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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
6 mai 2025 2 06 /05 /mai /2025 12:20
Deux lettres de Karl Liebknecht présentées par C. Weil et G. Haupt (1969), sur la révolution russe et après son voyage aux Etats-Unis.

https://www.persee.fr/doc/alauj_0002-5712_1969_num_19_1_5913

Deux lettres inédites de Karl Liebknecht

sem-linkClaudie Weill sem-linkGeorges Haupt Allemagne d'aujourd'hui Année 1969 19 pp. 33-43 Référence bibliographique Haut du formulaire

 

Claudie Weill et Georges Haupt présentent deux lettres inédites de Karl Liebkneckt

En 1955, l’Institut de marxisme-léninisme de RDA a entrepris la publication des œuvres complètes de Karl Liebknecht : ses écrits, ses discours, ses lettres. Cette édition, pratiquement achevée, comporte déjà neuf volumes. (1) Cependant, quels que soient les efforts déployés dans les archives et dans les bibliothèques pour rassembler un héritage épistolaire, il reste toujours, ça et là, de nombreux inédits à glaner. Celui de Liebknecht n’échappe pas à la règle.

Ces deux lettres, d’origine et de contenu fort différents en sont un exemple.

I

Dans le dossier « Révolution russe » des archives du Bureau socialiste International conservées par Camille Huysmans figure ce document dactylographié signé par Karl Liebknecht et Wilhelm Buchholz. C’est un appel pathétique en faveur de la révolution russe qui passionnait alors l’opinion socialiste internationale, provoqua en son sein de nombreux remous et donna lieu à de multiples manifestations de sympathie.

Mais l’intérêt de Karl Liebknecht pour le mouvement révolutionnaire russe date de bien avant 1905, du début de son activité politique. Berlin, où il résidait, était à la fois un relais, un centre de transit de la littérature politique clandestine et le siège d’une organisation de social-démocrates russes à l’étranger dont Wilhelm Buchholz, citoyen allemand marié à une Russe, était l’un des principaux membres. L’activité de Karl Liebknecht en faveur des révolutionnaires russes était multiple : soutien juridique pour ceux qui se faisaient arrêter, enquête sur les filatures auxquelles étaient soumis les citoyens russes résidant à Berlin, protestations contre les expulsions et les extraditions etc. (2). En 1904 notamment, il fut avec Haase, le futur président du SPD, avocat à la défense du procès de Königsberg, intenté à des social-démocrates allemands pour avoir fait passer des écrits révolutionnaires russes en Russie. Plus tard, son intérêt politique allait se doubler d’un intérêt affectif, puisqu’il épousa en secondes noces, la fin de 1912, Sophie Ryss, une étudiante russe.

La Douma, parlement octroyé par le tsar au terme de son manifeste d’octobre 1905, avait été élue sans la participation des social-démocrates qui avaient opté pour le boycott, cette première Douma fut dissoute le 21 juillet 1906 à la suite de ses désaccords avec le tsar. Les députés, dans leur majorité, se réfugièrent à Vyborg en Finlande d’où ils publièrent un manifeste qui dénonçait comme illégale toute mesure prise par le tsar qui relèverait de leur compétence. Pour les élections à la seconde Douma, les partis socialistes russes renoncèrent à la tactique du boycott. La dissolution de la première Douma avait beaucoup ému l’Internationale. Aussi la lettre de Liebknecht et Buchholz trouva-t-elle un accueil chaleureux auprès du BSI. Le rapport du secrétariat de cette institution pour septembre, octobre et novembre 1906 reproduisit d’ailleurs mot pour mot des passages entiers de la lettre 3). L’initiative d’une collecte en faveur des révolutionnaires russes avait été prise dès les premiers jours de la révolution. Les sommes devaient être centralisées au BSI qui fut longtemps encore chargé de les répartir et de les administrer. A la suite de l’appel de Liebknecht à la fin de 1906 et pendant toute l’année 1907, les fonds affluèrent en quantité accrue.

