Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

Rechercher

Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
21 octobre 2017 6 21 /10 /octobre /2017 20:24
Prison de Breslau

Prison de Breslau

Cette lettre est précieuse parce qu'elle témoigne des toutes premières réactions de Rosa Luxemburg face à la révolution d'octobre :

 

"Depuis une semaine environ, toutes mes pensées vont naturellement vers Saint-Pétersbourg, et tous les matins et soirs, je tends une main impatiente vers les nouvelles fraîches apportées par les journaux, mais elles sont malheureusement brèves et confuses. On ne peut vraisemblablement pas espérer un succès durable, mais ce premier pas vers la prise du pouvoir constitue déjà en lui-même un soufflet pour la social-démocratie ici et pour l’ensemble de cette apathique Internationale. Tout ce que Kautsky trouve à faire, c'est de montrer par les statistiques que  les conditions sociales ne sont pas encore mûres en Russie pour une dictature du prolétariat. C’est  bien un digne « théoricien » du Parti social-démocrate indépendant ! Il a oublié que la France, sur le plan statistique, était encore bien moins mûre pour  une domination de la bourgeoisie en 1789 ainsi qu’en 1793. Par bonheur, depuis longtemps, l’histoire ne suit plus les préceptes théoriques de Kautsky, nous pouvons donc espérer que tout ira pour le mieux."

 

Cette lettre est écrite de la prison de Breslau. Rosa Luxemburg y a été transférée en juillet 1917. Elle est passée de manière clandestine comme le montre le dernier paragraphe. Martha Rosenbaum est l'une des deux femmes, à côté de militantes plus connues, qui ont accompagné Rosa Luxembug tout au long de son emprisonnement et ont  sauvé ses lettres.

Une première mention de la révolution d'octobre dans une lettre de Rosa Luxemburg de novembre 1917

La lettre complète.

 

Ma chère petite Martha

[Breslau, lettre adressée à Martha Rosenbaum, postérieure au 12 novembre 1917]

 

 

Merci beaucoup pour votre gentille carte. Votre visite m’a apporté à moi aussi un réconfort physique et moral dans lequel je puise encore aujourd’hui. Tout l’amour et la bonté que vous irradiez, ne peuvent que réchauffer le cœur de chacun. Il faut dire que tout s’est passé cette fois de manière beaucoup plus agréable et plus « humaine » que je ne le craignais et j’espère que, la prochaine fois, quand vous reviendrez, cela se passera encore mieux. Au demeurant, je continue toujours à vivre ici de la même façon : lors des promenades, dans l’horrible cour de la prison, je rêve si intensivement à quelque chose de beau que je ne remarque plus ce qui m’entoure, et le reste du temps, en cellule, je lis et je travaille sans cesse dans le calme et la tranquillité. Depuis une semaine environ, toutes mes pensées vont naturellement vers Saint-Pétersbourg, et tous les matins et soirs, je tends une main impatiente vers les nouvelles fraîches apportées par les journaux, mais elles sont malheureusement brèves et confuses. On ne peut vraisemblablement pas espérer un succès durable, mais ce premier pas vers la prise du pouvoir constitue déjà en lui-même un soufflet pour la social-démocratie ici et pour l’ensemble de cette apathique Internationale. Tout ce que Kautsky trouve à faire, c'est de montrer par les statistiques que  les conditions sociales ne sont pas encore mûres en Russie pour une dictature du prolétariat. C’est  bien un digne « théoricien » du Parti social-démocrate indépendant ! Il a oublié que la France, sur le plan statistique, était encore bien moins mûre pour  une domination de la bourgeoisie en 1789 ainsi qu’en 1793. Par bonheur, depuis longtemps, l’histoire ne suit plus les préceptes théoriques de Kautsky, nous pouvons donc espérer que tout ira pour le mieux.

 

Que lisez-vous ? Qu’écrivez-vous ? (Imaginez-vous que je n’ai pas encore récupéré mes chaussures !  … C’est drôle.) Ecrivez-moi quelques lignes (sans faire référence à cette lettre). Je vous embrasse, bonjour à votre époux et à Mademoiselle Anne, et aussi au petit Veil.

 

 

Votre R.

Le blog vous remercie pour toute amélioration de la traduction. La lettre se trouve aux pages 318 / 319 du tome 5 des Gesammelte  Briefe, paru chez Dietz Verlag en 1984.

Partager cet article
Repost0
28 mars 2016 1 28 /03 /mars /2016 11:37

Appel : Il y a 100 ans. Se souvenir du 1er mai 1916. En pleine guerre, à Berlin, plusieurs milliers de personnes manifestent à l'appel du courant spartakiste avec Karl Liebknecht, Rosa Luxemburg ..."

Extrait d'une lettre de Rosa Luxemburg du 11 mai 1916. Appel : "Il y a cent ans. Se souvenir du 1er mai 1916"

Extrait d'une lettre de Rosa Luxemburg à Marta Rosenbaum

sur la manifestation du 1er mai et les poursuites contre Karl Liebknecht

 

A Marta Rosenbaum - [Südende, 11 mai 1916]

 

Ma chère Madame Marta !

 

Merci beaucoup pour votre carte de vœux et votre lettre. Je n’avais pas votre adresse jusqu’à maintenant et ne pouvais donc pas vous écrire. D’autre part, je peux à peine prendre le temps de me reprendre du fait des démarches et réunions incessantes. Vous imaginez bien qu’il y a beaucoup à faire depuis le 1er mai ! Evidemment, vous souhaitez savoir ce qu’il en est pour K[arl]. Malheureusement, on ne peut encore rien dire de précis pour l’instant ! L’enquête continue, l’accusation n’a pas été n’a pas encore été formulée. Les perspectives ne semblent pas défavorables, mais vous savez que dans de tels cas, c’est la Raison d’Etat  [ndlt : en français dans le texte] qui décide, il ne reste donc qu’à attendre ce qu’elle va décider. Il est déjà clair que l’immunité sera rejetée par l’ensemble du Reichtag bourgeois. Très bien : c’est le suicide politique du parlementarisme. La manifestation du 1er mai a été très réussie et a dépassé toutes nos attentes, d’autant que nous l’avons organisée tout seuls avec peu de forces et dans un laps de temps des plus courts. Les gens autour de Ledebour ont été contactés et ont … refusé.

