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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
29 décembre 2018 6 29 /12 /décembre /2018 14:33
Georges Castellan, un analyse de la révolution de novembre en Allemagne

LA RÉVOLUTION ALLEMANDE DE NOVEMBRE 1918, «NOVEMBERREVOLUTION »

 

Depuis un demi-siècle, la Révolution allemande de 1918 fait l'objet d'âpres controverses, qui ont porté surtout sur les responsabilités de la Révolution et de son échec. Plus précisément, sur deux points : l'influence de la Révolution bolchevique et la politique des chefs sociaux-démocrates.

 

Sur le premier point, on sait que l'explication fut avancée au moment même des événements. Le 8 novembre — dès avant la Révolution à Berlin — l'agence officielle Wolff annonçant l'extension du mouvement des «conseils d'ouvriers et de soldats » aux villes de Hanovre, Brunswick, Magdebourg, ajoutait : «Ce mouvement a sa source en Russie, les représentants de la République des Soviets à Berlin y ont travaillé activement ». Explication qui s'inscrivait dans la ligne de la politique du gouvernement Max de Bade. Le 2 novembre en effet, le Cabinet de Berlin se souvenait brusquement du meurtre quatre mois plus tôt du comte Mirbach, ambassadeur du Kaiser à Moscou et* dans une note au gouvernement russe déclarait qu'il ne pouvait laisser le crime inexpié. Deux jours après, une caisse de courrier diplomatique adressé au représentant bolchevique Joffe s'ouvrait «par accident » laissant échapper toute une littérature révolutionnaire. Joffe et ses collaborateurs étaient embarqués à Berlin dans un train spécial le 6 novembre au matin et ils arrivaient à la frontière russo-allemande le 9 : en fait, aucun représentant du gouvernement bolchevique n'était présent lorsque la Révolution triompha à Berlin. Toutefois l'explication par «la main de Moscou » fut retenue par toute une historiographie que l'on peut appeler de «droite ». Ainsi, en France, on la trouve agrémentée d'antisémitisme sous la plume de Benoist-Méchin dans son Histoire de l'Armée allemande 1, comme sous celle d'un philosophe fourvoyé dans l'histoire, Albert Rivaud qui formule ainsi sa problématique : «Révolution populaire ? Sursaut de la démocratie allemande contre le despotisme ? Non pas. La Social-Démocratie n'est que l'instrument inconscient de l'Internationale » ; pour lui, le groupe Spartakus est «formé surtout d'anarchistes et d'agents de l'étranger » 2. Du côté allemand, il n'est pas besoin d'aller jusqu'au Mein Kampf pour retrouver cette thèse. Ferdinand Friedensburg, dans sa Weimarer Republik écrit : «Contre les restes de l'ordre politique, social et économique se produisit le choc révolutionnaire de masses à demi-affamées, guidées par l'exemple des envoyés (Beauftragte ) soviétiques » 1.

 

Au contraire, l'historiographie allemande que l'on pourrait appeler «weimarienne » ou libérale s'élève contre cette interprétation. Du moins pour les débuts de la Révolution, c'est-à-dire le soulèvement de la flotte à Kiel. La Commission parlementaire d'enquête du Reichstag sur les origines de l'effondrement avait été formelle sur ce point. Hermann Pinnow, auteur de manuels scolaires très répandus, l'expose en ces termes : «On ne trouve aucune preuve qu'il ait existé parmi les marins des navires de guerre soit une organisation révolutionnaire, soit une entente avec des personnalités politiques quelconques » 2. C'est également l'avis de Erich Eyck dans son histoire de la République de Weimar : «La révolte des marins, écrit-il, peut être expliquée sans référence à aucune agitation révolutionnaire. Les amiraux avaient joué avec le feu (en ordonnant la sortie de la flotte) » 3. Et le Pr. Erdmann, dans le Gebhardt : «Dans la flotte, il y avait déjà eu en 1917 des mutineries sporadiques. Dans les derniers jours de la guerre, elle échappa à ses chefs. Le motif n'en était toutefois pas de nature politique » 4.

Dans un tout autre esprit, les historiens marxistes retrouvent les thèses de l'historiographie de droite. L'influence de Moscou a été très grande, dans la Révolution de Novembre : c'est ce que soulignent tous nos collègues de la R.D.A.. Dans la collection «Recherches archivistiques sur l'histoire du mouvement ouvrier allemand », le Pr. Léo Stern a consacré quatre volumes aux «Conséquences de la Grande Révolution socialiste d'octobre sur l'Allemagne t » (1959), et la plus récente — et la seule — synthèse publiée en République démocratique sur la République de Weimar du Dr Ruge insiste sur cette idée : «Dans le peuple allemand, écrit-il, la sympathie pour la République russe des ouvriers et des paysans était extraordinairement forte » 5. Il ne s'agit évidemment plus d'une entreprise de subversion comme pour Friedenburg ou Rivaud, mais de l'adhésion sentimentale et politique aux thèses et aux réalisations de la Révolution d'octobre. On passe de l'histoire complot à l'histoire de la psychologie collective.