II

L’épisode auquel se réfère le second document publié ci-dessous est l’un des moins connus de la vie de Karl Liebknecht. Il s’était en effet rendu aux Etats-Unis, où il séjourna du 10 octobre au 7 novembre 1910, sur l’invitation du secrétaire national du Parti Socialiste des Etats-Unis, J. Mahlon Barnes, afin de participer à la campagne pour les élections au Congrès et au Sénat.

Le correspondant de Liebknecht, Morris Hillquit, était un avocat new-yorkais, né à Riga d’où il émigra à l’âge de 16 ans. Militant socialiste dès sa jeunesse, il devint l’un des dirigeants du Socialist Party of America, de tendance réformiste, dont il fut le délégué au Bureau Socialiste International. Il avait d’ailleurs rencontré Liebknecht au Congrès socialiste international de Stuttgart en 1907. Ils avaient un point commun : leur intérêt pour le mouvement socialiste russe, avec lequel Hillquit resta très longtemps en contact.

Si cette lettre se situe deux ans et demi après le voyage de Liebknecht aux Etats-Unis, ce n’est pas dû au fait qu’il était mauvais épistolier, mais à son rythme de vie que Rosa Luxemburg décrit en ces termes : « Le pauvre garçon vivait depuis toujours « ventre à terre », au galop, éternellement pressé, se hâtant à des rendez-vous avec le monde entier, à des réunions, des commissions, toujours entouré de paquets, de journaux, toutes les poches (bourrées de bloc-notes, de petits papiers, sautant de l’auto dans le tram, du tram dans le métro, corps et âme couverts de la poussière des rues ». (4) Les événements auxquels sa lettre fait allusion sont analogues à ceux qu’il a vécus aux Etats-Unis. Lors des élections de 1907, le SPD avait essuyé un échec pour son opposition à la politique coloniale du gouvernement allemand. En 1912, il fallait réparer l’outrage. Gomme tous les propagandistes du parti, Liebknecht s’était dépensé sans compter. 1912 marquait l’un des sommets du mouvement socialiste international. Les élections au Reichtag se soldèrent par un triomphe pour la social-démocratie allemande. La campagne contre le militarisme qu’il évoque connut un retentissement considérable dans l’opinion mondiale sous le nom d’« affaire Krupp". Il devait révéler quelques jours après cette lettre, au Reichstag, l’espionnage militaire qui s’effectuait au profit de l’industrie des armes.

L’original de cette lettre manuscrite se trouve dans les archives Hillquit, conservées à la Wisconsin Historical Society à Madison, Wisconsin.

 (1) Karl Liebknecht, Gesammelte Reden und Schriften, Berlin, Dietz Verlag, (Institut für Marxismus-Leninismus beim ZK der SED).

(2) Pour de plus amples renseignements à ce sujet, cf. Botho Brachmann, Russische Sozialdemokraten in Berlin, 1895-1914, Berlin, Akademie Verlag, 1962.

(3) Pour l’attitude de l’Internationale face à la révolution russe de 1905-1907, cf. Bureau Socialiste International, Comptes rendus des réunions, manifestes et circulaires, vol. I, 1900-1907, Documents recueillis et présentés par Georges Haupt, Paris, Mouton, 1969,.

Brief an das Secretariat des Internationalen Socialistischen Bureaus (26/11/1906)

 

Th. Liebknecht Dr K. Liebknecht Berlin                                                                                                                          26 November 1906 C. 2, Kaiser Wilhelmstr 46

Rechtsanwälte an den Landgerichten I, II u.
Ill                                                                                                                                                                           An das Secretariat des Internationalen Socialistischen Bureaus Brüssel

Verehrte Genossen

Die russische Revolution steht vor einer neuen wichtigen Phase. Die geheimen Pläne der Hofcammarilla, wel che mit der Auflösung der ersten Reichsduma die konstitutionelle Periode der politischen Geschichte Russlands zum Abschluss zu bringen hoffte, sind gescheitert: Die Wahlen für die zweite Reichsduma stehen vor der Tür. Im Gegensatz zu den ersten Dumawahlen haben sämtliche revolutionären Parteien Russlands mit nur einer Ausnahme {der P.P.S .) Wahlbeteiligung beschlossen. Damit sind diesen Parteien Aufgaben gestellt, deren Wich tigkeit und Schwierigkeit so ausserordentliche sind, wie dies nur in revolutionären Perioden ersten Grades möglich ist.

