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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
22 juillet 2023 6 22 /07 /juillet /2023 11:42
1910

1910

Le système électoral à trois classes, particulièrement inique a été combattu par la social-démocratie à de multiples reprises, en particulier en 1910. En 1913, le combat s'enflamme à nouveau et Karl Liebknecht écrit ce texte en juillet 1913, pour lui la grève de masse est devenue la seule réponse au refus obstiné du pouvoir impérial de changement de ce système.  L'occasion pour nous de mieux saisir son analyse de ce moyen de lutte ultime.

Citations :

"Les exhortations répétées appelant à modifier radicalement le système électoral en vigueur à la Chambre des députés n'ont pas été prises en compte. Le gouvernement, soutenu par la majorité réactionnaire, persiste dans son opposition. Les travailleurs, en tant que seuls combattants pour une égalité totale, ont le devoir de lutter par tous les moyens contre les pouvoirs en place. L'un de ces moyens est la grève politique de masse.". (résolution proposée par Karl Liebknecht)

"La grève est, avec le boycott, la forme d'utilisation du pouvoir prolétarien qui correspond le mieux à la nature sociale du prolétariat, à sa fonction dans la société capitaliste; qui en découle directement. Les grèves syndicales, par leur ampleur, deviennent de plus en plus des grèves de masse. Elles se rapprochent aussi bien souvent par leur objectif, des grèves politiques, et deviennent de manière de plus en plus marquée des luttes pour le pouvoir de la classe ouvrière dans la société. L'ensemble du pouvoir d'Etat, jusqu'au militarisme, se dresse de plus en plus résolument contre elle : les grèves syndicales deviennent elles aussi de plus en plus des luttes avec le pouvoir d'Etat, voire pour le pouvoir d'Etat"

"La grève de masse pour des objectifs politiques a passé depuis longtemps l'épreuve du feu, il n'est donc pas étonnant qu'en Allemagne aussi, non seulement sa possibilité, mais aussi sa nécessité soient reconnues presque partout. Cela vaut justement pour la question du droit de vote en Prusse. Ici, aucun autre chemin ne mène au but; la situation est sinon en effet sans issue."

"L'information sur les moyens tactiques à la disposition de la lutte des classes est aussi une partie de l'information révolutionnaire du prolétariat ; et la propagande en faveur de tels moyens a aussi pour effet de renforcer la force de combat du prolétariat."

"Vouloir forcer la situation ou la masquer par des moyens diplomatiques serait une folie ; mais une tactique qui n'oserait pas se lancer dans la bataille sans un gilet pare-balles et qui fuirait l'air vif d'un risque révolutionnaire à l'heure décisive par crainte de mettre en danger les organisations et les institutions actuelles du prolétariat, qui ne sont pourtant que des moyens pour atteindre une fin, ne serait pas moins condamnable. Il faut peser le pour et le contre, peser de manière réfléchie, mais aussi oser."

"... de même est-il vrai que les organisations de lutte qui ne craignent pas le danger d'une défaite lorsque le moment est venu, sont meilleures que celles qui cherchent à éviter une défaite en évitant les combats décisifs. Il y a des situations qui exigent que l'on soit prêt même à la défaite."

"Qu'est-ce qu'une grève politique de masse ? D'un point de vue théorique, elle peut prendre de nombreuses formes : de la simple grève de manifestation, qui ne signifie pas encore l'instauration d'un rapport de force, à la grève visant à réduire l'adversaire ; de la grève limitée localement ou professionnellement à la grève générale. Comme cela a été dit à Iéna, toutes ces formes pourraient être développées dans le cadre d'une tactique variable, jusqu'au niveau le plus exacerbé  tout en gardant bien entendu les anciens moyens de lutte."

"En tout cas, aucune grève de masse d'aucune sorte ne doit être entreprise sans la volonté de passer immédiatement à une grève impitoyable visant à réduire l'adversaire, si la situation se présentait au cours de la lutte. La volonté d'entamer une grande grève générale doit sous-tendre toute forme de grève de masse."

"Sans hésitation, mais avec audace s'il le faut. Le droit de vote libre et égal pour la Prusse est une messe, il vaut bien une grève de masse."

 

Was nun in Preußen?

[Vorwärts Nr. 168, 188 und 189 vom 5., 25. und 26. Juli 1913. Nach Karl Liebknecht, Gesammelte Reden und Schriften, Band 6, S. 349-364]

I. Résolution

Les dernières élections au Landtag ont prouvé une fois de plus qu'il est impossible, avec le misérable système électoral des trois classes, d'obtenir une représentation qui tienne compte de la volonté du peuple.