 

Il est vrai que l'on retrouve chez les marxistes l'histoire complot, mais inversée en quelque sorte, au sujet de la politique des chefs du parti social-démocrate S.P.D. On se souvient de la condamnation sans appel portée par Lénine. Dans une lettre du 1er octobre 1918, il envoyait à Trotzky et Sverdlov des directives en vue des «débuts de la Révolution en Allemagne » : «Pas de relation, écrivait-il, avec le gouvernement de Guillaume, ni avec celui de Guillaume II plus Ebert et autres canailles » 6. Et dans le feu du combat, nombreux ont été les anathèmes de Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg contre les «traîtres », Ebert, Scheidemann et autres. Avec de simples variantes de forme, l'accusation de trahison a été reprise par tous les écrivains marxistes. Pour Gilbert Badia : «Ebert (est) un monarchiste mal repenti qui hait la révolution » ; de même Scheidemann, l'homme qui dira en 1922 : «Affirmer que la Social-Démocratie a voulu ou préparé la révolution de Novembre, est un mensonge de nos adversaires aussi ridicule qu'insensé ». Quant à Noske : «Il s'est fait l'auxiliaire cruel et dévoué de la réaction allemande contre sa classe, la classe ouvrière » *. Cette théorie de la «trahison » est reprise par Wolfang Ruge qui l'inscrit d'ailleurs dans une action plus vaste : «Le bloc des Junkers et des capitalistes des monopoles se voit [à la fin de la guerre] hors d'état de maintenir sa puissance avec les moyens jusque-là employés : par suite les anciens pouvoirs introduisent dans l'appareil d'État des transformations formellement démocratiques, les partis bourgeois s'orientent vers une politique de coalition avec les chefs sociaux-démocrates de droite, les maîtres des monopoles se déclarent prêts à collaborer avec les syndicats réformistes, et les militaristes proposent à l'Entente une paix qui doit préparer un com¬ plot mondial contre la Russie soviétique » 2.

 

C'est dans ce vaste complot — Weltkomplott — que s'inscrit la trahison des Ebert, Scheidemann et Noske : «Les chefs réformistes s'emparent des organes créés par les travailleurs et des positions occupées par eux dans l'appareil d'État à la suite des combats révolutionnaires, pour organiser la défaite de la classe ouvrière (um die Niederlage der Arbeiterklasse zu organisieren) 3.

 

En somme, et ceci n'est pas fait pour nous étonner, on retrouve actuellement dans le procès des responsabilités de la Révolution, les positions des trois camps de 1918 : les forces du passé, Armée et conservateurs, qui ne peuvent échapper à leurs responsabilités qu'en accusant «la main de Moscou » — , les hommes de Weimar qui justifient le 9 novembre par la révolte des mécontents de l'ancien ordre des choses — , les communistes qui, pour expliquer leur échec, font leurs les accusations de Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg contre les chefs socialistes majoritaires.

 

Mais après tout, ces discussions relèvent de préoccupations politiques actuelles et ne concernent pas l'historien qui a à comprendre et non à juger.

 

Second problème : de quelle révolution s'agit-il?

 

Une des difficultés que soulève en effet l'étude de Novembre 1918 provient de ce que, dans l'Allemagne de l'époque, tout le monde parle de «Révolution » : beaucoup s'en réclament, beaucoup la combattent, mais tous sont loin de parler de la même chose. Sur ce point, les historiens sont unanimes mais ils divergent sur le nombre de modèles, au sens sociologique du terme, envisagés par les Allemands en 1918 : la majorité des historiens penche pour deux modèles, mais depuis 1945 se dessine l'idée d'une «troisième voie » de la Révolution.

 

Classiquement opposées mais finalement concordantes sur ce point, les deux historiographies libérale et marxiste s'en tiennent à deux modèles.

 

 «L'Allemagne, pays entre l'Est et l'Ouest, se trouvait placé devant le problème : dans le mouvement socialiste, qui l'emporterait de l'idée occidentale du parlementarisme et de la démocratie ou de l'idée léniniste de l'État des Conseils ? » *.

