Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

Rechercher

Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
9 avril 2011 6 09 /04 /avril /2011 20:15

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

Actualité de Rosa Luxemburg: les salariés de Météo france ont mené une lutte forte en 2008. Ils reprennent entre autres une citation de Rosa Luxemburg tirée de la brochure de Junius.

 

voir


Blizzard n°6  — 26 octobre 2008


L’AG de reprise du 24/10, malgré la défaite, marque une avancée de conscience et de la volonté de prendre en charge collectivement tous les aspects de la lutte. Texte des motions. Annexe : citation Rosa Luxemburg. (Extrait de la brochure de Junius. ouvrir le lien Blizzard n°6 )

 

Blizzard n°5  — 24 octobre 2008


Les conditions d’une reprise constituent un élément essentiel de notre force, de notre solidarité, de notre conscience et de notre capacité à préparer les luttes futures. Texte lu en AG (à quelques corrections près). Annexe : citations de Karl Marx et Rosa Luxemburg. (ouvrir le lien Blizzard n°5)

 

 

shapeimage_1.jpg

 

shapeimage_3-copie-1.jpgshapeimage_4.jpg

Partager cet article
Repost0
4 avril 2011 1 04 /04 /avril /2011 10:05

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

KentuckPortoRico.jpg

Porto Rico 1898

 

Rosa Luxemburg a publié plusieurs articles sur le développement impérialiste des Etats-Unis et ceci dès 1898 - 1900. Elle a su suivre le développement éclair du capitalisme aux Etats-Unis qui va mettre ce pays en une décennie au premier rang des pays capitalistes, au détriment des grands pays européeens. Mais elle a aussi dès cette époque pointé le développement impérialiste, car dès cette époque l'interventionnisme américain dans le monde se manifeste, occupation, annexion, intervention. Les moments forts étant Cuba et Porto Rico. Tout un symbole pour notre époque.

 

Ci-dessous deux documents à consulter;.


 

 

Sur caei une contribution historiographique de Miguel arreras

 

lire

 

www.caei.com.ar/es/programas/latam/13.pdf

 

 


Sur http://fusa2.free.fr/?Rub=Article&Act=Lire&ID=36, une liste indicative des interventions:

 

DAKOTA DU SUD 1890 (-?) Troupes, 300 Indiens lakota massacrés à Wounded Knee.

ARGENTINE 1890 Troupes, protection des intérêts à Buenos Aires.

CHILI 1891 Troupes et Marines, affrontements avec rebelles nationalistes.

HAÏTI 1891 Troupes, répression d'une révolte de travailleurs noirs dans l'île de Navassa revendiquée par les Etats-Unis.

IDAHO 1892 Troupes, l'armée réprime une grève dans les mines d'argent.

HAWAII 1893 (-?) Marine, troupes, royaume indépendant renversé, annexion du territoire.

CHICAGO 1894 Troupes, dislocation d'une grève du rail, 34 tués.

NICARAGUA 1894 Troupes, occupation pendant plusieurs mois de Bluefields.

CHINE 1894-95 Marine, troupes. Les Marines débarquent en pleine guerre sino-japonaise.

COREE 1894-96 Troupes, Marines cantonnés à Séoul durant la guerre.

PANAMA 1895 Troupes, les Marines de la Navy débarquent dans la province colombienne.

NICARAGUA 1896 Troupes, les Marines débarquent dans le port de Corinto.

CHINE 1898-1900 Troupes, la rébellion des Boxers combattue par des armées étrangères.

PHILIPPINES 1898-1910(-?) Marine, troupes, territoire ravi à l'Espagne, 600.000 Philippins tués.

CUBA 1898-1902(-?) Marine, troupes, territoire ravi à l'Espagne, la Navy y occupe toujours une base.

PUERTO RICO 1898(-?) Marine, troupes, territoire ravi à l'Espagne, l'occupation se poursuit.

GUAM 1898(-?) Marine, troupes, territoire ravi à l'Espagne, toujours base militaire.