Les exhortations répétées appelant à modifier radicalement le système électoral en vigueur à la Chambre des députés n'ont pas été prises en compte. Le gouvernement, soutenu par la majorité réactionnaire, persiste dans son opposition.

Les travailleurs, en tant que seuls combattants pour une égalité totale, ont le devoir de lutter par tous les moyens contre les pouvoirs en place. L'un de ces moyens est la grève politique de masse.

Les personnes réunies sont conscientes que le succès de cette grande lutte ne sera garanti que si l'ensemble des travailleurs est regroupé dans des organisations solides. Les participants s'engagent donc à veiller énergiquement au développement de ces organisations.

En même temps, elles invitent les cercles dirigeants des organisations ouvrières à utiliser tous les moyens de lutte propres à assurer au peuple une représentation équitable à la Chambre des députés.

 

Traduction Dominique Villaeys-Poirré, 17 juillet 2023. Merci pour toute amélioratton de la traduction.

II. Articles 25. et 26. juillet 1913

… ll va de soi qu'aucun des moyens de lutte actuels ne doit être jeté par-dessus bord. Mais ils ne suffisent plus ; nous avons besoin de nouveaux moyens pour mener un nouveau combat.

La grève est, avec le boycott, la forme d'utilisation du pouvoir prolétarien qui correspond le mieux à la nature sociale du prolétariat, à sa fonction dans la société capitaliste; qui en découle directement. Les grèves syndicales, par leur ampleur, deviennent de plus en plus des grèves de masse. Elles se rapprochent aussi bien souvent par leur objectif, des grèves politiques, et deviennent de manière de plus en plus marquée des luttes pour le pouvoir de la classe ouvrière dans la société. L'ensemble du pouvoir d'Etat, jusqu'au militarisme, se dresse de plus en plus résolument contre elle : les grèves syndicales deviennent elles aussi de plus en plus des luttes avec le pouvoir d'Etat, voire pour le pouvoir d'Etat.

La grève de masse pour des objectifs politiques a passé depuis longtemps l'épreuve du feu, il n'est donc pas étonnant qu'en Allemagne aussi, non seulement sa possibilité, mais aussi sa nécessité soient reconnues presque partout. Cela vaut justement pour la question du droit de vote en Prusse. Ici, aucun autre chemin ne mène au but; la situation est sinon en effet sans issue.

Curieusement, il a été demandé à multiples reprises d'élargir la résolution de Iéna de 1905, afin d'envisager la grève de masse également pour la conquête de droits politiques. On oublie en cela que la résolution de Iéna prévoit déjà expressément l'utilisation de la grève de masse pour conquérir des droits. Elle n'a pas besoin d'être complétée. La voie est déjà libre depuis 1905. Et depuis que des camarades "révisionnistes", qui ont la réputation parmi les hommes d'État de montrer une la froide prudence, ont ouvertement, voire ostensiblement, basculé dans le camp des amis de la grève de masse, les adversaires de la grève de masse se sont vus privés d’une bonne partie de leurs objections. Les exaltés ont toujours été balayés d'un revers de main. Désormais, certains hésitants seront peut-être plus facilement gagnés. Nous saluons donc doublement ce renfort.

Pour la lutte en Prusse pour le droit de vote, la question n'est plus depuis longtemps de savoir si une grève de masse est nécessaire, mais seulement de savoir quand et dans quelles conditions.

Parmi les partisans de la grève de masse, aucun ne devrait non plus se laisser aller à l'illusion insensée de pouvoir transformer une éventuelle situation désagréable par un moyen tactique. Ils ne cherchent que le moyen le plus efficace d'exploiter la situation donnée, moyen qui n'est pas seulement autorisé par cette situation, mais qui s'avère nécessaire. Il y a aussi des occasions manquées dans l'évolution politique, malgré son caractère intrinsèquement inéluctable. L'information sur les moyens tactiques à la disposition de la lutte des classes est aussi une partie de l'information révolutionnaire du prolétariat ; et la propagande en faveur de tels moyens a aussi pour effet de renforcer la force de combat du prolétariat.