 

Acquis au réformisme d'Eduard Bernstein, les socialistes majoritaires ne pouvaient donner au mot «Révolution » qu'un sens, celui des Prémisses du socialisme de 1896. Or Bernstein ironisait alors sur le «terrorisme prolétarien qui, dans les conditions de l'Allemagne, devait nécessairement exercer une action rétrograde sur le plan économique et politique » 2. Cette «action rétrograde » fut la crainte, l'obsession même des Ebert, Schei demann. La phrase si souvent reprochée par les marxistes au premier : «Je hais la Révolution comme le péché », s'inscrit dans la ligne d'E. Bernstein, proclamant en 1887 : «La violence est un facteur aussi réactionnaire que révolutionnaire ». Et c'est la crainte d'une «action rétrograde » sur une économie ravagée par la guerre qui détourne les Commissions du Peuple d'une politique immédiate de socialisation. La Révolution c'est, pour eux, substituer, si possible sans violence, à l'Allemagne impériale, féodale et militariste, une Allemagne démocratique et pacifique. Cette démocratie doit être parlementaire : elle sera réalisée lorsque triompheront le suffrage universel en Prusse et la responsabilité du Chancelier devant le Reichstag, double objectif de leur lutte depuis 1870. Elle sera aussi sociale, intégrant de plus en plus le prolétariat par une «politique sociale » inaugurée par Bismarck.

 

Et c'est ce programme des Majoritaires qui se réalise dans le dernier mois de la guerre, Le 5 octobre, Max de Bade, dans son discours de présentation au Reichstag, annonce «une nouvelle époque dans l'histoire de l'Allemagne » son gouvernement s'appuiera sur la majorité du Reichstag et introduira le suffrage universel en Prusse. Sans doute, les discussions traînent-elles devant l'Assemblée mais le 22 octobre on y débat des droits respectifs du gouvernement et du parlement, on y réduit les prérogatives de l'Empereur. Le Vorwàrts du 23 octobre peut écrire : «L'ancien régime a vécu », et dans le Vorwàrts du 2 novembre, Scheidemann commente les changements constitutionnels «acquis, il faut l'avouer, sous la pression extérieure comme ce fut le cas des Français en 1870. L'Allemagne est aujourd'hui une répu¬ blique bourgeoise avec une constitution économique capitaliste et un fort courant socialiste comme l'Angleterre et la France ». Il est clair que pour lui, dès ce moment, la «Révolution » est faite : l'Allemagne de Guillaume II n'existe plus. Dans cette perspective, la journée du 9 novembre est un accident, une complication passablement inutile. De là l'indifférence relative d'Ebert devant la forme du gouvernement : monarchie ou république. Quand les historiens marxistes écrivent : «Les dirigeants sociaux-démocrates, le 9 novembre au matin, tentent encore de sauver la monarchie » 3, ils transforment en choix politique ce qui n'était qu'opportunisme tactique. Poser le problème de la forme du régime à ce moment, c'était pour Ebert céder à la «violence » avec tout le risque «d'action rétrograde » sur le plan politique. Les reproches qu'il fait à Scheidemann, après que celui-ci ait proclamé la République du perron du Reichstag, sont en parfaite conformité avec la ligne politique des Majoritaires : l'ancien régime, mort par la voie parlementaire le 22 octobre et ayant fait place à un ordre démocratique, c'est à une Constituante de décider de la forme actuelle de l'État puisque la superstructure impériale vient de s'écrouler sur le chemin de la paix.

 

Au plan social, la politique d'intégration progresse elle aussi. C'est le 9 octobre 1918 que les représentants du patronat réunis à Diisseldorf mandatent Stinnes pour traiter avec les syndicats ouvriers des problèmes du travail à l'intérieur de la profession. Les discussions commencent le 6 novembre et aboutissent à l'accord du 15, dit de «Communauté du Travail » — Arbeitsgemeinschaft — instituant une collaboration organique entre syndicats patronaux et ouvriers. On sait les vives critiques qui s'élevèrent par la suite, chacune des deux parties accusant ses représentants d'avoir capitulé devant l'autre. Mais ces polémiques a posteriori ne rendent pas compte de la situation du moment. Plus encore que la S.P.D. les syndicats étaient réformistes, et pas seulement leurs chefs. Au Congrès des syndicats socialistes de Nuremberg, début juillet 1919, les «Communautés de travail » fondées sur le principe paritaire furent approuvées par 3 109 000 voix contre 1 500 000 et 250 000 abstentions. Le Pr. Erdmann écrit à juste titre : «Par-delà la défaite militaire, l'effondrement politique et la guerre civile, les syndicats étaient restés fidèles à leur ligne politique et la continuèrent sans rupture révolutionnaire dans le temps de Weimar » *.