Gesammelte Briefe, Dietz Verlag 1984, Tome 5, P 117

Traduction et mise en ligne

Dominique Villaeys-Poirré, mars 2016

Le socle d'un momument à Karl Liebknecht Postdamer Platz

Le socle d'un momument à Karl Liebknecht Postdamer Platz

Partager cet article
Repost0
21 février 2016 7 21 /02 /février /2016 10:40
Lettre à Regina Ruben

Lettre à Regina Ruben

La prison de Barnimstr. qu'elle vient de quitter.

La prison de Barnimstr. qu'elle vient de quitter.

Cher camarade Westphal

Südende, Lindenstrasse 2

25.02.1916

 

Je ne sais pas comment vous remercier, vous et tous les camarades de Mariendorf pour les preuves d’amitié et de gentillesse que vous m’avez données lors de ma libération. Tout cela m’a rendue très confuse. Je n’ai jamais osé rêver d’un tel accueil, car la prison me semble faire tout naturellement partie de notre métier de combattants prolétariens de la liberté, et la Russie m’a habituée à considérer qu’entrer et sortir de ces murs est une affaire des plus banales. Certes, je le sais, ma personne n’était pas en cause dans tout cela, ce fut l’occasion d’exprimer notre combativité commune. Dans cette optique, l’accueil cordial de tant de camarades me fut une grande joie car, là-dessus, nous sommes tout à fait d’accord. Je suis sortie de prison animée du plus ardent et du plus impatient des désirs de combattre et de travailler, et j’espère ne pas décevoir les espérances que vous placez en moi. Notre cause doit progresser malgré tout ; j’ai beaucoup d’espoir et de bonne volonté. Mes meilleurs vœux à vous et à tous les camarades de Mariendof. Votre Rosa Luxemburg

 

Dans rosa luxemburg, j’étais, je suis, je serai ! correspondance, 1914-1919, textes réunis, traduits et annotés, sous la direction de georges haupt, par gilbert badia et irène petit, claudie weill, Maspero, 1977, P. 121).

 

A Regina Ruben

Südende, Lindenstrasse 2

25.2.[19]16

 

Chère camarade, je vous remercie de tout cœur de vos paroles d’amitié à l’occasion de ma libération. Je suis rendue à la “liberté” en éprouvant une grande envie de travailler et j’espère ne pas vous décevoir, vous et d’autres camarades. Avec mes sentiments les meilleurs »

 

Dans rosa luxemburg, j’étais, je suis, je serai ! correspondance, 1914-1919, textes réunis, traduits et annotés, sous la direction de georges haupt, par gilbert badia, irène petit, claudie weill, Maspero, 1977, P. 121/122).

 

 

 

A Clara Zetkin,   le 28 février 1916

 

Très chère Clara,

 

J’étais tellement bousculée que je n’ai pas eu le temps de t’écrire plus tôt quelques lignes. On m’a réservé un accueil qui m’a tellement stupéfiée et remplie de confusion. A la prison, il y avait plus de mille personnes, des femmes pour la plupart, et ici mon appartement était transformé en jardin floral et en dépôt de victuailles. J’étais littéralement pétrifiée …

 

Dans rosa luxemburg, j’étais, je suis, je serai ! correspondance, 1914-1919, textes réunis, traduits et annotés, sous la direction de georges haupt, par gilbert badia, irène petit, claudie weill, Paris, Maspero, 1977, Note 8, P. 123/124).

 

A Clara Zetkin,  9 mars 1916

 

[…] Tu as sans doute déjà appris de quelle façon les camarades berlinoises m’ont accueillie. A plus de mille, elles sont venues me prendre à la sortie, et puis elles sont arrivées en masse chez moi, dans l’appartement, pour me serrer la main. Mon appartement était et est encore bourré de leurs cadeaux : des jardinières de fleurs, des gâteaux, des cakes, des boites de conserve, des sachets de thé, du savon, du cacao, des sardines, des légumes très recherchés – comme dans une épicerie fine -, tout cela, ces pauvres femmes, ces femmes de cœur, l’ont préparé elles-mêmes, l’ont mis en conserve elles-mêmes, l’ont apporté elles-mêmes. Tu sais bien ce que j’éprouve quand je vois ça. J’en sangloterais de confusion et ce qui me console, c’est uniquement la pensée que, dans ce cas, je ne suis rien d’autre que le mât auquel elles ont accroché le drapeau de leur enthousiasme pour la lutte en général. A Mariendorf eut lieu ensuite la réception au cours de la soirée de lecture : de nouveau un énorme bouquet sur la table – et ces visages, et ces yeux sérieux et brillants ! Tu aurais éprouvé dans ton cœur de la joie à voir ces femmes. Le président me salua en déclarant que la manifestation du 18 avait tout à fait été spontanée, organisée sur la propre initiative des femmes de Berlin pour saluer « celle qui nous a manqué  parce qu’elle dit carrément leur fait aux dirigeants du parti, parce qu’elle est la femme qu’on préfère dans les hautes sphères du parti, voir entrer en prison qu’en sortir […] »

 

Je crois qu’en gros, je me suis mise au courant : je peux simplement te dire que je suis très satisfaite de voir où en sont les choses. […] Je trouve qu’au bout d’un an un énorme pas en avant a été fait pour ce qui est de la clarification, du renforcement des différences idéologiques […] Pour l’essentiel, tu peux être tranquille. Quant à moi, je fais confiance avant tout à la logique objective de l’histoire qui accomplit infatigablement son travail d’éclaircissement et de différenciation. […]

 

 

Dans rosa luxemburg, j’étais, je suis, je serai ! correspondance, 1914-1919, textes réunis, traduits et annotés, sous la direction de georges haupt, par gilbert badia, irène petit, claudie weill, Paris, Maspero, 1977, P. 123/124).

Georg Grosz., Südende 1918. Le quartier où habite Rosa Luxemburg vu par le grand dessinateur.

Georg Grosz., Südende 1918. Le quartier où habite Rosa Luxemburg vu par le grand dessinateur.

Partager cet article
Repost0
23 janvier 2016 6 23 /01 /janvier /2016 00:09

Nos recherches sur le net nous avaient permis de trouver ce document aussi émouvant que significatif. Le blog a consacré de nombreux articles à Hans Diefenbach.