Vouloir forcer la situation ou prétendre pouvoir la résoudre par des moyens diplomatiques serait une folie ; mais une tactique qui n'oserait pas se lancer dans la bataille sans un gilet pare-balles et qui fuirait l'air vif d'un risque révolutionnaire à l'heure décisive par crainte de mettre en danger les organisations et les institutions actuelles du prolétariat, qui ne sont pourtant que des moyens pour atteindre une fin, ne serait pas moins condamnable. Il faut peser le pour et le contre, peser de manière réfléchie, mais aussi oser.

Je le répète : un objectif élevé mérite un engagement élevé. Dans la lutte en Prusse, nous marchons dans la ligne d'une évolution certaine. Les défaites sont seulement des défaites temporaires, des défaites qui ne sont pas totalement sans résultat. Aucune contre-révolution dans l'histoire mondiale n'a jamais pu annuler complètement l'effet d'un mouvement révolutionnaire qui se trouvait dans le sens de l'évolution. Même pas après la révolution en Prusse en 1848, même pas après la révolution en Russie en 1905. Et de même qu'il est vrai  que la social-démocratie allemande et les syndicats allemands ont grandi dans l'atmosphère brûlante d'un rude combat et ont prouvé leur invincibilité en se relevant toujours de leurs défaites avec des capacités de défense accrues pour continuer à lutter, de même il est-il vrai que les organisations de lutte qui, lorsque le moment est venu, ne craignent pas le danger d'une défaite, sont meilleures que celles qui cherchent à éviter une défaite en évitant les combats décisifs. Il y a des situations qui exigent que l'on soit prêt même à la défaite.

Qu'est-ce qu'une grève politique de masse ? D'un point de vue théorique, elle peut prendre de nombreuses formes : de la simple grève de manifestation, qui ne signifie pas encore l'instauration d'un rapport de force, à la grève visant à réduire l'adversaire ; de la grève limitée localement ou professionnellement à la grève générale. Comme cela a été dit à Iéna, toutes ces formes pourraient être développées dans le cadre d'une tactique variable, jusqu'au niveau le plus exacerbé  tout en gardant bien entendu les anciens moyens de lutte.

Certes, une grève de manifestation fera déjà des victimes. Mais même celles-ci sont justifiées par la valeur que revêt la manifestation d'une énergie révolutionnaire qui dépasse largement celle qui se manifeste lors des manifestations de rue. Il faut admettre que dans la lutte pour le droit de vote en Prusse, le faible nombre des déclarations de grève ne devrait pas beaucoup impressionner et peut même temporairement provoquer un affaiblissement de la volonté de s'engager dans la grève de masse. En tout cas, aucune grève de masse d'aucune sorte ne doit être entreprise sans la volonté de passer immédiatement à une grève impitoyable visant à réduire l'adversaire, si la situation se présentait au cours de la lutte. La volonté d'entamer une grande grève générale doit sous-tendre toute forme de grève de masse.

Notre situation est particulièrement difficile parce que la grève de masse ne touchera directement presque que l'industrie, le commerce et les transports, c'est-à-dire les cercles des classes dirigeantes qui ne sont pas les opposants les plus farouches à toute réforme électorale, en tout cas pas les partisans sans réserve du droit de vote existant. Mais tous sont  des ennemis du droit de vote démocratique ; et enfoncer un coin finit par en entraîner un autre ; apprenons d'abord aux représentants du capital, y compris de l'industrie lourde, et à la bureaucratie étatique à prier notre Dieu, et les junkers suivront eux aussi, bon gré mal gré, la recette du vieux saint Rémi de Reims.

Le prolétariat peut-il compter sur des alliés lors d'une grève de masse ? La dernière grève belge a été soutenue par la sympathie de la bourgeoisie libérale ; il ne faudra pas compter sur cela en Allemagne. Notre bourgeoisie a bien plus peur de la classe ouvrière qu'elle n'espère une réforme électorale selon son cœur - bien qu'il y ait certains petits politiciens à l'âme de boutiquier qui spéculent sur une once de réforme électorale allant dans le sens étroit de leur parti, comme s'il s'agissait d'un malheureux plat de lentilles. Elle veut une réforme électorale, qui traduit une haine sans force envers les couches supérieures de la société et sa fourberie envers les classes inférieures. Si la revendication d'un droit de vote réellement démocratique, dont elle parle elle aussi du bout des lèvres, vient à se présenter à elle comme une revendication de lutte de classe des prolétaires sous le drapeau de la grève politique révolutionnaire, elle se bouchera alors les oreilles et ne fera plus qu'en appeler au ministère public, à la police et l'armée. Le prolétariat doit donc se débrouiller seul. Il ne peut trouver qu'une aide tiède ici et là dans les cercles de la classe moyenne, qui est également privée de ses droits.