 

En définitive, nous irions plus loin que G. Badia constatant : «Dès le 9 novembre à midi, Scheidemann est préoccupé de rétablir l'ordre. Pour lui, la Révolution est terminée » 2. Nous pensons que pour Ebert, Scheidemann et la plupart des chefs majoritaires, elle était terminée le 23 octobre. Si bien que nous ne refusons pas — mais en la limitant à l'optique sociale-démocrate — la formule paradoxale de Claude Klein dans son petit livre sur Weimar : «L'ambiguïté fondamentale de cette Révolution de novembre, c'est qu'en réalité, elle n'a jamais eu lieu » 3.

 

La révolution fut pourtant une réalité douloureuse ou tragique pour les Spartakistes et les foules qu'ils entraînèrent. Les précieuses études et publications de documents de Gilbert Badia permettent désormais de bien cerner l'originalité du groupe Spartakus à l'intérieur d'un Parti Socialiste Indépendant singulièrement hétérogène. Seuls les Spartakistes avaient une vue claire des objectifs, sinon des moyens. Historiens marxistes et libéraux sont d'accord sur le «modèle » de Révolution envisagé par K. Liebkrecht, Rosa Luxemburg et leurs disciples. Suivant la formule de Golo Mann : «L'extrême-gauche croyait que la Révolution devait être continuée et, suivant l'exemple russe, qu'elle pouvait être continuée jusqu'au communisme. Comme Lénine avait succédé à Kerensky, Karl Liebknecht devait succéder à Ebert » 4. C'est cette Révolution socialiste — à venir — que salue Liebknecht le 9 novembre à 4 heures de l'après-midi du balcon du château royal quand il s'écrie : «Vive la République socialiste libre ! ». Pour lui comme pour tous ses partisans, le 9 novembre est un point de départ.

 

En cela, les Spartakistes ont été aussi conséquents dans leur comportement politique que les Majoritaires dans le leur. Sans doute, Rosa Luxemburg en particulier a-t-elle été passablement critique envers les bolcheviks, et, mi-octobre 1918, la lettre n° 12 de Spartakus parle-t-elle encore de «l'échec de la Révolution russe » *, mais quand Liebknecht est libéré le 21 octobre, il est fêté à l'ambassade russe de Berlin et Lénine lui envoie un télégramme de félicitations. Le 31 octobre, dans un appel aux soldats de l'Entente, il leur montre la République socialiste de Russie comme le point de départ «d'une reconstruction sociale de l'univers » et conclut «Vive la Russie des ouvriers, des paysans et des soldats ! » 2 Tout cela était parfaite¬ ment clair, et parfaitement connu aussi des Majoritaires. Le Vorwârts du 6 novembre mettait en garde le prolétariat contre le bolchevisme «créateur de famine » et dénonçait l'action du «tout petit groupe Spartakus qui n'est même pas d'accord avec les Indépendants, qui ne veut ni parlementarisme, ni suffrage universel, mais un gouvernement des Soviets. » Il ne fait donc aucun doute que les Spartakistes aient voulu faire en Allemagne une Révolution socialiste, conforme dans ses grandes lignes au modèle bolchevique.

 

Existait-il une troisième voie de la Révolution allemande ? L'idée semble apparaître chez un certain nombre d'historiens anglais au lendemain de la seconde guerre mondiale (A.J. Taylor, Le cours de l’histoire allemande (1945) ; G. Scheele, La République de Weimar , prélude au IIIe Reich (1946); G. Barraclough, Facteurs de l'histoire allemande (1946).

 

Les dates 1945-46 situent cette thèse dans la perspective de la «rééducation » du peuple allemand entreprise par les Alliés au lendemain de l'effondrement du nazisme, mais elle a été reprise en 1955 par R. Coher, Échec dune révolution, et du côté allemand par Walter Tormin dans son étude Zioischen Ràtediktatur und sozialer Demokratie, de 1954 3. Dans son Allemagne Contemporaine, Edmond Vermeil, d'ailleurs influencé par Scheele, déve¬ loppait cette thèse en réponse au livre d'Hermann Rauschning (Deutschland zwischen West und Ost, 1950) dans lequel l'ancien compagnon de Hitler expliquait qu'en 1918-19 l'Allemagne avait sauvé l'Europe en optant, malgré les rigueurs du traité de Versailles pour un ordre bourgeois. A ce plaidoyer de circonstance — 1950, début de la guerre de Corée — E. Vermeil répon¬ dait : «Propos aussi spécieux que suggestifs. La fureur et la hâte avec les¬ quelles une bourgeoisie réactionnaire et un socialisme opportuniste, soutenus par les restes de l'Armée, ont brisé l'élan communiste, les démentent nette¬ ment. Elles nous prouvent que le danger de collusion entre la pseudo-révo¬ lution de novembre 1918 et le bolchevisme n'était que vaine fumée » 4.