MINNESOTA 1898(-?) Troupes, l'armée défait les Indiens chippewa à Leech Lake.

NICARAGUA 1898 Troupes, les Marines débarquent dans le port de San Juan del Sur.

SAMOA 1899(-?) Troupes, bataille pour la succession du trône.

NICARAGUA 1899 Troupes, les Marines débarquent dans le port de Bluefields.

IDAHO 1899-1901 Troupes, l'armée occupe la région minière de Coeur d'Alene.

OKLAHOMA 1901 Troupes, l'armée mate une révolte d'Indiens creek.

PANAMA 1901-14 Marine, troupes, sécession cvis-à-vis de la Colombie 1903, annexion zone du Canal 1914-99.

HONDURAS 1903 Troupes, les Marines interviennent dans la révolution.

REPUBLIQUE DOMINICAINE 1903-04 Troupes, protection des intérêts américains dans la révolution.

COREE 1904-05 Troupes, les Marines débarquent dans la guerre russo-japonaise.

CUBA 1906-09 Troupes, les Marines débarquent en pleine élection démocratique.

NICARAGUA 1907 Troupes, "Diplomatie du dollar", instauration d'un protectorat.

HONDURAS 1907 Troupes, les Marines débarquent au cours de la guerre contre le Nicaragua.

PANAMA 1908 Troupes, les Marines interviennent au cours d'une contestation électorale.

NICARAGUA 1910 Troupes, les Marines débarquent à Bluefields et Corinto.

HONDURAS 1911 Troupes, protection des intérêts américains durant la guerre civile.

CHINE 1911-41 Marine, troupes, occupation permanente avec escarmouches.

CUBA 1912 Troupes, protection des intérêts américains à La Havane.

PANAMA 19l2 Troupes, les Marines débarquent durant des élections mouvementées.

HONDURAS 19l2 Troupes, Marines, protection des intérêts économiques américains.

NICARAGUA 1912-33 Troupes, bombardements, 20 ans d'occupation, combats contre diverses guérillas.

MEXIQUE 19l3 Marine, les sujets américains sont évacués pendant la révolution.

REPUBLIQUE DOMINICAINE 1914 Marine, combats contre les rebelles pour Santo Domingo.

COLORADO 1914 Troupes, dislocation par l'armée d'une grève de mineurs.

MEXIQUE 1914-18 Marine, troupes, série d'interventions contre les nationalistes.

HAITI 1914-34 Troupes, bombardements, occupation de 19 ans après révoltes.

REPUBLIQUE DOMINICAINE 1916-24 Troupes, 8 ans d'occupation par les Marines.

CUBA 1917-33 Troupes, occupation militaire, protectorat économique.

 

cuba-1898.jpgCuba 1898

Partager cet article
Repost0
2 avril 2011 6 02 /04 /avril /2011 15:44

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

Nous avons lu aussi cet article sur le site  liberationirlande, publié le  1er .

 

L'occasion de redire en effet l'essentiel de ce lien conscience et sensibilité qui est propre à Rosa Luxemburg et de relire des extraits de lettres dont on ne peut se lasser. (en remerciant aussi pour la citation du blog).

A la question « qu’est-ce qu’être de gauche? », Gilles Deleuze répondait que ce n’était pas une question de morale, mais une question de perception: ne pas voir le monde en commençant par son petit moi, mais à partir de ce qui est loin autour de nous et qui nous englobe et nous appelle en quelque sorte. Par exemple pour nous, l’équipe de Libération Irlande, le sort tragique des prisonniers républicains de Maghaberry nous touche beaucoup, même si nous ne les connaissons pas.


Pour faire voir ce qu’est la sensibilité révolutionnaire, voici trois extraits de lettres envoyées par Rosa Luxembourg depuis sa prison en Allemagne à son amie et camarade Sonia Liebknecht, extraites du livre J’étais, je suis, je serai, Correspondance 1914-1919, ed. Maspéro, 1977.