En fait, il ne rencontrera pas en face de lui l'ensemble de la bourgeoisie unie en rangs serrés ni une tactique homogène. Division et hostilité réciproque des ennemis, en partie ou totalement, du système électoral, faciliteront notre combat. Mais déjà le souvenir de l'attitude misérable et dénonciatrice envers nos manifestations de rue en 1910, mettra un terme aux espoirs ambitieux concernant l'attitude du libéralisme.

Plus le prolétariat dépend de lui-même, plus il doit faire appel à sa propre force suprême. Seules toutes les organisations du prolétariat réunies, dans une unité unanime, peuvent entreprendre la grève de masse. La participation sans réserve des syndicats est avant tout nécessaire. Mais, malgré la conjoncture et la crise,. ils ne résisteront pas à la longue. La compréhension de l'importance, pour la situation économique de la classe ouvrière, du travail politique parlementaire et d'une évolution du rapport de force dans l'administration, la compréhension de l'identité finale des intérêts, des tâches et des luttes politiques et économiques dans les domaines les plus larges, existe déjà ; elle peut être facilement généralisée et intensifiée. L'importance de la lutte pour le droit de vote en Prusse pour les syndicats, telle qu'elle a été exposée plus haut, est si évidente, même pour un esprit peu averti, que la propagande pour la grève politique de masse en vue de la conquête du droit de vote est beaucoup plus sûre de réussir, surtout dans les plus grands syndicats, que la propagande pour les revendications syndicales quotidiennes. Et la participation simultanée de tous les groupes de travailleurs exerce un fort effet de suggestion. C'est ainsi que la volonté déterminée de lutter pour le droit de vote et de s'engager dans la grève de masse doit naître de la constatation purement syndicale de la situation globale de la classe ouvrière de Prusse et d'Allemagne, pour autant qu'elle ne soit pas encore née.

Le prolétariat inorganisé et même le prolétariat des organisations chrétiennes et des associations syndicales seront également accessibles à ces arguments, plus facilement encore que l'agitation pour une grève économique. L'attitude craintive du centre traître dans la question du droit de vote montre qu'il est bien conscient de ce danger.

Cependant, même le prolétariat organisé pour la lutte des classes, et encore plus celui qui en est éloigné, ne se lancera pas dans la grève de masse sur un ordre venu d'en haut, déterminé et capable de la mener jusqu'au bout. Qui - fût-il lui-même la star la plus brillante du belcanto politique - pourrait songer à créer artificiellement le désir d'entamer la grève de masse ? Ce serait là une affaire de politique de salon. Mais un état d'esprit de lutte exacerbé peut déboucher sur des luttes inopportunes et sans but. Il s'agit de tracer la voie à suivre d'abord dans les esprits, dans la conscience des masses de ceux qui se battent pour le droit de vote. Si la voie de la grève de masse est clairement reconnue comme la seule possible pour l'exploitation efficace de la force prolétaire portée par une combativité enthousiaste, cette analyse doit être diffusée, de sorte que la volonté et la combativité des masses en colère finissent par s'emparer spontanément de ce moyen de lutte. La diffusion ne sera pas difficile.  Depuis longtemps déjà, l'idée de la grève de masse a trouvé un écho extraordinaire au sein des masses ouvrières, et c'est précisément la formation dans les luttes syndicales et la compréhension qui en a résulté du pouvoir des travailleurs ainsi que des moyens appropriés pour le faire valoir qui les a tout naturellement orientés vers l'idée de la grève politique de masse. La tâche naturelle des dits dirigeants ouvriers, compte tenu de leur énorme responsabilité, est une prudente réserve et une méfiance bien justifiée à l'égard du feu de l'enthousiasme, qui se révèle trop souvent être un feu de paille avec lequel on ne peut pas créer un incendie révolutionnaire. Leur aversion bien compréhensible pour les expériences insuffisamment assurées ne les empêchera cependant pas, lorsque les conditions d'une grève de masse seront, dans la mesure du possible, visiblement réunies et que les ouvriers seront poussés en avant avec une force impétueuse, de ne pas seulement se laisser entraîner, mais de prendre la direction des opérations.