 

Une troisième voie était donc possible, dont Tormin donne une formulation que je résumerai en quatre points :

 

1) dès le 10 novembre la question constitutionnelle : Assemblée Nationale ou dictature des Conseils, ne se pose plus puisque ce jour là au cirque Busch l'assemblée générale des Conseils de Berlin accepte d'élire un gouvernement provisoire bipartite : Majoritaires et Indépendants.

 

2) Ce qui montre que ces Rate ne sont pas une simple imitation des Soviets russes : ils sont le produit de l'effondrement militaire et administratif du Reich, ils ne sont pas le moteur de la Révolution.

 

3) L'opposition révolutionnaire gagne en intensité à cause de l'immobilisme des Commissaires du Peuple, de leur manque d'initiative dans la question de la socialisation et de leur appui donné à l'ancien État.

 

4) La tentative de réaliser une «Révolution » d'Octobre en Allemagne se situe au printemps 1919 dans les combats de la Ruhr, de Berlin, de la Bavière, de février à mai 1919.

 

Trois voies, c'est aussi la thèse du Dr Helmut Heiber auteur de l'une des plus récentes, et des plus répandues, synthèses sur la République de Weimar Il distingue en effet trois mouvements révolutionnaires : l'un pour la parlementarisation de la vie politique allemande et la démocratisation de la monarchie constitutionnelle, il est représenté par les partis de la majorité nouvelle (issue de la résolution de paix d'Erzberger, juillet 1917) et qui vont se retrouver dans la «Coalition de Weimar », à leur tête les socialistes majoritaires — l'autre pour une révolution de type bolchevique appuyée sur les Conseils transformés en Soviets, ce sont les Spartakistes — le troisième qui est un mouvement populaire contre l'État militaire et féodal, l’Obrigkeitstaat prussien, c'est celui qui s'est manifesté dans le mouvement non-politique au départ des marins de Kiel, c'est celui qui domine les Rate et le Parti Socialiste Indépendant à l'exception des Spartakistes. Claude Klein, enfin, essayant de dégager des caractères exacts des Rate, souligne leur caractère peu révolutionnaire, au sens spartakiste du terme, et penche lui aussi pour une troisième voie 2.

 

Toute cette problématique se ramène finalement à une question essen tielle : à laquelle des trois conceptions de la Révolution se ralliaient les masses allemandes en novembre 1918 ? C'était d'ailleurs la problématique de Rosa Luxemburg elle-même : «Toute véritable grande lutte de classe doit reposer sur l'appui et sur la collaboration des masses les plus étendues »,  écrivait-elle dès 1905.

 

Examinons donc le comportement réel des masses.

 

Le 2 novembre, le Comité d'action des Délégués Révolutionnaires (Revolutionare Obleute) qui existent dans les usines depuis les grèves de janvier 1918, se réunit avec Liebknecht, Pieck, Ledebour, Daiimig et Haase.

 

« On n'a à cette heure aucune information sur ce qui se passe en province, mais la situation paraît assez "mûre" à Berlin pour qu'on parle de fixer au surlendemain 4 novembre, le jour de l'insurrection ... Pour l'après-midi, on a convoqué une assemblée élargie à laquelle assistent des représentants de nombreuses usines berlinoises. Or les délégués hésitent. Par 21 voix contre 19, ils repoussent la date du 4 novembre : l'insurrection est remise, Haase et Dittmann (USPD) appuient d'ailleurs la tendance qui veut temporiser. On se sépare sans fixer de date précise, on a parlé du 11 novembre » *. La temporisation est venue ce jour des éléments les plus en contact avec les «masses ».

 

Le 3 novembre, les marins de Kiel se révoltent. Mais il s'agit là d'une mutinerie militaire. Sans doute, un Conseil de soldats — le premier en Allemagne — est-il constitué le 4 et un Conseil d'ouvriers le 5, mais avec la participation de dirigeants SPD, Indépendants, des syndicats. Les revendications sont : libération des marins emprisonnés, abdication du Kaiser, suffrage universel et égal. Pas de trace d'un programme spartakiste.

 

Les 7, 8, 9 novembre, la «Révolution » submerge l'Allemagne, c'est-à-dire que les appareils gouvernementaux du Reich et des États s'effondrent et que partout se constituent des «Conseils d'ouvriers et de soldats » qui se substituent aux autorités anciennes, ou parfois collaborent avec elles. Or ces Rate issus des masses sont loin d'être acquis aux thèses de Liebknecht. Celui de Lübeck constitué le 7, demande le suffrage universel et une assu rance contre le chômage, celui de Schwerin le 8, réclame au Grand Duc de Mecklemburg l'introduction du système parlementaire, celui de Brunschwig le même jour, force le duc à abdiquer, tandis que celui de Leipzig lance un appel en faveur d'une «République socialiste d'Allemagne ». Dans toutes leurs proclamations deux revendications seulement sont toujours présentes : la paix et la démocratie. Ce qui donne d'ailleurs le niveau de la conscience et de l'information politiques des masses : la démocratisation de la vie politique a été décidée par le Reichstag le 22 octobre, les plénipotentiaires de l'armistice sont partis le 7 novembre. La «paix » et la « démocratie » sont là, et les masses l'ignorent.