Ce que je lis ? Avant tout, des ouvrages de sciences naturelles : géographie végétale et animale. Hier, j’ai justement lu un livre sur la cause de la disparition des oiseaux chanteurs en Allemagne : c’est l’entretien rationnel des forêts de plus en plus étendu, la culture des jardins et l’agriculture qui font disparaître une à une toutes leurs possibilités naturelles de nicher et de trouver leur nourriture : arbres creux, terres en friche, broussailles, feuilles mortes dans les jardins. J’avais si mal en lisant cela.


Ce n’est pas que je m’inquiète du chant des oiseaux pour les hommes, mais c’est la représentation de la disparition silencieuse et irréversible de ces petits êtres sans défense qui me peine au point je n’ai pu retenir mes larmes. Cela m’a rappelé un livre russe écrit par le professeur Ziber traitant de la disparition des Peaux-Rouges dans l’Amérique du Nord, que j’ai lu quand j’étais encore à Zurich. Tout comme les oiseaux, ils sont chassés peu à peu de leur territoire par les hommes civilisés et voués à une disparition silencieuse et cruelle.

Mais il faut bien sûr que je sois malade pour que tout me bouleverse si profondément. Ou alors savez-vous ce que c’est ? J’ai parfois le sentiment de ne pas être un vrai être humain, mais un oiseau ou quelque autre animal qui a pris forme humaine ; au fond de moi, je me sens beaucoup plus chez moi dans un petit bout de jardin comme ici ou dans la campagne, sur l’herbe, entourée de bourdons que… dans un congrès du parti. A vous, je peux bien dire tout cela : vous n’irez pas tout de suite me soupçonner de trahir le socialisme.


Vous le savez, j’espère malgré tout que je mourrai à mon poste, dans une bataille de rues ou au bagne. Mais mon moi le plus profond appartient plus à mes mésanges charbonnières qu’aux « camarades ». Et non pas parce que je trouve dans la nature un asile, un lieu de repos, comme tant d’hommes politiques qui n’ont plus rien dans le coeur. Au contraire, je trouve à chaque pas, dans la nature aussi, tant de cruauté que j’en souffre beaucoup. Imaginez-vous par exemple que je n’arrive pas à oublier le petit événement que voici.


Au printemps dernier, je rentrais chez moi d’une promenade dans la campagne par ma rue tranquille et vide, quand je remarquai sur le sol une petite tache brune. Je me baissai et fus témoin d’une tragédie sans paroles : un gros bousier était couché sur le dos, essayant de se défendre en agitant ses pattes tandis qu’un tas de fourmis minuscules grouillaient sur lui et… le dévoraient tout vif ! Frissonnante, je sortis mon mouchoir et me mis à chasser ces bestioles cruelles, mais elles étaient si insolentes et tenaces que je dus soutenir contre elles une longue lutte et lorsque j’eus finalement libéré le pauvre martyr et que je l’eus posé loin sur l’herbe, on lui avait déjà dévoré deux pattes… Je m’en allai précipitamment, en proie au sentiment pénible de lui avoir finalement rendu un fort douteux service.

————————

Hier donc je me disais : comme c’est étrange que je vive toujours dans une ivresse joyeuse, sans raison particulière. C’est ainsi par exemple que je suis allongée ici, dans cette cellule obscure, sur un matelas dur comme de la pierre, tandis que m’environne l’habituelle paix de cimetière qui règne dans le bâtiment ; on se croirait dans la tombe, tandis qu’à travers la vitre se dessine sur le plafond le reflet de la lanterne qui brûle toute la nuit devant la prison.


De temps à autre, on entend la rumeur très assourdie d’un train qui passe au loin ou encore, tout près, sous ma fenêtres, le raclement de gorge de la sentinelle qui, chaussée de ses lourdes bottes, fait lentement quelques pas pour se dégourdir les jambes. Sous ses pieds le crissement du sable est si désespéré qu’on y perçoit, dans cette nuit humide et sombre, tout le vide et l’absence de perspectives de l’existence. Et me voilà gisant seule et silencieuse, enveloppée dans tous les voiles noirs de ténèbres, de l’ennui de l’hiver qui vous tient prisonnière ; et pourtant mon coeur bat, secoué par une joie intérieure, inconnue, incompréhensible, comme si, dans l’éclat du soleil, je traversais une prairie en fleur.