Allerdings ist das Wahlrecht ein erbärmliches und die zahlreichen Interpretationen, die ihm in jüngster Zeit von der übermütigen Gegenrevolution im Verwaltungswege zu Teil geworden sind, haben gerade für das Proletariat die Schwierigkeit, eigene Abgeordnete durchzubringen noch beträchtlich erhöht. Dennoch ermöglicht es wenigstens durch die Abstimmung innerhalb der Arbeiterkurien, sofern alle Kräfte rechtzeitig einseizen, eine ge¬ waltige Demonstration des Proletariats von Gesamtrussland zu Gunsten des Socialismus. Eine s Iche Demonstra¬ tion im Verein mit dem Ansturm der revolutionären Bauernschaft und des oppositionellen Bürgertums wird zugleich nicht nur eine bedeutsame Solidaritätserklärung mit der staatsstreichlerisch auseinandergejagten ersten Duma einschliessen, sondern ein neuer heftiger Stoss für den Absolutismus sein, ihm den politischen Bankerott von neuem bestätigen und die letzte Möglichkeit nehmen, der Welt vorzulügen, dass Russland keine Revolution sondern nur Revolutionäre habe. Und sie wird sein ein vernichtendes Verdikt über das heuchlerische und blutrünstige Regine Stolypin’s der ein würdiger Schüler der Plehwe, Trepow und Durnowo statt liberaler Form Feldgerichte, statt socialer Reformen den teuren Landverkauf an die Bauern und die Entrechtung der Arbeiterschaft, statt Beruhigung der Bevölkerung vollkommene Anarchie geschaffen hat.

Eine solche Vertrauenskundgebung der Massen für die revolutionären Parteien wird weiter, je imposanter und einmütiger sie ist, den etwa gewählten Vertrauensleuten der revolutionären Partei bei ihrer Tätigkeit in der neuen Duma eine um so stärkere Stütze bieten und auch den oppositionellen bürgerlichen Parteien das radikale Rückgrad steifen.

Jene erstrebte und erwartete Manifestation des klassenbewussten Proletariats wird aber auch eine agitato¬ rische Bedeutung ersten Ranges haben. Agitatorisch durch die Wahlbewegung vor allem selbst, durch die Agitation die mit dem bestimmten Ziele der Wahl vor Augen eine ungewöhnlich eindringliche Energie entfalten muss ; agitatorisch sodann durch die Nötigung zu einem klaren politischen Bekenntnis, das heute in Russland eine Tat sein wird und so die Massen erzieht ; agitato¬ risch schliesslich durch die Wirkung des Resultates auf die Massen des Volkes selbst. Eiin grosser Erfolg wird die Massen begeistern und eine neue lebendige Aufwärtsbe¬ wegung der revolutionären Entwickelung fördern.

Denn diese Wahl ist nicht eine Wahl im westeuropäischen Sinne, sondern eine Etappe in der Fortentwicklung der Revolution, ein erneuter Antrieb zum Vorwärtsschreiten der ungeheuren politischen, socialen und ökonomischen Umwälzung Russlands, deren Beteu-tung für das Proletariat der ganzein ziviliserten Weft offenkundig ist.