 

Hans Diefenbach a rédigé ce testament à Domrémy, sur le front où il était  médecin militaire. Il léguait ainsi  les 50 000 Mark dont il avait hérité de son père à Rosa Luxemburg. Le texte témoigne "des qualités humaines et sociales des deux personnes", comme le dit l'auteur de l'article, Joachim Lachmann. "Ce testament est si caractéristique", que le libellé parle de lui-même." Le testament se trouve aux Archives de Land de Berlin dans le fonds Rosa Luxemburg du tribunal adminstratif de Tempelhof-Kreuzberg. L'article s'appuie sur celui de Joachim Lachmann que l'on peut lire ici

Hans Diefenbach

Hans Diefenbach

Testament de Hans Diefenbach

 

Je lègue à mon amie Rosa Luxemburg, domiciliée Lindenstr. Berlin-Südende 50 000 M, avec cependant la clause suivante : la somme susdite doit être administrée par une instance adéquate, par exemple par ma sœur, et les intérêts doivent être versés régulièrement chaque année à l'héritière jusqu'à sa mort. Je prends cette décision, car ma merveilleuse amie, pour ce qui concerne l'économie privée ne montre peut-être pas autant de génie qu'en économie politique. Dépenser de manière impulsive cette somme pour un quelconque usage politique momentané ne correspondrait pas aux vœux de mon père, ni à celui de son héritier, qui ne se sent que comme le simple administrateur de cette somme et non comme son propriétaire. Mais je demande à mon amie Rosa Luxemburg de prendre des dispositions pour que si elle décède, cette somme de 50 000 M soit utilisée pour nos grands idéaux politiques, sociaux et philanthropiques. Elle doit bénéficier pleinement du droit à disposer de ses biens pour son testament. Je la prie de s'attacher à utiliser la somme annuelle versée dans le sens que je souhaite, et de considérer que pour moi a été toujours essentiel non seulement nos idées communes, mais aussi son bien-être corporel. Elle doit utiliser cette rente annuelle non pas, comme son penchant naturel l'amènerait à le faire, pour des personnes dans le besoin, mais en premier lieu pour elle-même.

 

Signé Hans Diefenbach"

 

L'article précise, comme nous le savons trop bien, que Rosa Luxemburg ne profitera jamais de ce legs. Ce sont ses héritiers qui recevront en 1927 une somme très largement réduite.

 

Dans ses condoléances adressées à la sœur de Hans Diefenbach, Rosa Luxemburg écrivait:

 

"Hans dépassait tous les hommes que je connais par sa noblesse, sa pureté et sa bonté. Et il ne s'agit pas là pour moi  de  la  tendance courante qui consiste à dire du bien des morts ... J'ai perdu dans le  même temps  l'ami le plus cher, qui plus que tout autre comprenait et partageait chacun de mes états d'esprit, chacun de mes sentiments. En musique, en peinture comme en littérature qui étaient pour lui comme pour moi essentielles à la vie, nous avions les mêmes Dieux et faisions les mêmes découvertes."

 

Traduction Dominique Villaeys-Poirré. Merci des améliorations que vous pourriez apporter.

Le texte original en allemand

 

"Meiner Freundin Dr. Rosa Luxemburg, Berlin-Südende, Lindenstr. vermache ich 50 000 M jedoch mit einer Klausel: Die genannte Summe soll von irgend einer entsprechenden Instanz z.B. von meiner Schwester verwaltet und der Erbin der jährliche Zins bis zu ihrem Tode regelmäßig ausgezahlt werden. Ich treffe diese Bestimmung, da meine ausgezeichnete Freundin in der Privatökonomie vielleicht keine ganz so geniale Meisterin ist, wie in der National-Ökonomie. Ein impulsives Ausgeben der genannten Summe für irgend einen momentanen politischen Zweck läge nicht im Sinne meines Vaters, des Erwerbers des Geldes, als dessen bloßer Verwalter ich mich eigentlich fühle, nicht als dessen gemeiner Besitzer. Wohl aber bitte ich meine Freundin Rosa Luxemburg für den Fall ihres Ablebens eine Bestimmung zu treffen, wie die genannte Summe von 50 000 M als dann für unsere gemeinschaftlichen großen politisch-sozialen und philanthropischen Ideale zweckentsprechend verwendet werden sollen. Das Bestimmungsrecht hierüber soll ihr für ihr Testament vollkommen zustehen. Die jährlich ausgezahlte Zinssumme bitte ich sie sorglich in meinem Sinne zu verwenden und dabei vor allem zu berücksichtigen, daß nicht bloß die Gemeinschaft unserer Ideen, sondern auch ihr eigenes körperliches Wohlergehen stets eine nahe Herzensangelegenheit gewesen ist. Sie soll also die jährliche Rente nicht bloß, wie dies ihrem großartigen Natürel entspräche, für andere bedürftige Leute sondern in erster Linie für sich selbst verwenden.
gez. Hans Diefenbach."

 

Les articles sur le blog
comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com Parmi les plus grandes absurdités de cette guerre dite de 14/18, il y aura la mort de ceux qui ont passé leur teur vie à lutter contre cette montée de la guerre et que le ralliement des sociaux-démocrates envoient...
24/04/2010
 
comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com De l'absurdité totale de la guerre. Le destin de Hans Diefenbach, ami très proche de Rosa Luxemburg qui comme elle a combattu contre la guerre, en est une illustration forte. Il est le symbole de tous ces militants...
23/08/2010
 
Nos recherche sur le net nous ont permis de trouver ce document aussi émouvant que significatif. Le blog a consacré de nombreux articles à Hans Diefenbach. Hans Diefenbach a rédigé ce testament à Domrémy, sur le front où il était médecin militaire. Il...
03/08/2015
 
comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com "Parlons maintenant de Hannes, de notre cher Hannes, de ce jeune homme tendre et pur, comme il n'y en a pas deux dans le monde ... Voilà l'idée qui me vient à l'esprit: quand je serai libre et si le monde est...
20/06/2010
 
"Nous croyons les mésanges charbonnières et moi au printemps à venir." Les 13 textes ont été choisis par Françoise Beurrey et sont lus à plusieurs voix avec simplicité et conscience. A écouter réellement.. . Extrait du texte lu au procès en février 1914...

19/06/2015

 

 

 

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com "Des lendemains qui saignent" ne pouvait qu'être mis à l'honneur sur un blog consacré à Rosa Luxemburg. Album+CD, spectacle, il est la plus pure expression et justification à 100 ans de distance, de ce qui...