Et dans le noir je souris à la vie, comme si je connaissais quelque secret magique qui démentirait tout ce qu’il y a de méchant et de triste, et j’éclate dans un monde de lumière et de bonheur. Et, dans le même temps, je m’interroge moi-même sur la raison de cette joie ; je n’en trouve pas et ne puis m’empêcher de sourire encore de moi-même.


Je crois que ce secret n’est autre que la vie elle-même ; la nuit profonde est si belle et douce comme du velours, pourvu que l’on sache bien regarder. Et dans le crissement du sable humide sous les pas lourds et lents de la sentinelle chante aussi la chanson de la vie, une petite chanson et belle – pourvu que l’on sache bien entendre.

A ces moments-là, je pense à vous et j’aimerais tant vous transmettre cette clef magique pour que vous perceviez toujours, et dans n’importe quelle situation, la part de beauté et de joie de la vie, pour que vous aussi vous viviez dans l’ivresse et marchiez comme dans une prairie diaprée. Loin de moi l’idée de vous payer d’ascétisme, de joies imaginaires. Je vous accorde toutes les joies réelles des sens. Simplement, je voudrais vous donner en sus mon inépuisable sérénité intérieure, afin de ne plus être inquiète pour vous, pour que vous alliez dans la vie enveloppée dans un manteau semé d’étoiles qui vous protège de tout ce qu’il y a de mesquin, de trivial et d’angoissant.

———————

Ah! ma petite Sonia, j’ai éprouvé ici une douleur aiguë. Dans la cour où je me promène arrivent tous les jours des véhicules militaires bondés de sacs, de vielles vareuses de soldats et de chemises souvent tachées de sang… On les décharge ici avant de les répartir dans les cellules où les prisonnières les raccommodent, puis on les recharge sur la voiture pour les livrer à l’armée.


Il y a quelques jours arriva un de ces véhicules tiré non par des chevaux, mais par des buffles. C’était la première fois que je voyais ces animaux de près. Leur carrure est plus puissante et plus large que celle de nos boeufs ; ils ont le crâne aplati et des cornes recourbées et basses ; ce qui fait ressembler leur tête toute noire avec deux grands yeux doux plutôt à celle des moutons de chez nous. Ils sont originaires de Roumanie et constituent un butin de guerre…


Les soldats qui conduisent l’attelage racontent qu’il a été très difficile de capturer ces animaux qui vivaient à l’état sauvage et plus difficile encore de les dresser à traîner des fardeaux. Ces bêtes habituées à vivre en liberté, on les a terriblement maltraitées jusqu’à ce qu’elles comprennent qu’elles ont perdu la guerre : l’expression vae victis ["malheur aux vaincus", en latin] s’applique même à ces animaux… une centaine de ces bêtes se trouveraient en ce moment rien qu’à Breslau.


En plus des coups, eux qui étaient habitués aux grasses pâtures de Roumanie n’ ont pour nourriture que du fourrage de mauvaise qualité et en quantité tout à fait insuffisante. On les fait travailler sans répit, on leur fait traîner toutes sortes de chariots et à ce régime ils ne font pas long feu. Il y a quelques jours, donc, un de ces véhicules chargés de sacs entra dans la cour.


Le chargement était si lourd et il y avait tant de sacs empilés que les buffles n’arrivaient pas à franchir le seuil du porche. Le soldat qui les accompagnait, un type brutal, se mit à les frapper si violemment du manche de son fouet que la gardienne de prison indignée lui demanda s’il n’avait pas pitié des bêtes.