 

Le 10 novembre, le Comité provisoire des Conseils de Berlin convoque au cirque Busch, à la Friedrichstrasse, une Assemblée générale des représentants des Conseils de la capitale, en précisant que la réunion a pour but d'élire le gouvernement provisoire. En effet, depuis la veille, Ebert fait fonction de chancelier, mais il a besoin d'une ratification populaire puisque l'Empire n'existe plus. Le compte rendu de la réunion a été retrouvé par Gilbert Badia et publié, partiellement, dans son livre Les Spartakistes ; il est du plus haut intérêt.

 

Le cirque, nous dit-il, est plein à craquer d'ouvriers, de soldats en armes : les masses, si les mots sont un sens. Ebert qui parle le premier, soulève des «tempêtes d'applaudissements » en faisant acclamer l'unité du mouvement socialiste, c'est-à-dire la collaboration à un même gouvernement de la SPD et des Indépendants. Haase, leader de 1USPD, soulève au contraire «des cris sceptiques » quand il crie «Vive l'internationale ! ». Quand à Liebknecht, G. Badia le présente ainsi : «Troisième orateur, Liebknecht, salué par de longs applaudissements, sans doute l'homme le plus populaire ce jour-là, au cirque Busch. Mais d'entrée de jeu, il prend une partie de l'assistance à rebrousse-poil » *. En fait, Liebknecht, qui parle le troisième, est de beaucoup l'orateur le plus malmené : «Tempête d'interruptions : cris Unité, Unité », note le sténographe. «Autres cris : Quittez la Tribune ! » lorsque le leader spartakiste critique Ebert et le Vorwärts. «Contestation ! Vous falsifiez les faits ! » hurle la salle quand il déclare que les Conseils de soldats ont élu à leur tête des officiers supérieurs et les soldats, furieux, le menacent de leurs fusils ! Enfin, il esquisse en deux phrases la position de son groupe : «Le triomphe de la Révolution ne sera possible que si elle passe au stade de la révolution sociale. C'est alors seulement qu'elle aura la force d'assurer la socialisation de l'économie, le bonheur et la paix pour l'éternité » et le sténographe de noter : «Applaudissements dispersés, agitation prolongée. Nouveaux cris : Unité ! ». Le moins qu'on puisse dire, c'est que les masses du cirque Busch ne sont acquises ni à Liebknecht, ni à la Révolution spartakiste.

 

Liebknecht et ses amis en eurent parfaitement conscience. Le 18 novembre Rosa Luxemburg écrivait dans la Rote Fahne : «Ce n'est pas en vingt-quatre heures qu'un État réactionnaire peut se transformer en État populaire et révolutionnaire. Des soldats qui, hier encore, se faisaient les gendarmes de la réaction et assassinaient des prolétaires révolutionnaires en Finlande, en Russie, en Ukraine, dans les pays Baltes, des ouvriers qui laissaient tran quillement commettre ces crimes ne sont pas devenus en vingt-quatre heures les porteurs conscients des idées du socialisme ». Aussi, le 16 décembre 1918, se réunit à Berlin le Congrès national des Conseils, sur 487 délégués élus dans l'ensemble de l'Allemagne, 289 sont SPD, 90 USPD spartakistes compris, les autres sont démocrates ou indéterminés. Et quand la question est posée de coopter Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg : par assis et levés le Congrès refuse de les accueillir même avec simple voix consultative. C'est ce Congrès qui, malgré une démonstration de la rue organisée par les Spartakistes, fixe les élections pour l'Assemblée constituante au 19 janvier 1919, mettant ainsi un terme à une situation «révolutionnaire » dans ce sens qu'elle ne reposait sur aucune légalité. La défaite spartakiste était, dès le 18 décembre, consommée.

 

Pour conclure, récapitulons les jalons que nous avons posés :

 

La «main de Moscou » ? Commode alibi des responsables du désastre. Il n'y a plus de représentant des Soviets à Berlin depuis le 6 novembre, et ce n'est ni l'argent, ni même les quelques armes distribuées par Joffe qui peuvent expliquer l'effondrement de l'Allemagne impériale.