03/04/2010

 

 

Le legs de Hans Diefenbach à Rosa Luxemburg. "Car ma merveilleuse amie, pour ce qui concerne l'économie privée ne montre peut-être pas autant de génie qu'en économie politique ... ". Un document unique.
Partager cet article
Repost0
4 septembre 2015 5 04 /09 /septembre /2015 18:44
Pour consulter le blog: comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog

Publié le 14 juillet 2008 pour la première fois sur le blog

Sur le site MIA, cette biographie courte mais où l'on trouve les principaux moments d'une vie militante : création du parti social-démocrate de Pologne et de Lituanie, lutte contre le réformisme, lutte contre la guerre, participation à la révolution en Allemagne.
 

 

 

(1871–1919) Militante polonaise, fondatrice du SDKPiL (Parti Socialiste de Pologne et de Lithuanie). Emigre pour suivre ses études et s'intalle à Berlin. Elle sera en Allemagne la dirigeante incontestée de la gauche du SPD. A ce titre, elle dirige la lutte qui s'engage contre le révisionnisme montant dans la social-démocratie et théorisé par E. Bernstein. En août 1914, elle est opposée au vote des crédits de guerre et s'engage dans le processus de regroupement menant en 1915 à la fondation de la ligue Spartakiste, qui se transformera en KPD (1918). Incarcérée durant la guerre pour son activité. Dirigeante de la révolution allemande de 1918/19. Assassinée après son arrestation, suite à l'échec de la tentative d'insurrection de janvier 1919.

https://www.marxists.org/francais/bios/luxemburg.htm
 
Photographie : Avec Klara Zetkin et Luise Kautsky
 

 

Partager cet article
Repost0
24 mars 2015 2 24 /03 /mars /2015 21:11
Rosa Luxemburg en mars 1915 (inédit)

A lire sur Comprendre avec Rosa Luxemburg 2 :

Rosa Luxemburg en mars 1915. Premier mois de prison, anniversaire, narcisse, organisation du quotidien carcéral, conscience: "De manière générale, je suis de bonne et confiante humeur, l'histoire travaille véritablement pour nous." Lettre à Marta Rosenbaum (Inédit en français)

http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/

5 mars 1915, Anniversaire de Rosa Luxemburg. Cela fait 3 semaines qu'elle a disparu de la circulation comme elle aime à le dire pour désigner par un euphémisme son arrestation. De ce mois de mars 1915, nous n'avons que deux lettres, adressées à deux femmes d'exception Marta Rosenbaum et Mathilde Jacob qui auront su les sauver. Deux lettres qui font partie de ce quotidien très partiellement traduit mais qui nous éclaire sur ce qui a été vécu et comment par Rosa Luxemburg, et qui nous en dit tant sur sa personnalité, sa pensée, son action. Ces lettres de prison ne figurent pas dans l'ouvrage paru sous le titre "Lettres de prison" car celui-ci regroupe celles écrites à Sonia Liebknecht lors de sa deuxième arrestation pendant la guerre, c'est-à -dire à partir de juillet 1916.

La lettre à Marta Rosenbaum est sortie illégalement de la prison comme on le comprend dès le début de la lecture. On y découvre la prison et la transgression des règles par la prison elle-même devant la solidarité exprimée lors de son anniversaire. Sa réaction à son arrestation aussi brutale qu'inattendue. L'allusion aux plans, dont on sait qu'ils comprenaient la sortie de l'Internationale et la construction du courant contre la guerre. L'organisation de son quotidien autour du travail. La pudeur et l'humour sur ses conditions de vie et sa santé. La vivacité de ses analyses sur les militants socialistes: dans celle-ci Haase qui avait protesté dans un discours au Parlement contre la suppression de droits fondamentaux de la classe ouvrière. L'importance de Liebknecht. Son sentiment que "l'histoire travaille" pour les buts qu'elle défend. ...

Cliquer sur le lien pour lire cet article, la lettre à Marta Rosenbaum ainsi que deux moments d'émotion : l'information sur l'herbier de Rosa Luxemburg et le document attestant de la mort en déportation de Marta Rosenbaum.

Partager cet article
Repost0
2 juin 2014 1 02 /06 /juin /2014 12:42

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

A lire sur le site http://www.marxists.org/francais/frolich/works/1939/00/luxemburg.htm

12.05.2014 


Paul Frölich

 

 En 1889, Rosa, âgée de 19 ans, quitte Varsovie pour Zurich.


De Varsovie à Zurich, c'était le chemin qui menait de la prison de l'absolutisme au pays le plus libre de l'Europe, des fonds les plus couverts et les plus empoisonnés aux hauteurs où l'air était frais et la vue étendue. Zurich était le point de rassemblement le plus important de l'émigration polonaise et russe ; son Université était une école supérieure pour de jeunes révolutionnaires. C'étaient pour la plupart des êtres qui, malgré leur jeunesse, avaient déjà connu de sérieuses expériences de la vie, vécu en prison, souffert dans l'émigration et qui s'étaient arrachés à leurs familles et aux sphères sociales dans lesquelles ils étaient nés. Ils vivaient loin de la jeunesse étudiante bourgeoise dont le but était de s'assurer une place dans la vie. Ces jeunes émigrés travaillaient sérieusement dans leurs spécialités, mais ils pensaient moins au pain de l'avenir qu'à l'avenir de l'humanité. Dans cette colonie, hommes et femmes étaient égaux. Des conceptions libres y régnaient, mais aussi une morale fortement ascétique. Il leur manquait beaucoup de choses et il y avait une solidarité naturelle dépourvue de pathétisme. Ces étudiants ne tuaient pas le temps dans des beuveries. Ils discutaient infatigablement et sans fin sur la philosophie, le darwinisme, l'émancipation de la femme, sur Marx, Tolstoï, le sort de l'obstchina, ce reste du communisme agraire en Russie, sur les perspectives et la signification historique du développement capitaliste en Russie, sur les résultats de la terreur de la « Volonté du peuple », sur Bakounine et Blanqui et les méthodes de la lutte révolutionnaire, sur la démoralisation de la bourgeoisie occidentale, sur la chute de Bismarck et la lutte victorieuse de la social-démocratie allemande contre la loi d'exception, sur la libération de la Pologne, sur les enseignements de Lavrov et de Tchernichevsky, sur la « trahison » de Tourgueniev dans son roman Pères et fils, sur Spielhagen et Zola, sur mille « questions » et toujours sur le même thème, la révolution. Peu de pain et beaucoup de thé, des mansardes froides remplies de fumée de cigarettes, échauffaient les têtes, provoquaient de grands gestes, des exagérations et du romantisme. De cette jeunesse, beaucoup devaient disparaître dans les prisons du tsar et dans les lieux perdus de Sibérie. D'autres étaient destinés, après la griserie de l'émigration suisse, à devenir dans un coin de la Russie des fabricants, des avocats, des médecins, des professeurs, des journalistes, qui soutenaient l'Etat. Peu d'entre eux devaient vivre et agir dans les tempêtes révolutionnaires dont ils rêvaient tous.