Et nous autres, qui donc a pitié de nous? répondit-il, un sourire mauvais aux lèvres, sur quoi il se remit à taper de plus belle…


Enfin les bêtes donnèrent un coup de collier et réussirent à franchir l’obstacle, mais l’une d’elle saignait… Sonitchka, chez le buffle l’épaisseur du cuir est devenue proverbiale, et pourtant la peau avait éclaté. Pendant qu’on déchargeait la voiture, les bêtes restaient immobiles, totalement épuisées, et l’un des buffles, celui qui saignait, regardait droit devant lui avec, sur son visage sombre et ses yeux noirs et doux, un air d’enfant en pleurs.


C’était exactement l’expression d’un enfant qu’on vient de punir durement et qui ne sait pour quel motif et pourquoi, qui ne sait comment échapper à la souffrance et à cette force brutale… J’étais devant lui, l’animal me regardait, les larmes coulaient de mes yeux, c’étaient ses larmes. Il n’est pas possible, devant la douleur d’un frère chéri, d’être secouée de sanglots plus douloureux que je ne l’étais dans mon impuissance devant cette souffrance muette.


Qu’ils étaient loin les pâturages de Roumanie, ces pâturages verts, gras et libres, qu’ils étaient inaccessibles, perdus à jamais. Comme là-bas tout – le soleil levant, les beaux cris des oiseaux ou l’appel mélodieux des pâtres – comme tout était différent. Et ici cette ville étrangère, horrible, l’étable étouffante, le foin écoeurant et moisi mélangé de paille pourrie, ces hommes inconnus et terribles et les coups, le sang ruisselant de la plaie ouverte…


Oh mon pauvre buffle, mon pauvre frère bien-aimé, nous sommes là tous deux aussi impuissants, aussi hébétés l’un que l’autre, et notre peine, notre impuissance, notre nostalgie font de nous un seul être. Pendant ce temps, les prisonniers s’affairaient autour du chariot, déchargeant de lourds ballots et les portant dans le bâtiment. Quant au soldat, il enfonça les deux mains dans les poches de son pantalon, se mit à arpenter la cour à grandes enjambées, un sourire aux lèvres, en sifflotant une rengaine qui traîne les rues.


Et devant mes yeux je vis passer la guerre dans toute sa splendeur.

 

Visitez ce site : http://comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com/

 

http://liberationirlande.wordpress.com/author/liberationirlande/

Partager cet article
Repost0
2 avril 2011 6 02 /04 /avril /2011 15:34

 

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

Lu sur : culture.revolution.free.fr/citations/Citations_litteraires.html 

 

Rosa LUXEMBURG :


(extrait d'une lettre à Franz Mehring, le 27 février 1916)


Vous avez sauvé du camp de la bourgeoisie et vous nous avez apporté à nous, dans le camp des déshérités socialement, tout ce qui était resté des merveilleux trésors de la culture intellectuelle passée de la bourgeoisie.

 

Par vos livres et par vos articles, vous avez rattaché par des liens indissolubles le prolétariat allemand non seulement à la philosophie classique allemande, mais aussi à la littérature classique, non seulement à Kant et Hegel, mais aussi à Lessing, Schiller et Goethe.

 

Chaque ligne sortie de votre plume magique a appris à nos ouvriers que le socialisme n'est pas une question de gros sous mais une conception du monde grande et fière.

 

mehring

Partager cet article
Repost0
26 mars 2011 6 26 /03 /mars /2011 20:23

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

Un très intéressant article sur Berlin de Berlin à Berlin – Galerie de photos (1969-2007).


Il donne accès aux documents sur cette manifestation du Ier mai 1916 contre la guerre et qui conduisit à l'arrestation de Liebknecht et à sa condamnation à quatre ans et demi de prison. Il montre aussi l'existence d'un mouvement contre la guerre en plein conflit et le courage de ceux qui osaient braver le pouvoir et risquer la prison pour ce combat. On peut lire sur le blog une lettre de Rosa Luxemburg, elle-même en prison depuis 1915, adressée à Sonia Liebknecht après cette arrestation.

  sur /http://j.poitou.free.fr/bln/b/1916.html


mai1916.jpg

  le tract


 

Berlin, Potsdamer Platz, 1er mai 1916 Karl Liebknecht : A bas la guerre ! A bas le gouvernement !