 

Influence de la Révolution d'Octobre ? Oui, assurément sur les Spartakistes. Sur les masses ? Voire. Sinon, comment expliquer qu'elles soient restées fidèles aux chefs majoritaires alors que dès février 1918, le Vorwärts écrivait : «Ce que font les bolcheviks en Russie, ce n'est ni du socialisme, ni de la démocratie. C'est au contraire du putschisme sous sa forme la plus violente, c'est de l'anarchisme. Aussi nous faut-il tirer entre les bolcheviks et nous un trait épais et bien visible » *.

 

La «Trahison des chefs du SPD «  ? Non point, du moins au sens où l'entendent les historiens marxistes : les majoritaires ont été au contraire tout à fait fidèles à une ligne politique qui commence le 4 août 1914 avec l'Union Sacrée, le Burgfrieden.

 

Dès cette date, Lénine a crié à la trahison, et dans l'optique d'une révolution socialiste, il avait raison. Gilbert Badia écrit à juste titre : «La tragé die de la révolution allemande, c'est l'histoire du choix de la social démocratie, de ses collusions avec les forces les plus réactionnaires de l'ancien régime ». Or cette collusion sans doute n'était pas indispensable : Ebert, homme d'ordre, s'est trop défié des masses, mais elle était cependant rendue naturelle par la politique du Burgfrieden qui avait amené les Ebert, Scheidemann, Noske à collaborer avec le grand état-major. Le fameux coup de téléphone de Groener à Ebert dans la soirée du 9 novembre n'était qu'une reprise de contacts entre deux hommes qui se connaissaient depuis longtemps.

 

La typologie de la Révolution ? Je vois trois types.

 

Une «Révolution » pacifique conduisant à la parlementarisation et à la démocratisation de la vie politique. C'est celle des Majoritaires et elle réussit dès le 22 octobre.

 

Une «Révolution » de la flotte et de la rue contre l'État militariste, féodal et réactionnaire de Guillaume II et des princes. C'est celle de l’USPD et de larges masses populaires. Elle réussit le 9 novembre.

 

Une «Révolution » de type bolchevik. C’est celle des Spartakistes, elle échoue le 18 novembre, elle est noyée dans le sang en janvier 1919 à Berlin.

 

Mais comme les trois Révolutions ont coexisté, j'accepte la formule de Walter Ulbricht reprise par les historiens de RDA : «La Révolution de novembre 1918 doit être caractérisée comme une révolution bourgeoise-démocratique, qui, dans une certaine mesure a été réalisée avec des méthodes et des moyens prolétariens » 2.

 

Les masses allemandes n'ont pas voulu la Révolution du type bolchevik. Dans son dernier article, écrit à la veille de son assassinat (Rote Fahne du 14 janvier 1919) Rosa Luxemburg a porté un diagnostic d'une froide lucidité. «Ce qui est la plaie de la révolution : le manque de maturité politique de la masse des soldats qui continuent à se laisser abuser par leurs officiers et utiliser à des fins contre-révolutionnaires, est à lui seul la preuve que, dans ce choc-ci, une victoire durable de la révolution n'était pas possible. Et ce manque de maturité n'est lui-même que le symptôme du manque général de maturité de la Révolution allemande ».

 

Ce «manque de maturité », pour parler comme Rosa Luxemburg, cette absence de désir d'une révolution de type bolchevik dans les masses allemandes s'expliquent assurément par de multiples facteurs. On se contentera d'en indiquer quelques-uns :

 

1) absence d'une claire vision du «socialisme » et de la «révolution socialiste ». Et la responsabilité en incombe aux Spartakistes qui n'ont jamais su — ou voulu — s'expliquer sur ce point. Leur «Programme en six points » publié dans la Rote Fahne du 16 décembre, ne contient aucune allusion ni aux nationalisations, ni à la réforme agraire qui pourtant s'im posait dans l'Est de l'Allemagne.

 

2) dans les masses ouvrières, existe la croyance en une possibilité et un désir d'intégration dans la société capitaliste, réformée et démocratisée sans doute. C'est toute la tradition de la SPD et des syndicats qui depuis un demi-siècle sont leurs porte-parole.

 

3) la répulsion d'une partie du prolétariat pour les méthodes violentes et l'on sait que cette répulsion était partagée par Rosa Luxemburg elle-même. G. Badia note : «Lorsque au lendemain du Congrès de fondation du SPD (31 décembre 1918 -1er janvier 1919) des négociations s'engagent avec les Délégués révolutionnaires d'usines de Berlin, une des conditions que ceux-ci posent pour une adhésion éventuelle au parti communiste, c'est la suppression du mot : «Spartakus » dans le nom du nouveau parti. Le spartakisme effraie une partie du prolétariat » 1.

 

4) la limitation du mouvement spartakiste aux grandes villes. Nombreux sont les témoignages et documents montrant que les spartakistes sont inconnus ou détestés dans les campagnes, y compris chez les ouvriers agricoles de l'Est.