Rosa Luxemburg ne se mêla qu'à la périphérie de cette bohème d'émigrés. Elle avait un rire moqueur pour ces débats qui ne menaient à rien. Elle était avide d'une soif de travail. Elle logeait dans la famille du social-démocrate allemand Lübeck. Il se faisait péniblement un chemin comme écrivain. Il accrut les connaissances de Rosa dans le mouvement ouvrier allemand, et elle l'aida dans son travail littéraire, écrivant même à l'occasion un article à sa place. Elle dirigea bientôt la maison quelque peu stupéfiée de Lübeck.


A l'Université de Zurich, Rosa Luxemburg s'inscrivit tout d'abord aux sciences naturelles. Elle avait plus que de l'intérêt, presque de la passion, pour le monde des plantes et des oiseaux qui resta, pendant toute sa vie, un refuge quand elle cherchait une détente des combats. Mais sa vocation était la politique, et bientôt elle passa à l'élude des sciences politiques. L'enseignement officiel de l'Université ne pouvait lui offrir grand-chose... Le titulaire de la chaire d'économie politique, à Zurich était Julius Wolf. C'était le type du professeur allemand, qui travaillait avec un soin infatigable une quantité de matériaux divers, mais restait un éclectique et ne pouvait se résoudre à une conception et à une description unique et d'ensemble de la société. Mais Rosa Luxemburg recherchait constamment une synthèse en conclusion de la connaissance. Elle étudia intensivement les classiques Smith, Ricardo, Marx, et y acquit un mépris profond pour le professeur allemand, le « bureaucrate théorisant qui déchiquetait le tissu vivant de la réalité sociale en menus fils et particules, les regroupait et les étiquetait selon des points de vue bureaucratiques et les livrait ainsi tués comme un matériel scientifique pour l'activité administrative et législative des conseillers d'Etat ». Elle ne put renoncer à faire sentir au brave professeur la supériorité qu'elle avait bientôt acquise. Son ami et camarade d'études Julian Marchlewski a décrit dans des souvenirs (malheureusement non publiés) comment l'esprit moqueur des jeunes étudiants rendit difficile la vie du professeur Wolf. Ils préparaient avant les exercices de petits complots. Des questions étaient établies qui se trouvaient soumises en toute innocence, au maître. Lorsque Wolf s'était irrémédiablement embrouillé, Rosa se levait et démontrait sur chaque point l'insuffisance professorale1. Julius Wolf semble avoir pris ce méchant jeu avec l'humour nécessaire : dans une esquisse autobiographique, il se souvient de sa meilleure élève avec une grande appréciation.


Outre ses études, Rosa Luxemburg militait dans le mouvement ouvrier zurichois et participait à la vie fortement intellectuelle des sommets de l'émigration politique. Elle se lia aux dirigeants marxistes russes, à Paul Axelrod, le Nestor de la social-démocratie russe alors encore embryonnaire, à Véra Zassoulitch et à Georges Plekhanov, le plus brillant disciple de Marx de l'époque. Elle le regardait avec émerveillement mais songeait cependant à préserver sa personnalité envers lui. Elle connut Parvus-Helphand qui étudiait à Bâle et dont elle se sentait proche de sa fantaisie productive vivante, de son réalisme politique et de sa puissante activité. Elle était plus étroitement liée à quelques camarades d'études qui avaient déjà gagné leurs galons dans le mouvement socialiste polonais et qui restèrent fermement à ses côtés jusqu'à la mort de Rosa ; parmi eux se trouvaient notamment Julien Marchlewski-Karski et Adolphe Warszawski-Warski.


De la plus grande importance pour son développement intellectuel et politique ainsi que pour sa vie personnelle, fut Leo Jogiches, qui arriva à Zurich en 1890. La vie de cet homme extraordinaire qui joua un rôle éminent dans les mouvements ouvriers polonais et russe, et qui, finalement, devait se trouver et mourir à la tête du Spartakusbund en Allemagne, est restée dans l'obscurité de la conspiration même pour le petit nombre de personnes qui travaillèrent avec lui. L'homme taciturne ne parlait jamais de son passé. On ne savait ainsi rien de sa jeunesse. Le peu qui en a été connu provient presque exclusivement de Z. Rejzin qui a fait des recherches sur les débuts politiques de Jogiches chez les compagnons de jeunesse de celui-ci.