Die Verantwortung für ein grosses Stück des Schick¬ sals des internationalen Proletariats lastet seit mehreren Jahren auf den Schultern der russischen Revolu¬ tionäre, die diese Verantwortung freudig unter unsäglichen Gut — und Blutopfern tragen. Das Proletariat des Auslandes erkennt dies begeistert an und hat seine Pflicht, den russischen Helden alle mögliche mora¬ lische, persönliche und materielle Unterstützung zu leihen, willig anerkannt. Genossen ! der gegenwärtige Au¬ genblick verdoppelt angesichts der Orgien, die die Gegenrevolution mit infernalischer Bestialität im Blute de r Besten unter den russischen Revolutionären feiert, die Verantwortung der socialistischen Parteien Russlands. Sie bedürfen der tatkräftigen und schleunigen Unterstüt¬ zung ihrer glücklicheren Bruderparteien für die sie zugleich kämpfen. Und diese besondere, tatkräftige und schleunige Unterstützung ist Pflicht. Der Wahlkampf vollzieht sich, wie jeder Tag von neuem bezeugt, unter fortgesetzt sich steigerndem barbarischen Druck, vor den stets geöffneten Toren der mörderischen Gefängnisse, die Russland übersäen, unter dem Galgen und vor den Flin¬ ten der Feldgerichte.

Ein solcher Wahlkampf kostet ausserordentliche ma¬ terielle Mittel und in Russland selbst gehören Geldsammlungen grösseren Stils jetzt zur Unmöglichkeit. Die Begeisterung und Kraft und persönliche Aufopferung bringen unsere russischen Brüder in übervollem Masse mit. An materiellen Mitteln leiden sie bittere Not !

Nachdem wir Ihnen, verehrte Genossen, diese unsere Erwägungen dargelegt haben, erlauben wir uns beim Secretariat des Internationalen Socialistischen Bureaus die Frage anzuregen, ob es nicht angängig wäre, bei allen angegliederten socialitischen Parteien Sammlungen für die russischen socialistischen Parteien vorzuschlagen und zu veranstalten zum Zwecke deir agitatorischen Ausnützung der Wahl und zwar bei der Kürze der Zeit, die für die Wahlbewegung zu Gebote steht, mit grösster Beschleunigung, auf dass der günstige Moment gehörig ausgenützt werden könne. Wir sind überzeugt, dass dieser Vorschlag lebhaften Widerhall bei dem Proletariat der ganzen Welt finden wird.

Mit socialistichem Brudergruss !

Dr Karl Liebknecht W. Buchholz Berlin le 26 novembre 1906 C. 2, Kaiser Wilhelmstr. 46

Lettre au secrétariat du Bureau Socialiste International (26/11/1906)

Au Secrétariat du Bureau Socialiste Inernational Bruxelles

Chers camarades,

Une nouvelle phase importante s’ouvre pour la révolution russe. Les plans secrets de la camarilla qui comptait mettre un terme à la période constitutionnelle de l’histoire politique de la Russie par la dissolution de la première Douma d’empire ont échoué ' les élections pour la seconde Douma sont imminentes. A l’inverse de ce qui s’est passé lors des premières élections à la Douma, tous les partis révolutionnaires de Russie, à l’exception d’un seul (le PPS ) (1) ont décidé de participer au vote. Ces partis se voient ainsi confrontés à des tâches qui revêtent l’importance et la difficulté extraordinaires que peut seule conférer une période révolutionnaire de première grandeur.

Certes, le droit de vote est lamentable et les nombreuses interprétations qui lui furent appliquées récemment par la voie administrative par une contre-révolution insolente ont précisément accru considérablement les difficultés qu’éprouve le prolétariat à faire passer ses propres députés. Cependant il permet au moins, grâce au vote dans les curies ouvrières et dans la mesure où toutes les forces interviennent à temps, une démonstration puissante du prolétariat de toute la Russie en faveur du socialisme. Cette manifestation, jointe à l’assaut de la paysannerie révolutionnaire et de la bourgeoisie d’opposition comprendra non seulement une déclaration significative de solidarité avec la première Douma dissoute par un coup d’Etat, mais constituera également un nouveau coup dur porté à l’absolutisme prouvant une fois de plus sa faillite politique et lui dérobant la possibilité de proclamer au monde ce mensonge que la Russie n’a pas de révolution mais simplement des révolutionnaires. Et ce sera un verdict sans appel prononcé contre le ré¬ gime d’hypocrisie et de sang de Stolypine qui en bon disciple de Plehwe, Treptov et Dournovo au lieu de pro¬ mouvoir des formes libérales a créé des tribunaux de campagne, au lieu de procéder à des réformes sociales a vendu la terre très cher aux paysans et privé les ouvriers de droits, au lieu de tranquilliser la population a semé l’anarchie complète.

