de jour en jour plus préoccupée de succès électoraux et de consolidation des organisations socialistes que d’éclairer toujours davantage les causes et les enjeux des affrontements auxquels les masses ouvrières étaient inexorablement conduites. Pour elle, la résolution de Stuttgart, était un moyen de rappeler ses devoirs à cette direction.


Quelques années plus tard, les affrontements avec celle-ci devinrent plus concrets et plus visibles : en 1910, alors qu’elle accompagnait avec son énergie coutumière une vaste mobilisation pour la réforme électorale en Prusse (dont le système était très défavorable à la masse de la population), elle se rendit compte que la direction du Parti semblait freiner le mouvement et se lança donc dans une vigoureuse polémique contre ses porte-parole. Dans l’été 1911, lors de l’affaire d’Agadir, elle révéla au public que la direction du Parti préférait, pour des raisons électorales, ne pas appeler à la mobilisation contre l’impérialisme allemand.


Mais dans les années qui suivirent, les périodes d’agitation se multiplièrent, et les prises de parole de Rosa Luxemburg aussi. En septembre 1913, lors d’un meeting près de Francfort, l’auditoire à qui elle demandait s’il fallait se laisser entraîner dans une guerre répondit : « Jamais ! ». Une réponse qu’elle reformula ainsi : « Si on attend de nous que nous brandissions les armes contre nos frères de France et d’ailleurs, alors nous nous écrions : “nous ne le ferons pas”. » Elle fut alors inculpée d’appel à l’insubordination et son procès, le 20 février 1914, eut un très grand retentissement. Dans ces cas-là, quelles que furent les dissensions internes, le Parti faisait bloc autour de l’accusée. La période qui suivit, jusqu’en juillet, fut celle d’une intense agitation antimilitariste que Rosa Luxemburg accompagna par une tournée de meetings faisant suite à sa condamnation. L’un des discours qu’elle tint alors, dans lequel elle dénonçait les mauvais traitements infligés aux soldats, lui valut une nouvelle inculpation : le Parti fit alors un appel aux victimes pour qu’elles viennent témoigner lors de ce nouveau procès et le nombre de réponses qu’il reçut fut tel que les autorités décidèrent de renvoyer le procès, qui n’eut jamais lieu.


L’effervescence de cette période peut expliquer en partie combien fut douloureuse pour Rosa Luxemburg la prise de conscience lors de la réunion du Bureau de l’Internationale à la fin de juillet d’une part que la guerre semblait inévitable et d’autre part que l’Internationale ne serait pas capable de s’y opposer. Mais une fois passés quelques jours de profond découragement, elle se mit dès début août à rassembler les militants qui n’étaient pas prêts à accepter le ralliement du Parti à l’Union sacrée et le renoncement à l’internationalisme. Ses premières actions furent de chercher à faire savoir aux socialistes étrangers qu’il existait en Allemagne des socialistes en désaccord avec la direction du Parti ; en décembre 1914, Karl Liebknecht, qui l’avait rejointe, vota seul contre de nouveaux crédits pour la guerre. Petit à petit se mit en place ce qui allait devenir le groupe Spartacus et, en prison à partir de février 1915, Rosa Luxemburg élabora ses analyses sur les origines de la guerre et l’effondrement de la social-démocratie et en tira les leçons, les rassemblant de façon magistrale dans La crise de la social-démocratie (bien plus connue sous le titre de Brochure de Junius, pseudonyme qu’elle utilisa alors) où elle affirmait la primauté de l’Internationale et de sa nécessaire reconstruction.


C’est ce parcours de Rosa Luxemburg — de la lutte contre la guerre qui vient à celle contre la guerre qui est là et à la voie qu’elle trace pour le redressement — qu’illustrent ses textes rassemblés dans le quatrième volume de ses œuvres complètes publié par le collectif Smolny et Agone [2].


Certains de ceux-ci n’ont jamais été publiés en français, d’autres n’existent jusqu’à maintenant que dans les archives. C’est tout l’intérêt de cette entreprise éditoriale insérée dans un projet international : rendre disponibles en français, regroupés par thèmes, les textes qui jalonnent l’action et la réflexion de Rosa Luxemburg — dirigeante de parti, journaliste, propagandiste, théoricienne, enseignante [3; une bonne partie de ses articles n’a en effet jamais été traduite en français. Plus gênant encore, pour ceux qui voudraient mieux connaître sa pensée, certains de ses textes les plus importants (on pense à L’Accumulation du capital ou à La question nationale et l’autonomie) qui ont été traduits en français sont épuisés depuis longtemps. Ils redeviendront donc bientôt disponibles, comme c’est déjà le cas pour son Introduction à l’économie politique [4].