Né en 1867 à Vilna, Leo Jogiches provenait d'une riche famille juive. Le grand-père était connu comme un grand talmudiste, mais son père était émancipé intellectuellement et fortement russifié. Dans la famille on parlait à peine le yiddisch. Dès le collège, Leo commença à faire de la propagande révolutionnaire parmi ses camarades. Il quitta tôt l'école pour se consacrer entièrement au travail politique. En 1885 il fonda les premiers cercles révolutionnaires de Vilna. Le bundiste A. Gordon voit en lui le premier dirigeant et le réel fondateur du mouvement ouvrier de Vilna. Certes les groupes étaient encore très faibles, car il n'y avait que peu d'ouvriers et le déclin de la « Narodnaïa Volia » avait fortement émoussé les aspirations oppositionnelles dans la jeunesse intellectuelle. Et pourtant, de ce petit mouvement de Vilna sortit toute une série de dirigeants connus. Charles Rappoport, qui s'est fait un nom de théoricien dans le Parti socialiste de France, y appartint ; de même Pidulski, le futur dictateur polonais. Le frère de Lénine, qui fut pendu en 18912 comme membre de l'organisation terroriste russe « Narodnaïa Volia », avait eu de Petersburg des liaisons avec les cercles d'étudiants de Jogiches. Parmi ses membres, Jogiches jouissait d'une grande considération. Un de ses élèves dit : « C'était un débatteur capable et intelligent, en sa présence on sentait toujours qu'on n'avait pas affaire à un homme quelconque. Il dévoua toute sa vie à son œuvre de socialiste et ses élèves l'adoraient ». Avec la plus grande sévérité, il se contraignit à faire ce qu'il considérait nécessaire pour le travail révolutionnaire. Il dormait sur le dur parquet, pour être prêt pour la planche de la prison. Il devint serrurier dans un atelier. Non en raison de cette aspiration à l'autohumiliation des générations précédentes de révolutionnaires qui « allaient au peuple », mais pour mieux comprendre les ouvriers et pouvoir agir plus fortement sur eux. En même temps il chercha à toucher les militaires et organisa un cercle d'officiers russes. Très tôt, il développa le penchant à la plus stricte conspiration qui devait dominer toute sa vie. Il apprit le métier de graveur et de compositeur d'imprimerie. Il se soumit à la plus sévère discipline et l'imposa à ses camarades de lutte dont il exigeait la plus stricte observation des règles de conspiration. Il apprit énormément, devint le maître de ses camarades, et exigeait d'eux qu'ils étudient avec avidité. Karl Radek raconta plus tard comment Leo, au milieu des tourbillons de la révolution de 1905, l'obligea à travailler de vieux écrivains, dont les noms étaient à peine connus.


Il fut bientôt soupçonné par la police, arrêté pour la première fois pendant l'automne 1888 et enfermé dans la citadelle de Vilna. Il fut enfermé à nouveau de mai à septembre 1889, et après sa libération, resta encore sous la surveillance de la police. Il devait alors faire son service. Il considéra que, suspect politique, il n'aurait aucune possibilité d'agir dans l'armée. Il craignait aussi son propre tempérament. Au lieu de rassemblement des conscrits, il se décida à fuir. On dit qu'il fut emmené de la ville dans une voiture, couvert d'une couche de glaise. Il arriva en Suisse pendant l'hiver de 1890.


Il disposait de moyens importants qu'il mit à la disposition de la propagande socialiste. Il proposa à Plekhanov la fondation d'un périodique et celui-ci accepta la proposition avec joie, car ce périodique pouvait devenir le levier pour un véritable mouvement social-démocrate en Russie, et Plekhanov aurait pu finalement être libéré de la pénible corvée pour gagner son pain (il gagnait sa vie à écrire des adresses) et déployer ses grands dons de savant et de propagandiste. Un accord se fit, mais fut aussitôt rompu sur la question de qui serait le chef politique de la publication. Plekhanov avait une bonne dose d'autoritarisme, et comment pouvait-il laisser cette arme importante à un riche jeune homme qui avait encore à faire ses preuves ? Mais Leo Jogiches connaissait sa propre valeur et ne pouvait laisser son travail en des mains étrangères ni se subordonner ; il était lui-même dominateur jusqu'à la tyrannie. Il abandonna donc le mouvement pan-russe et se lança entièrement dans le mouvement polonais, dont il devint aussitôt le dirigeant et l'organisateur incontesté, une personnalité ne trouvant à égalité à côté des grands dirigeants ouvriers russes.


Peu après son arrivée à Zurich, il rencontra Rosa Luxemburg, et d'un travail commun sortit bientôt un lien entre leurs existences. Ce lien semble surprenant entre la joyeuse Rosa, avec son tempérament tempétueux et les riches dons de son génie qu'elle dépensait prodiguement, et ce Leo, dont la dureté et la discipline constituaient l'être qui ne connaissait pour lui et les autres que le devoir, le devoir jusqu'à la pédanterie, qui de sang-froid se sacrifiait et sacrifiait d'autres à la cause et qui ne laissait percevoir qu'à de rares moments fugitifs la profondeur de ses sentiments. Dans les tâches de la vie, pour tous deux cette opposition, dans la disposition et l'être, constitua le plus grand stimulant, et c'est un témoignage de la grandeur des deux caractères que cette union put durer sans qu'ils ne se détruisent l'un l'autre, mais au contraire qu'ils en accrurent leurs forces. Clara Zetkin, qui s'est trouvée la plus proche d'eux deux, témoigne que Leo Jogiches fut le juge critique incorruptible de Rosa Luxemburg et de son œuvre, sa conscience théorique et pratique, parfois celui qui voyait le plus loin et était le plus stimulé, pendant que Rosa restait celle qui voyait de façon la plus profonde et saisissait le mieux. Et c'est une profonde vérité que Clara Zetkin exprima sur Jogiches en ces termes : « Il fut une de ces personnalités masculines aujourd'hui rares qui peuvent supporter prés d'eux, dans une camaraderie fidèle et heureuse, une grande personnalité féminine, sans ressentir la croissance et le devenir de celle-ci comme une chaîne pour son propre ego ». Cette camaraderie ne subit également aucun dommage dans les années ultérieures, lorsque les sentiments de l'un pour l'autre furent atténués.


Beaucoup du meilleur de Jogiches est certainement inclus dans l'œuvre de la vie de Rosa Luxemburg. On ne peut délimiter cette partie. Nous ne savons également pas lequel des deux donna les impulsions et les secousses décisives pour l'image politique qu'ils formèrent alors et qui détermina leur action ultérieure. Mais si Leo se força à rester à l'arrière-plan, et ainsi à renoncer consciemment à sa part devant l'opinion publique, l'assurance de Rosa dans les questions théoriques-scientifiques montre qu'elle était dans ce domaine la plus forte, celle qui dominait, la plus créatrice.

