"Toute personne rencontrée dans la rue après six heures du soir par les patrouilles est fusillée sans autre forme de procès."
Dossier Berlin, mars 1919 - Mars 1919 dans l'Humanité
La lecture de l'article du 6 mars 1919 dans l'Humanité révèle crument le décalage entre ce qui se passe réellement et les mots indifférents, froids, glaçants employés dans l'article, quand on connaît la réalité des faits.
. Le terme indifférencié de spartakistes (ou spartaciens selon les cas!), est toujours utilisé quand on veut créer la distance, condamner, on distingue ainsi clairement l'analyse réformiste sous-jacente à ces articles, d'autant que ce terme avait été assimilé dans un article précédent à terrorisme.
. Les précédents articles témoignaient d'une véritable méconnaissance du mouvement. Une incise remet dans cet article les choses partiellement en place :
Nous savons, cependant, que le C.0..S. berlinois n'est pas spartakiste loin de là. Les dernières élections ont envoyé une majorité fidèle au vieux parti et, si l'on a annoncé des élections nouvelles, elles n'ont pu être faites déjà. Ce ne seraient donc point les extrémistes qui auraient décrété la grève, mais les militants qui avaient fidèlement soutenu jus-qu'ici la politique de Scheidemann et d'Ebert.
Partiellement car cela n'est pas exact historiquement. Les majoritaires ont rejoint le mouvement quand ils ont compris que la grève ne pouvait être empêchée (Ils tenteront de le noyauter ensuite, en tous les cas de le freiner. (Les compte rendus conservés permettent de suivre précisément les processus).
Corps francs (ici Reinhardt) et armée dans les rues de Berlin. L'Humanité traduit Freikorps par "Volontaire"s, terme positif qui ne traduit pas la réalité de ces troupes!
Le plus terrible dans cet article est cependant l'indifférence face à la répression décrite : méconnaissance, indifférence par rapport à Gustav Noske et froideur glaçante face aux mesures prises qui revient de fait à une approbation des tribunaux expéditifs, du décret permettant de tirer sans sommation ni jugement :
"On signale, d'autre part, des troubles spartakistes que Noske entend réprimer selon sa manière, qui est la forte."
Actuellement, les troupes du gouvernement entrent à Berlin de tous côtés. La ville a été occupée militairement la nuit dernière.
"Noske a prescrit, dès son arrivée à Berlin, des mesures très rigoureuses. Des cours martiales fonctionnent dans les différents quartiers de Berlin et les faubourgs. Toute personne rencontrée dans la rue après six heures du soir par les patrouilles est fusillée sans autre forme de procès." (Radio).
"Les journaux révolutionnaires occupés militairement. La Liberté et le Drapeau Rouge ont été occupés militairement. Ils n'ont pas paru ce matin. "
LA RÉVOLUTION EN ALLEMAGNE
A la faveur de la Grève Générale le mouvement spartakisme redouble d'intensité
Les dépêches restent obscures. II faut les interpréter. On annonce que le Comité exécutif du C.0.S. a pris la responsabilité
de décréter la grève générale à Berlin. On signale, d'autre part, des troubles spartakistes que Noske entend réprimer selon sa manière, qui est la forte.
Nous savons, cependant, que le C.0.S. berlinois n'est pas spartakiste loin de là. Les dernières élections ont envoyé une majorité fidèle au vieux parti et, si l'on a annoncé des élections nouvelles, elles n'ont pu être faites déjà.
Ce ne seraient donc point les extrémistes qui auraient décrété la grève, mais les militants qui avaient fidèlement soutenu jusqu'ici la politique de Scheidemann et d'Ebert.
Si un tel fait est exact, il est d'une importance extrême pour l'avenir de l'Allemagne. C'est en effet sur la discipline et matérielle du vieux parti que s'appuyait l'expérience, tentée à Weimar d'une révolution purement politique sous la Section socialiste et libérale.
Le Conseil de Berlin s'est-il rallié à la politique des indépendants ? Attendons des informations plus précises.
Il essaie, paraît-il, de maintenir l'ordre, donnant pleins pouvoirs aux troupes pour résister à certains émeutiers. Mais il exige des mesures vigoureuses libération des détenus politiques, dissolution des tribunaux militaires, organisation de tribunaux populaires, reprise des rapports normaux avec la Russie.
II entend que les responsables de la guerre et de la défaite soient jugés, que les meurtriers de Liebknecht, de Rosa Luxem-
bourg, d'Eisner soient arrêtés.
Que fera le gouvernement ? Les dépêches rendent compte des débats de Weimar. L'attention est retenue plutôt par le mouvement qui secoue les masses populaires.
Répression ? Composition ? M. D.
L'INSURRECTIOH A BERLIN
Bâle, 4 mars. On mande de Berlin au Frankfurter General-Anzeiger
Les informations parvenues disent qu'une attaque s'est produite hier soir contre la présidence de la police l'attaque a été immédiatement repoussée. Il y aurait cinq morts du côté des assaillants. Actuellement, les troupes du gouvernement entrent à Berlin de tous côtés. La ville a été occupée militairement la nuit dernière. A huit heures, toute la circulation dans la rue a été suspendue.