En outre, plus elle sera imposante et unanime, plus cette manifestation de la confiance des masses envers les partis révolutionnaires renforcera l’appui des élus éventuels du parti révolutionnaire dans leur activité à la nouvelle Douma, plus elle affermira la base de radicalisme des partis bourgeois d’opposition.

Mais cette manifestation espérée et attendue du prolétariat de Russie animé d’une conscience de classe aura également sur le plan de l’agitation une importance de premier ordre. Avant tout par la campagne électorale elle-même, par une agitation qui ne devra pas perdre de vue un but précis, les élections, et devra déployer une énergie particulièrement percutante; ensuite, par la nécessité d’une prise de position politique claire qui à l’heure actuelle en Russie sera aussi un acte propre à éduquer les masses; enfin par l’effet des résultats sur les masses populaires elles-mêmes. Un grand succès déchaînera l’enthousiasme des masses et favorisera un nouvel élan vivant du développement révolutionnaire.

Car ces élections ne sont pas telles que nous les connaissons en Europe occidentale, elles sont une étape dans le développement de la révolution, un stimulant renouvelé à la marche en avant du gigantesque bouleversement politique, social et économique de la Russie, dont la signification pour le prolétariat de tout le monde civilisé est manifeste.

La responsabilité d’une grande partie du destin du prolétariat international repose depuis plusieurs années sur les épaules des révolutionnaires russes qui la supportent vaillamment avec des sacrifices indicibles dans leurs biens et dans leur sang. Le prolétariat de l’étranger le reconnaît avec enthousiasme ; il a aussi reconnu volontiers que son devoir était de prêter aux héros russes tout le secours possible, moral, matériel et personnel. Camarades, dans la situation actuelle, devant les orgies que célèbre la contre-révolution, avec une bestialité d’enfer, dans le sang des meilleurs des révolutionnaires russes, les tâches et la responsabilité des partis révolutionnaires de Russie ont doublé. Ils ont besoin du soutien actif et rapide des partis frères plus favorisés pour lesquels ils combattent également. Chaque jour en apporte une nouvelle preuve: la campagne électorale se déroule sous une pression barbare sans cesse accrue, devant les portes toujours ouvertes des prisons scélérates qui foisonnent en Russie, sous les potences et devant les fusils des tribunaux de campagne.

Une campagne électorale de cette nature exige des moyens matériels énormes ; en Russie même, il est actuellement impossible de se livrer à des collectes d’envergure. Nos frères russes fournissent un trop-plein d’en thousiasme, de force et de sacrifice personnel. Ils ont amèrement besoin de moyens matériels !

Chers camarades, après vous avoir exposé nos réflexions, nous nous permettons de soulever auprès du secrétariat du Bureau Socialiste International la question suivante: ne faudrait-il pas proposer à tous les partis socialistes affiliés d’organiser des collectes pour les partis socialistes russes afin d’utiliser les élections sur le plan de l’agitation et ce au plus vite, vu le peu de temps qui reste à la campagne électorale, afin que ce moment propice puisse être utilisé comme il convient. Nous sommes persuadés que cette proposition trouvera un vivant écho dans le prolétariat du monde entier.

Salutations socialistes et fraternelles !

Brief an den Genossen Hillquit (09/04/1913)

Dr K. Liebknecht W. Buchholz, Berlin, 9 April 1913

Lieber und verehrter Genosse Hillquit !

Endlich komme ich dazu, Ihnen ein Lebenszeichen zu geben. Seien Sie gewiss, dass ich Ihrer u. aller amerikanischen Freunde die ganze Zeit hindurch mit den herzlichsten Empfindungen gedacht u. Ihre Arbeit mit Freude u. Befriedignug verfolgt habe. Ich hatte auch immer wieder die Absicht, Ihnen und auch dem Genossen Mahlon Barnes, der der Katz eine Zeit lang zu meinem Leidwesen zum Opfer fiel, eingehend zu schreiben , nochmals zu danken, — auch für die freundliche Einladung für ein späteres Jahr, die mir Genosse Barnes zugehen Hess. Meine politische und sociale Einsicht hat trotz der Kürze meines Aufenthalts drüben eine immense Bereicherung erfahren.