 

Notes

 

1 Peut-être Frölich fait il référence à l'article de Marchlewski A la mémoire de Rosa Luxemburg et de Leo Tyszka (Jogiches), qui contient le passage suivant :


« Elle se distinguait non seulement par des connaissances solides, mais par une dialectique brillante qu'elle faisait valoir dans ses fréquentes discussions avec le professeur d'Economie politique, Julius Wolf, adversaire résolu du marxisme. Nous préparions tout simplement ces discussions : j'amenais tout doucement l'honorable professeur sur ce sujet glissant, puis, disposant de toutes les armes du marxisme, nous lui prouvions qu'il n'y comprenait pas un traître mot. Nous devons rendre cette justice à l'Université de Zurich que malgré notre propagande elle ne s'opposa aucunement à notre obtention du doctorat. » (Note de la MIA)

 

2 En fait en 1887 (note de la MIA).

 
Partager cet article
Repost0
5 novembre 2012 1 05 /11 /novembre /2012 10:22

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

On imagine mal, bien que l'on pense connaître de mieux en mieux les lettres de cette période, la violence qu'a connue Rosa Luxemburg durant toutes ces années. On s'habitue trop à héroïser les personnes, à mettre entre elles et nous une sorte de voile historique qui empêche de saisir les faits et les personnes. Alors ici un instant de la vie de Rosa Luxemburg en prison qui montre la violence jamais démentie du pouvoir à son encontre.


22 septembre 1916. Rosa luxemburg est à la prison des femmes de Berlin. Elle reçoit la visite de Mathilde Jacob. Un policier est présent pour surveiller la conversation. Au bout de dix minutes, il prétend interrompre la visite. Rosa Luxemburg se révolte. Le malheureux policier qu'elle aurait traité de misérable espion (ce qu'elle reconnaît) et à la tête duquel elle aurait lancé un objet (ce qu'elle nie), se voit bien sûr agressé et injurié. Résultat: une plainte qui se soldera par une condamnation à 10 jours de prison. Et un transfert brutal vers une prison plus dure.


N'est-il pas important de comprendre cette violence à laquelle Rosa Luxemburg  a été confrontée en permanence, la violence d'un système qui ira jusqu'à son assassinat et à l'assassinat de toute vélléité révolutionnaire en janvier 19 ? ...

 

Partager cet article
Repost0
24 juin 2012 7 24 /06 /juin /2012 10:48
Le blog présente dans l'une de ses catégories des lettres de Rosa Luxemburg. Nous donnons à nouveau le lien. Correspondance et biographie

Car cela a constitué le principe même de la démarche du blog. Lier les textes, l'action de Rosa Luxemburg à ce que l'on apprend et comprend du contexte dans lequel ils ont existé il y a chez Rosa Luxemburg, une unité si complète entre vie, sensations,sentiments, pensée, action et c'est ce qui s'exprime, dans toute son humanité et son engagement, dans les courriers adressés à chacun.
Ci-dessous une de ses lettres de prison écrite à Sonia Liebknecht.

prison.jpg

Sonitschka, nous avons actuellement de merveilleuses soirées; on se croirait au printemps. Vers quatre heures, je descends dans la cour, la nuit vient, et je vois l'affreux décor de ma vie s'estomper sous le voile merveilleux de l'obscurité; le ciel, au contraire, est d'un bleu clair, lumineux et une lune d'argent se découpe au-dessus des toits. Tous les jours, à cette heure, des centaines de corneilles passent au-dessus de la cour en vol dispersé et se dirigent vers les champs qui leur donnent asile ...

Elles mettent chaque jour tant de sérieux et de solennité à suivre la voie que leur trace l'habitude que j'éprouve une sorte de respect pour ces grands oiseaux et je les suis du regard jusqu'au dernier. Ensuite, je vais, de-ci, de-là, dans l'obscurité et je vois les prisonniers qui s'affairent encore dans la cour, glissant comme des ombres décisives. Je me réjouis de rester invisible, seule avec ma rêverie, échangeant des saluts à la dérobée avec les corneilles qui passent; il fait si bon dans la douceur de l'air printanier. Puis les prisonniers chargés de lourds chaudrons (la soupe du soir) traversent la  cour et pénètrent dans le bâtiment, deux par deux, au pas, dix couples l'un derrière l'autre; c'est moi qui ferme la marche. Les lumières s'éteignent peu à peu dans la cour et les bâtiments de l'économat. Je rentre, et les portes sont fermées, verrouillées à double tour; la journée est finie. J'ai une sensation de bien être malgré la mort de Hans. A vrai dire, je vis dans un monde de rêve où il n'est pas mort. Pour moi, il est toujours présent et souvent je lui souris quand je pense à lui ...

Votre Rosa


Prison de Breslau, le 21 novembre 1917


Editions bélibaste, 1969, Rosa Luxembourg, lettres de prison, P 49/50 , traduction Michel Aubreuil

« Mort à la guerre ». Lettre de Rosa Luxemburg à Sonia Liebknecht après la mort de son frère.
Extrait d’une lettre de Rosa Luxembourg à Sonia Liebknecht ... Après un parloir.
Lettre de Rosa Luxemburg à Sonia Liebknecht, le jour de la condamnation de Karl Liebknecht
Rosa Luxemburg, lettres à Sonia Liebknecht: "Pendant des années, j'ai tout supporté avec beaucoup de patience"


Partager cet article
Repost0
24 juin 2012 7 24 /06 /juin /2012 10:26

 comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

 

Ce travail du blog s'appuie sur la correspondance publiée par la maison d'édition Dietz Verlag et sur l'index des noms présent à la fin de chaque tome. Il répond à un intérêt constant pour cette femme médecin dont témoignent les visites régulières, sur le blog, de lecteurs à la recherche d'informations.

 

Il y a peu d'indications directes dans la correspondance de Rosa Luxemburg concernant Hope Bridges Adams-Lehmann.

 

Elles concernent essentiellement Clara Zetkin.

Mara, la fille d'otto Walther et de Hope Bridges Adams-Lehmann.


En prison, elle témoigne cependant de sa profonde tristesse à l'annonce de sa mort..

 

portrait_1.jpg

 

D'autre part, il faut mettre à part les indications, quelque peu désobligeantes, à propos d'une caricature de Rosa Luxemburg qui a donné lieu semble-t-il, à un article de Hope Bridges Adams-Lehmann. Dans la mesure où cela atteint Rosa Luxemburg qui souhaite adopter dès cette époque une attitude essentielle à ses yeux: le refus de se laisser entraîner sur des terrains qui ne sont pas les siens, attaques antisémites, sexistes, personnelles. Rosa Luxemburg se voit lors de cette affaire confrontée à l'intérêt démesuré que porte en particulier Bebel à cette caricature. Intérêt qu'elle refuse de toutes ses forces. C'est dans ce contexte qu'il faut voir les indications dans sa correspondance concernant l'article de Hope Bridges Adams-Lehmann.