 

. Montée de l'opposition à la guerre

 

Depuis août 1914, l'opposition à la guerre ne cesse de s'affirmer.


Le 2 août 1914, lors de la réunion du groupe parlementaire social-démocrate, 14 députés – sur 92 présents – se prononcent contre le vote en faveur du budget de la guerre. Mais lors du vote le 4 août au Reichstag, ils se plient à la discipline du parti : les crédits militaires sont votés à l'unanimité. Le même jour, Rosa Luxemburg rassemble chez elle quelques personnalités social-démocrates de gauche pour envisager la façon de mener la lutte contre la guerre.


Le 2 décembre 1914, lors d'un vote sur une rallonge budgétaire pour le financement de la guerre, un seul député s'y oppose : Karl Liebknecht. L'exposé des motifs qu'il envoie au président du Reichstag (et que celui-ci refuse de publier) commence ainsi : Cette guerre qu'aucun des peuples concernés n'a lui-même voulue n'a pas été déclenchée pour le bien-être du peuple allemand ou d'un autre peuple. C'est une guerre impérialiste, une guerre pour la domination capitaliste du marché international, pour la domination politique de régions importantes pour le capital industriel et financier.


Le 21 décembre 1915, 20 députés sociaux-démocrates votent contre les crédits militaires.


Dès 1915, la gauche du parti social-démocrate commence à s'organiser. Le groupe le plus fortement engagé contre la guerre est le Spartakus-Gruppe, qui se constitue autour de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht.


1er mai 1916 : Karl Liebknecht appelle à manifester contre la guerre et contre le gouvernement, Potsdamer Platz. Il est aussitôt arrêté, jugé à huis clos et condamné, en appel, en août 1916 à quatre ans et un mois de détention.


Mais l'opposition à la guerre ne fera que s'amplifier – jusqu'à la révolution de 1918.


Karl Liebknecht (1871-1919)

 

. Tract de Karl Liebknecht :

Appel à la manif du premier mai 1916 [Conclusion du tract]

 

Ouvriers, camarades, femmes du peuple, ne laissez pas passer ce deuxième premier mai de la guerre mondiale sans en faire une manifestation du socialisme international, un acte de protestation contre la boucherie impérialiste ! En ce premier mai, nous tendons notre main fraternelle, par dessus les barrières de toutes les frontières, au peuple de France, de Belgique, de Russie, d'Angleterre, de Serbie, du monde entier. Le premier mai, nous crions à des milliers et des milliers de voix : Halte au crime infâme du meurtre des peuples ! A bas les responsables – décideurs, provocateurs, profiteurs ! Nos ennemis ne sont pas le peuple français, russe ou anglais, ce sont les hobereaux allemands, les capitalistes allemands et leur comité exécutoire, le gouvernement allemand ! Luttons contre ces ennemis mortels de toute liberté, luttons pour tout ce que représente le bien-être et l'avenir de la cause ouvrière, de l'humanité et de la culture ! Halte à la guerre ! Nous voulons la paix ! Vive le socialisme ! Vive l'Internationale ouvrière ! Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

 

. Comptes-rendus de la manifestation

 

Compte-rendu publié dans les Spartakus-Briefe 20, 15 mai 1916.