Enfin, pour replacer actions et réflexions dans leur enchaînement et leur dynamique, une biographie systématique faisait défaut. La première en date, celle en deux volumes de John Peter Nettl, publiée en français en 1972 par François Maspero, est épuisée depuis longtemps. Mais avant sa mort accidentelle en 1968, l’auteur en avait préparé une édition en un volume qui parut en 1969 en anglais et en allemand et dont l’édition en français est parue chez Spartacus à la fin de 2012. On y voit en particulier que parallèlement à son activité mieux connue en France de militante de la social-démocratie allemande, Rosa Luxemburg a été pendant vingt ans la principale théoricienne du parti social-démocrate de Pologne et de Lituanie dont elle a été la fondatrice ; le rôle qu’elle y a joué et ses écrits en polonais jettent un éclairage nécessaire sur ses conceptions politiques et sa personnalité.


[1] 25 août 1907.

[2] Brochure de Junius et autres textes sur la guerre et l’Internationale, 256 pages, septembre 2014.

[3] À partir de 1907, à l’école mise en place par le SPD. Voir À l’école du socialisme, tome II des Œuvres complètes, Collectif Smolny et Agone, 2012.

[4] Collectif Smolny et Agone, tome I des Œuvres complètes, 2008.

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22 juin 2014 7 22 /06 /juin /2014 12:30

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http://www.zundel.at/bilder/Streik_1903_von_Georg_Friedrich_Zundel.jpg

F. Züindel. Grève - 1903

 

A lire sur http://quinzainerosaluxemburg.blogspot.fr

 

A l'heure de la grève des intermittents et après cette quinzaine Rosa Luxemburg qui a posé par les faits le problème de l'art, de l'argent, de la survie des artistes et de  leur volonté de s'inscrire dans un art engagé pour l'art et au sein de la société envers et contre tout, cette citation de Clara Zetkin qui servit de base à la table ronde sur l'art durant la quinzainze:

Le pseudo-art devient un commerce
Clara Zetkin in Le problème des intellectuels
7 juillet 1924
Le pseudo-art devient un commerce (Extrait)
 
L’art est soumis à la même évolution. Il n’est plus l’expression sur le plan artistique de grands sentiments ou de grandes expériences collectives, c’est-à-dire un instrument efficace d’éducation populaire. Il est devenu un commerce, une entreprise capitaliste qui doit rapporter de gros intérêts; le peintre, le dessinateur doivent produire en fonction de la demande. Le poète, l’écrivain doivent tenir compte du marché et de la clientèle de leur éditeur. Et il en est ainsi dans tous les domaines de la création artistique.

On assiste à la naissance d’un pseudo-art devenu une entreprise capitaliste rentable, et la société bourgeoise fait naître les producteurs de ce pseudo-art. Elle attire des incapables en leur faisant miroiter la position privilégiée d’un petit nombre d’individus, et la recherche du profit fait surgir des instituts de formation artistique dont les portes sont ouvertes à tous, qu’ils aient ou non du talent. Par la faim, elle contraint des créateurs doués à se mettre au service du mauvais goût et de l’inculture. Mais elle engendre simultanément les acheteurs de ce pseudo-art en la personne de parvenus blasés et jouisseurs, tandis qu’elle développe par ailleurs l’absence de culture des larges masses. Elle produit l’exploiteur capitaliste qui vole aussi bien les artistes – ou ceux qui se font passer pour tels – que les consommateurs. Le pseudo-art le plus rentable dans tous les pays capitalistes est la pornographie, qu’elle soit dessinée, peinte, sculptée, parlée ou chantée. Le capitaliste exploite l’artiste et le prolétaire avec la même absence de scrupules et il vend de fausses valeurs artistiques avec le même sourire cynique que le fabricant de produits alimentaires qui "refile" à ses clients un ersatz sans valeur nutritive, voire nocif.

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18 juin 2014 3 18 /06 /juin /2014 20:18

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Non la quinzaine n'était pas un hasard!

Et oui, l'esprit quinzaine continue à vivre!

Organisons ensemble des assemblées populaires
pour vivre ce qui reste de plus solidaire, de plus humain de ces temps de luttes ...


A lire sur le site smolny, 18 juin 2014 par collectif

Assemblées Populaires dès ce soir au Chok théâtre
À partir du 18/06/2014 - Chaque soir de 18h à 20h - Saint-Étienne

 

Note Smolny :


Décidément, l’esprit de Rosa Luxemburg continue de souffler sur Saint-Étienne ! Après la Quinzaine qui a duré tout le mois de mai, voici qu’à la faveur des solidarités qui s’expriment autour des luttes des cheminots et des intermittents, des assemblées ouvertes se mettent en place à partir de ce soir. Les rapprochements qui s’opèrent à Bordeaux, Lyon, Toulouse et ailleurs entre cheminots, intermittents, ouvriers, précaires, chômeurs, donnent à voir une reprise de la conscience de classe et du sentiment d’unité du prolétariat... qui faisait bien défaut depuis 2010. « De temps à autre, les travailleurs sont victorieux, mais leur triomphe est éphémère. Le vrai résultat de leurs luttes, ce n’est pas le succès immédiat, mais l’union de plus en plus étendue des travailleurs. » (Marx & Engels, Le Manifeste, 1848).

 

E.S.