Ces conditions sont-elles déjà réunies aujourd'hui ? Certainement pas à l'heure actuelle. Mais si tous les signes ne sont pas trompeurs, elles seront bientôt là. Il est possible qu'une crise soit imminente ; il est possible qu'elle impose une retenue provisoire ; il est possible qu'elle facilite l'éclatement d'une grève de masse, justement en lien avec les luttes douanières. Quoi qu'il en soit, l'hiver prochain sera marqué par des événements auxquels se rattachera tout naturellement un nouveau mouvement pour les droits électoraux. Il est certain que la lutte aura lieu. Soit le gouvernement prussien se moque du peuple privé de ses droits en ne proposant aucune réforme électorale : cela signifie la lutte ! Ou bien il le défie par un nouveau plan issu du cerveau policier de Dallwitz : cela ne signifie pas moins une lutte  couteau tiré. Si l'atmosphère au sein du prolétariat est portée au plus haut point d'ébullition, qui constitue la condition préalable à la grève de masse, et si la volonté de grève de masse est aussi passionnément déterminée et fermement enracinée qu'une lutte à outrance l'exige, alors il ne sera plus possible d'arrêter ce qui doit pourtant arriver - malgré tout.

En attendant, il est impératif de se préparer à tout. S'il est vrai que la question du droit de vote en Prusse est une question allemande et s'il est vrai que la grève de masse en Prusse doit être soutenue et portée par tout le prolétariat allemand, il est tout aussi certain certain que la lutte doit finalement être menée en Prusse même. Certes, les peuples du Mecklembourg, du Brunswick, de la Hanse et de la Thuringe, et peut-être aussi celui de la Saxe, seront emportés par la tempête prussienne. Mais le coup décisif est porté en Prusse ; si le manteau prussien tombe, alors les duchés, les grands-duchés e tutti quanti tomberont aussi.

C'est donc en Prusse que les décisions décisives doivent être prises. Il serait judicieux qu'un congrès extraordinaire du parti en Prusse soit prévu pour l'automne. cela ne sera pas trop tôt, il s'agira de se préparer à toutes les éventualités, une préparation étendue, peut-être même une préparation à la belge. Si le moment critique arrive avec l'ouverture du parlement régional, tout doit être prêt pour le combat. Il faut alors prendre une décision rapide en fonction de la situation. Sans hésitation, mais avec audace s'il le faut. Le droit de vote libre et égal pour la Prusse est une messe, il vaut bien une grève de masse.

 

Resolution des SPD Parteitages 1913 in Jena

Nach dem vom Mannheimer Parteitag (1906) bestätigten Beschluß des Jenaer Parteitages (1905) ist die umfassendste Anwendung der Massenarbeitseinstellung gegebenenfalls als eines der wirksamsten Mittel zu betrachten, nicht nur um Angriffe auf bestehende Volksrechte abzuwehren, sondern um Volksrechte neu zu erobern.

Die Eroberung des allgemeinen, gleichen, direkten und geheimen Wahlrechts zu allenVertretungskörpern ist eine der Vorbedingungen für den Befreiungskampf des Proletariats. Das Dreiklassenwahlrecht entrechtet die Besitzlosen nicht nur, sondern hemmt sie in allen ihren Bestrebungen auf Verbesserung ihrer Lebenshaltung, es macht die schlimmsten Feinde gewerkschaftlicher Betätigung und sozialen Fortschritts, die Junkerkaste, zum Beherrscher der Gesetzgebung.

Darum fordert der Parteitag die entrechteten Massen auf, im Kampfe gegen das Dreiklassenunrecht alle Kräfte anzuspannen in dem Bewußtsein, daß dieser Kampf ohne große Opfer nicht siegreich durchgeführt werden kann.

Indem der Parteitag den Massenstreik als unfehlbares und jederzeit anwendbares Mittel zur Beseitigung sozialer Schäden im Sinne der anarchistischen Auffassung verwirft, spricht er zugleich die Überzeugung aus, daß die Arbeiterschaft für die Erringung der politischen Gleichberechtigung ihre ganze Kraft einsetzen muß. Der politische Massenstreik kann nur bei vollkommener Einigkeit aller Organe der Arbeiterbewegung von klassenbewußten, für die letzten Ziele des Sozialismus begeisterten und zu jedem Opfer bereiten Massen eführtwerden. Der Parteitag macht es deshalb den Parteigenossen zur Pflicht, unermüdlich für den Aushau der politischen und gewerkschaftlichen Organisationen zu wirken.

[Angenommen]

Quelle: Protokoll über die Verhandlungen des Parteitages der Sozialdemokratischen Partei Deutschlands, abgehalten in Jena vom 14. bis 20. September 1913, Berlin 1913, S. 19

 

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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009