 

5) un racisme plus ou moins latent qui fait penser aux masses allemandes qu'une «Révolution bolchevique » est bonne pour les Russes et non pour les Allemands. D'où le succès de la propagande anti-bolchevique : «dicta ture orientale », «tsarisme rouge », etc.

 

En 1918, les masses allemandes ont choisi l'Occident : un siècle d'évolution historique le postulait.

 

Finalement, les masses ont voulu la Révolution parlementaire du SPD, elles ont voulu, à Berlin du moins, et dans les grandes villes, la révolution démocratique-socialiste de l'USPD, débouchant sur une démocratie sociale véritable où les structures capitalistes auraient été contestées par les Rate devenus d'authentiques organes de cogestion (Mitbestimmung ). L'alliance d'Ebert, Scheidemann et Noske avec l'état-major a bloqué l'évolution vers cette «troisième voie » et fait basculer la République naissante vers le conservatisme social et politique.

 

Pourquoi donc les masses se sont-elles résignées à ce choix, sanctionné par les élections à la Constituante : 38 % des voix à la SPD, 7,6 % seulement aux Indépendants ? C'est au plan de la psychologie collective qu'il faut conclure. Les masses allemandes de 1918 n'avaient pas conscience d'être poussées par la misère le dos au mur, contraintes à une fuite en avant dans une nouvelle Révolution, c'est-à-dire une nouvelle période de violences, d'efforts et de privations. Sortant de quarante ans d'un Reich semi-féodal et de quatre années d'une guerre sanglante, elles pensaient avoir une ère de démocratie et de paix.

 

Bertold Brecht les a sigmatisées dans ses Tambours dans la nuit, son héros a le choix entre récupérer sa fiancée, passagèrement infidèle, et se joindre à la Révolution. Il choisit la première solution : «Je suis un porc, et le porc rentre chez lui ! ».

 

Georges Castellan, Professeur à la Faculté des Lettres et Sciences humaines de Poitiers.

 

https://www.persee.fr/doc/rhmc_0048-8003_1969_num_16_1_3181

 

 

Les notes par pages :

 

1. Benoist-Méchin, Histoire de l'Armée allemande, t. I, pp. 50-60.

2. A. Rivaud, Le Relèvement de l'Allemagne, Paris, 1938, pp. 51 et 52.

1. Manuscrit de 1933-4 publié seulement en 1946, 2* éd. 1959, Hanover-cit., p. 9.

2. H. Pinnow, Histoire de l'Allemagne, Paris, Payot, 1931, p. 475.

P 41

3. Erick Eyck, A history oj the Weimar Republic, t. I, p. 42.

4. Gebhardt, t. IV, p. 77.

5. W. Ruge, Deutschland 1917-1933, p. 73.

6. Cité d'après E. H. Carr, The bolshevik Revolution, t. Ill, p. 91.

P 42

1. G. Badia, Histoire de l'Allemagne, t. I, aux pp. 105-106 (note 4), 131 (note 1).

2. Wolfgang Ruce, Deutschland, 1917-1933, p. 56.

3. Id., p. 64.

P 43

1. Gebhardt, t. IV, p. 85.

2. D'après Pierre Angel, Eduard Bernstein et l'évolution du socialisme allemand , p. 252.

3. G. Badia, Histoire de l'Allemagne, t. I, p. 109 et W. Ruge, op. cit., p. 65.

44

1. Gebhardt, t. IV, pp. 91-96.

2. G. Badia, Histoire de l'Allemagne, t. I, p. 109, note 2.

3. Claude Klein, Weimar, Paris, 1968, p. 22.

4. Golo Mann, Deutsche Geschichte des 19 und 20 jahrh., Fischer, 1958, p. 634.

P 45

1. Texte in Badia, Le Spartakisme, p. 371.

2. Texte in Badia, Le Spartakisme, pp. 378-379.

3. Beitrage zur Geschichte des Parlementarismus und der politischen Parteien, n* 4, 146 p.

4. E. Vermeil, L'Allemagne Contemporaine, t. II, p. 10.

P 46

1. Collection d.t.v. : W eltgeschichte des 20 Jahrh, Bd. 3, 1966, 282 p.

2. C. Klein, Weimar , pp. 18 et 122-124.  P47

P 47

1. G. Badia, Le Spartakisme, p. 174. 

1. G. Badia, op. cit., p. 86.  

P 48

P49

1. Voruxirts du 15 février 1918 (Cité d'après Badia, Le Spartakisme, p. 157).

2. Cité d'après W. Ruge, op. cit., p. 109.

4

50

1. G. Badia, «Le Spartakisme et sa problématique », Annales , E.S.C., mai-juin 1966, p. 655.

 

 

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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009