Appel à des assemblées populaires dès ce soir au Chok Théâtre :


Parce qu’on on ne comprend plus l’obstination de l’État et du Medef à ne pas retravailler les propositions du Comité de suivi.


Parce qu’on se heurte à la colère insinuée par le jeu gouvernemental qui a prévu de nous opposer : public contre professionnels du spectacle, permanents contre intermittents, précaires contre précaires, usagers contre cheminots... alors que nous avons tous des aspirations semblables et ne pas souffrir plus longtemps d’une culture à l’agonie, de la difficulté de vivre, d’être...

 

Nous invitons toutes celles et tous ceux qui ont participé, hurlé leur colère, offert leur soutien, interrogé leurs a priori à une des actions de ces derniers mois, à se rejoindre.

 

Retrouvons-nous donc, toutes et tous, au Chok Théâtre sis 24, rue Bernard Palissy, chaque soir et dès aujourd’hui, mercredi 18 juin de 18 h à 20 h, et organisons ensemble des assemblées populaires pour vivre ce qui reste de plus solidaire, de plus humain de ces temps de luttes et en dehors des clivages qu’on nous impose.

 

En sortant de tous les "chez soi", en étendant la solidarité, en passant par-dessus les divisions, en s’obligeant à des convergences intelligentes, on peut rêver d’une lutte d’ensemble, ensemble.

 

Intermittents en lutte : Carte des mobilis

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16 juin 2014 1 16 /06 /juin /2014 21:21

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http://www.zundel.at/bilder/Streik_1903_von_Georg_Friedrich_Zundel.jpg

Grève - 1903

 

A lire sur http://quinzainerosaluxemburg.blogspot.fr

 

A l'heure de la grève des intermittents et après cette quinzaine Rosa Luxemburg qui a posé par les faits le problème de l'art, de l'argent, de la survie des artistes et de  leur volonté de s'inscrire dans un art engagé pour l'art et au sein de la société envers et contre tout, cette citation de Clara Zetkin qui servit de base à la table ronde sur l'art durant la quinzainze:

Le pseudo-art devient un commerce
Clara Zetkin in Le problème des intellectuels
7 juillet 1924
Le pseudo-art devient un commerce (Extrait)
 
L’art est soumis à la même évolution. Il n’est plus l’expression sur le plan artistique de grands sentiments ou de grandes expériences collectives, c’est-à-dire un instrument efficace d’éducation populaire. Il est devenu un commerce, une entreprise capitaliste qui doit rapporter de gros intérêts; le peintre, le dessinateur doivent produire en fonction de la demande. Le poète, l’écrivain doivent tenir compte du marché et de la clientèle de leur éditeur. Et il en est ainsi dans tous les domaines de la création artistique.

On assiste à la naissance d’un pseudo-art devenu une entreprise capitaliste rentable, et la société bourgeoise fait naître les producteurs de ce pseudo-art. Elle attire des incapables en leur faisant miroiter la position privilégiée d’un petit nombre d’individus, et la recherche du profit fait surgir des instituts de formation artistique dont les portes sont ouvertes à tous, qu’ils aient ou non du talent. Par la faim, elle contraint des créateurs doués à se mettre au service du mauvais goût et de l’inculture. Mais elle engendre simultanément les acheteurs de ce pseudo-art en la personne de parvenus blasés et jouisseurs, tandis qu’elle développe par ailleurs l’absence de culture des larges masses. Elle produit l’exploiteur capitaliste qui vole aussi bien les artistes – ou ceux qui se font passer pour tels – que les consommateurs. Le pseudo-art le plus rentable dans tous les pays capitalistes est la pornographie, qu’elle soit dessinée, peinte, sculptée, parlée ou chantée. Le capitaliste exploite l’artiste et le prolétaire avec la même absence de scrupules et il vend de fausses valeurs artistiques avec le même sourire cynique que le fabricant de produits alimentaires qui "refile" à ses clients un ersatz sans valeur nutritive, voire nocif.

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16 juin 2014 1 16 /06 /juin /2014 21:20

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

Clara-Zetkin-und-Rosa-Luxemburg-Denkmal, Birkenwerder

Image:Zetkin Luxemburg Birkenwerder.JPG

  • Denkmal für Clara Zetkin und Rosa Luxemburg
  • Skulpturen
  • Künstler: unbekannt
  • Entstehungszeit: unbekannt
  • Standort: Birkenwerder, Summter Straße, im Garten der Clara-Zetkin-Gedenkstätte
  • Details: Die Statue zeigt die kommunistischen Politikerinnen Clara Zetkin (1857 - 1933) und Rosa Luxemburg (1871 - 1919) im Gespräch. Das Haus in der Summter Straße 4 war von 1929 - 1932 Zetkins letzter Wohnsitz vor ihrer Emigration in die UdSSR. Anlässlich ihres 100. Geburtstages wurde hier 1957 eine Gedenkstätte eröffnet, die 1982 überarbeitet wurde.
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10 juin 2014 2 10 /06 /juin /2014 22:11
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9 juin 2014 1 09 /06 /juin /2014 19:23
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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009