Le bruit a couru que les Spartakistes occuperaient le quartier des journaux vers huit heures.
Le gouvernement a pris aussitôt des mesures préventives.
Peu après que la motion des communistes déclarant la grève générale eut été adoptée, des désordres spartaciens se manifestèrent sur divers points de la ville. Des rassemblements et des petites fusillades eurent lieu sur La Place Alexandre il y a eu une victime.
À la Weimarerstrasse et à l’Alexanderstrasse, les Spartakistes provoquèrent des échauffourées.
Attaque sur la gare du Nord. Des pillages se sont produits à Alexanderplatz. Tout démontre que les Spartakistes veulent terroriser Berlin comme en janvier, mais, ils trouveront, la résistance insurmontable du gouvernement!
Il est décidé à maintenir l'ordre et le calme en toutes circonstances. (Havas)
La répression
D'après les nouvelles, qui parviennent de Berlin, la lutte est acharnée entre spartakistes et troupes gouvernementales.
Une division, de marine à l'Alexanderplatz. Dans le faubourg de Lichtenberg, les troupes sont entrées en contact avec les émeutiers. On a relevé trois spartakistes tués et 1m t blessés.
Plusieurs milliers de soldats des troupes gouvernementales ont manifesté leurs sympathies pour les spartakistes et les indépendants ? Attendons des informations plus précises.
Noske a prescrit, dès son arrivée à Berlin, des mesures très rigoureuses. Des cours martiales fonctionnent dans les différents quartiers de Berlin et les faubourgs. Toute personne rencontrée dans la rue après six heures du soir par les patrouilles est fusillée sans autre forme de procès. (Radio).
D'autre part, on télégraphie à l'Agence Havas que l'effectif des troupes gouvernementales au grand Berlin est porté à
8.000 hommes.
La division Reinhardt s'opposera à la grève générale.
Les journaux révolutionnaires occupés militairement
Bâle, 4 mars, On mande de Berlin à la Gazette de Francfort
La Liberté et le Drapeau Rouge ont été occupés militairement. Ils n'ont pas paru ce matin.
Suivant le Frankfurter General-Anzeiger, hier soir, peu après 7 heures, le trafic a été suspendu et à 8 heures, c’est au tour du chemin de fer aérien.
Le personnel du chemin de fer souterrain a été contraint par les voyageurs de faire partir un deuxième convoi. (Havas.).
Berlin redevenu calme
Bâle, 5 mars. On télégraphie de Berlin Hier, la ville de Berlin a été complètement calme. Comme la circulation des tramways est arrêtée, d'innombrables piétons, des autos, des fiacres et des véhicules de toutes sortes encombrent les rues. De nombreux magasins sont ouverts. Les postes et télégraphes fonctionnent encore. (radio.)
La grève générale étendue à toute l'Allemagne
Bâle, 5 mars. On mande de Berlin
Dans une assemblée de l'action spartkiste, on a décidé d'étendre le mot d'ordre de la grève générale à tout l'empire.
(Havas.)
A Weimar;
A l'assemblée nationale, Henke, indépendant, a critiqué le projet de constitution II lui refuse le caractère socialiste en raison des indemnités prévues pour les expropriations. Selon lui, le système des C.O.S. doit prédominer dans la constitution. Il annonça que les ouvriers résisteront à la violence jusqu'à la victoire de leurs idées.
La Diète bavaroise à Bamberg
Le 4 mars. On mande de la Gazette de Francfort, de Weimar, que la Diète bavaroise s'est réunie, lundi à Bamberg au
lieu de Munich. (Havas.)
La loi sur la socialisation
La loi sur la socialisation proposée par le gouvernement, a la teneur suivante
Article premier. Tout Allemand doit utiliser ses forces intellectuelles et corporelles que demande le bien de la généralité, sa force du travail, comme bien supérieur est placé sous la protection de l'Empire. Pour autant que l'Allemand ne peut pas trouver l'occasion de travailler, l'entretien nécessaire lui sera accordé d'après les règles fixées, par les lois spéciales de l'Empire, à la charge du trésor public.
Art. 2. II appartient à l'Etat de transmettre à la communauté économique allemande et ̃ entreprises économiques et leurs valeurs. En particulier, les richesses du sol et les forces naturelles, comme aussi de régler la production et la répartition des liens économiques en faveur de l’Empire, des Etats particuliers, des communes et des groupements de communes.
Art. 3. Tout ce qui concerne l'économie générale allemande est dirigé par des br. administratifs distincts et indépendants, sous le contrôle de l'Empire.
Art. 4. Pour l'exécution des dispositions précités à l'article deux sur l'exploitation des combustibles, des forces hydrauliques et autres sources d'énergie naturelle et des forces qui en découlent, il y sera pourvu par une loi d'Empire spéciale d’après les principes de la. communauté économique.