 

(Traductions de c.a.r.l. le 9 avril 2012. Nous apprécions toute amélioration de la traduction)


Tome 1 - Dietz Verlag (1982)

 

A Leo Jogiches - Friedenau, le 27 novembre 1899 - P 410

... Maintenant, je ne sais pas si cela s'inscrit dans ce contexte ou non, mais un article est paru dans la "Münchner Post, qui critique fortement cet article imbécile du "Süddeutscher Postillon" et qui est écrit de manière assez bête, apparemment par cette Lehmann"

 

A Leo Jogiches - Friedenau, le 28 novembre 1899 - P 411 

... J'ai reçu hier une longue lettre de Bebel, avec la réplique concernant la polémique de Lehmann (je t'envoie les deux articles) et dans laquelle il me demande instamment de répondre au Münchner Post. Le pauvre vieux, il prend vraiment ce truc au sérieux. Naturellement, je lui ai écrit, que je ne peux pas m'inscrire dans cette "polémique" et pourquoi ....

 

(A propos de cette caricature, on peut lire d'autres indications: P 410,P 414, P 419, P 427, P 509, P 548, P 594, P 600)

 


Tome 2 - Dietz Verlag (1982)

 

A Clara Zetkin - Friedenau, le 29 avril 1907 -  P 288

... Ne veux-tu pas d'abord te faire examiner une fois sérieusement avant de penser à Nauheim. August [Bebel] a dit en s'appuyant sur une lettre de Hope que tu devrais te faire examiner à Munich par un spécialiste ...

 

A Kostia Zetkin - Friedenau, le 24 septembre 1907 - P 308

... Luise m'a raconté que Mara venait bientôt (je crois le 1er octobre) et qu'elle allait s'installer chez August [Bebel]. Tu auras donc de la compagnie (jusqu'au Nouvel an). J'ai rêvé aujourd'hui qu'elle avait fait ta conquête et que venais me l'annoncer ...

 

A Kostia Zetkin - Friedenau, le 4 avril 1908 - P 312

Ce que tu écris sur Mademoiselle M[ara], me fait rire. Vous trois, jeunes diagnostiqueurs, avec tout le respect dû à votre science, n'êtes pas encore des autorités reconnues, vous avez tendance à poser des diagnostics tragiques. Le fait est que votre mère a envoyé une longue lettre à August [Bebel] pour se plaindre d'elle. Elle ne veut pas travailler et n'est pas "correcte". Même constatation de la part de votre père qui se plaint du manque d'attention de votre mère. Conséquence, la mère interdit qu'elle aille à Berlin mais est prête maintenant à la laisser aller à Londres ou Leipzig (sous tutelle) La pauvre jeune fille cependant veut aller à Berlin. Elle me fait pitié, elle n'a qu'à prendre son indépendance et basta.


A Kostia Zetkin - Friedenau, le 6 avril 1908 - P 329

Chez la grand-mère[Minna Kautsky], il  y avait August avec Julie, les Ledebour et Mara. Et toute cette petite troupe grâce aux K[autsky] ,avait  parlé pendant tout ce temps de mon voyage et quand je suis arrivée, le plan était déjà prêt: Je partirais avec Mara à Nordrach! Tu te rends compte; quel sans-gêne! Naturellement, en deux mots, j'ai fait comprendre que je demande que personne ne s'occupe de moi et j'ai mis fin aux palabres. Ensuite, Hannes voulait absolument passer chez moi et a fait de multiples tentatives, mais Mara m'a accompagnée jusqu'à ma porte et il a dû repartir avec elle, ce qu'il fit à contre-coeur. J'étais très nerveuse et je ne me suis endormie que vers deux heures, je maudis l'Allemagne et étouffai de nostalgie, rêvant de Pampa,  un lieu sans bavardages, sans camarades et sans conversation sur la santé et les bains au bord de la Riviera.


A Kostia Zetkin - le 25 mai 1908 - P 342

A deux heures et demie est arrivée Mara et elle est restée toute l'après-midi.

 


Tome 4 - Dietz Verlag (1983)

 

A Kostia Zetkin - Berlin-Südende, le 30 mai 1912 - P 217

  ... Tu peux être complètement rassuré concernant votre mère, je sais par madame Lehmann, qui a parlé avec Hannes [Diefenbach], que les deux opérations sont absolument sans danger ....

 

A Clara Zetkin - Berlin-Südende, le 31 mai 1912- P 218 

... J'ai reçu avec la plus grande joie le télégramme de Maxim [un des fils de Clara Zetki] et la carte de Madame le Dr Lehmann ...


Tome 5 - Dietz Verlag (1984)

 

A Kostia Zetkin - Berlin, le 10 avril 1915 - P 54 - 55 

... Tu parles avec tant de tristesse de ces vacances de Paques; Niuniu, il ne faut pas que tu aies le coeur si lourd. La seule raison sérieuse serait l'état de santé de votre mère, mais j'espère que Hope [Adams-Lehmann] va s'occuper énergiquement  d'elle. Ecris-lui peut-être quelques mots, cela aura un effet très bénéfique. D'ailleurs, je ne veux pas encore croire sans preuve à une malformation cardiaque, les symptômes ressentis par votre mère étaient jusqu'à maintenant plutôt d'origine nerveuse. Demande à Hope de mettre son diagnostic par écrit, afin que nous sachions la vérité ...

 

A Mathilde Jacob - le 22 mai 1915 - P 60 

... Vous demandez que je confirme ce que j'ai reçu. Donc, j'ai reçu la petite lettre avec la triste nouvelle de la maladie de Madame le Docteur Lehmann ...

 

Lettre à Clara Zetkin - Wronke, le 29 novembre 1916- P 142

... Le décès de Hope m'a profondément bouleversée [note 169: le 15 octobre 1916]; elle est au sens propre morte de l'horreur ressentie après la mort de Carl [note 170: mort en 1915 dans un hôpital de campagne près de Valenciennes] : elle avait déjà décrit Hannes   comme un véritable cadavre vivant [ami proche de Rosa Luxemburg, médecin, mort au front] .

 

Lettre à Mathilde Jacob - Breslau, le 28 février 1918 - P 372 

... Je connais l'hommage à Madame Adams-Lehmann, je la  connaissais aussi, le portrait est très fidèle.

Partager cet article
Repost0

Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009