Ich kam jedoch alsbald nach meiner Heimkehr in gera¬ dezu mörderische Arbeit u. dann hielt der Tod reiche Ernte, auch meine Frau starb. Inzwischen habe ich mich wieder verheiratet. Die Wahlen — Reichstags — und Landtagsarbeit — kurz, es ging hoch her, u. noch immer rast der Expresszug der politischen Arbeit weiter, in unverminderter Schnelligkeit. Heute führen wir den heissesten Kampf gegen Militarismus und Kriegstreibereien, den die Socialdemokratie je zu führen hatte. Ich bitte Sie, meiner so freundlich zu gedenkt i wie ich Ihrer und hoffe, Sie u. das Land des beinahe fessellosen Kapitalismus, dessen erstaunliche Rastlosigkeit und Kühnheit mich trotzalledem mit Bewunderung erfüllt hat, bald einmal Wiedersehen zu können.

Der unmittelbare Anlass dieses Schreibens ist der junge Mann, der es Ihnen bringen wird. Herr Samuel Zimand, ein Rumäne, ist Genosse, hat studiert, sucht nun drüben eine Existenz, eventuell im Journalismus, oder sonst. Ich kenne ihn gut u. kann ihn bestens empfehlen. Vielleicht können Sie ihm einen Rat geben, oder ihn an jemanden weisen, der ihm einige Stütze bietet. Ich märe Ihnen sehr werbunden. Inzwischen hoffe ich das Beste von Ihrem Wohlbefinden u. Ihrer Arbeit für die Partei u. begrüsse Sie aufrichtig. Ihr

Dr Karl Liebknecht

Lettre au camarade Hillquit (09/04/1913)

Berlin le 9 avril 1913

Très cher camarade Hillquit !

Je parviens enfin à vous donner signe de vie. Soyez assuré que pendant tout ce temps, j’ai beaucoup pensé à vous et à tous les amis américains et j’ai suivi votre activité avec joie et satisfaction. J’avais aussi toujours l’intention de vous écrire longuement et de vous remercier encore, vous et le camarade Mahlon Barnes qui à mon grand regret a été pendant un certain temps victime de la Katz de vous remercier aussi pour l’aimable invitation que le camarade Barnes m’a fait parvenir pour une année ultérieure. Malgré la brièveté de mon séjour chez vous, ma compréhension politique et sociale s’est considérablement enrichie.

Cependant, dès mon retour, j’ai été accaparé par un travail littéralement harassant, puis la mort a fait sa moisson et ma femme est morte. Entre temps, je me suis remarié. Les élections — travail pour le Reichstag et pour le Landtag — bref, un rythme effréné et le train express du travail politique poursuit sa course à une vitesse nullement décroissante. Aujourd’hui nous menons contre le militarisme et les manoeuvres belliqueuses la lutte la plus chaude que la social-démocratie ait jamais eu à mener. Je vous prie de garder de moi un souvenir aussi amical que moi de vous et j’espère pouvoir vous revoir bientôt ainsi que le pays du capitalisme presque sans entraves dont l’activité incessante et l’audace étonnante m’ont malgré tout rempli d’admiration.

La raison immédiate de cette lettre est le jeune homme qui vous l’apportera. Monsieur Samuel Zimand, un Rou¬ main, est un camarade, il a fait ses études et va chercher là-bas une situation, éventuellement dans le journalisme ou ailleurs. Je le connais bien et je peux le recommander chaudement. Peut-être pouvez-vous lui donner un conseil ou lui indiquer quelqu’un qui soit capable de l’aider. Je vous en serais très reconnaissant. J’espère à part cela que vous vous portez le mieux du monde et que votre travail pour le parti marche bien. Je vous salue bien sincèrement.

Votre

Dr Karl Liebknecht.

 

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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009