 

Dès sept heures, la Potsdamer Platz et les rues qui y mènent étaient remplies de policiers à pied et à cheval. A huit heures précises se rassembla sur la place une foule si compacte de manifestants ouvriers (parmi lesquels les jeunes et les femmes étaient massivement représentés) que les escarmouches habituelles avec la police ne tardèrent pas. Les "bleus" et surtout leurs officiers furent bientôt saisis d'une extrême nervosité, et ils commencèrent à pousser la foule avec leurs poings. A ce moment retentit la voix forte et sonore de Karl Liebknecht, qui était à la tête de la foule, au milieu de la Potsdamer Platz : "A bas la guerre ! A bas le gouvernement !" Aussitôt, un groupe de policiers s'empara de lui, ils firent une chaîne pour l'isoler de la foule et ils l'emmenèrent au poste de police de la gare de Potsdam. Derrière lui, on entendit retentir "Vive Liebknecht !" Les policiers se précipitèrent alors sur la foule et procédèrent à de nouvelles arrestations. Après que Karl Liebknecht eut été emmené, la police, excitée par les officiers qui se comportèrent de la façon la plus brutale, commença à repousser les masses de gens vers les rues adjacentes. C'est ainsi que se formèrent trois grands cortèges de manifestants, dans la Köthener Straße, la Linkstraße et la Königgrätzer Straße, qui avancèrent lentement en raison de heurts constants avec la police. A un moment, du brouhaha se détachèrent des mots d'ordre "A bas la guerre !", "Vive la paix !", "Vive l'Internationale !" et ils furent repris par des milliers de voix. Mais ce fut "Vive Liebknecht !" qui fut repris sans cesse le plus fortement. La nouvelle de son arrestation se répandit rapidement parmi les gens. Des milliers l'avaient vu à la tête de la manifestation et ils avaient entendu sa voix forte et stimulante. L'amertume et la douleur de voir le dirigeant bien aimé aux mains des sbires de la police emplissaient tous les cœurs, elles étaient sur toutes les lèvres. Les femmes, en particulier, poussèrent des gémissements et se répandirent en imprécations contre la police, contre la guerre, contre le gouvernement. La manifestation dura jusqu'à dix heures, la foule essayait sans cesse de pénétrer dans les rues adjacentes à partir des trois crotèges principaux, mais elle en était sans cesse empêchée par les policiers qui allaient en tous sens, sautaient et frappaient dans le tas. En alternance avec les slogans, on chantait la Marseillaise des ouvriers, la Marche des socialistes. Ce n'est que vers dix heures et demie, à certains endroits plus tard encore, que la foule des manifestants, tous animés d'une excellente humeur, se dispersa peu à peu. Selon une estimation modérée, le nombre des manifestants s'élevait à dix mille. On peut mesurer quelle frayeur la manifestation avait faite au gouvernement au fait que, jusqu'à minuit, tout le quartier autour de la Potsdamer Platz est resté littéralement sumergé par la police montée et qu'au poste de la gare de Potsdam, où s'était établi le centre principal de commandement, les allées et venues de patrouilles nerveuses, les instructions et les rapports s'éternisèrent jusque près d'une heure du matin.

 

Rapport d'enquête figurant dans l'acte d'accusation contre Karl Liebknecht

 

Fin avril et le 1er mai, l'accusé Karl Liebknecht diffusa dans le Grand-Berlin autant qu'il en eut l'occasion des tracts intitulés "Tous à la fête du 1er mai !", ainsi que des papillons (Handzettel). Sur ces papillons, il appelait tous ceux qui étaient contre la guerre à se trouver Potsdamer Platz le premier mai à huit heures du soir. Sur ces papillons était aussi écrit comme slogan "Du pain ! La liberté ! La paix !" (souligné). Il se trouva lui-même en civil sur la Potsdamer Platz avec un certain nombre de ses camarades, à l'heure indiquée, pour participer à la fête et à la manifestation contre la guerre. Quelques centaines de personnes en tout, des jeunes pour la plupart, et également des femmes, se trouvèrent au même endroit avec les mêmes intentions. Comme il y a habituellement un trafic intense après huit heures du soir sur la Potsdamer Platz, en raison de la fermeture des magasins et de la proximité de plusieurs gares, la foule y devenait très dense, raison pour laquelle les policiers qui y avaient été dépêchés firent en sorte que les gens puissent gagner les rues latérales et ils dispersèrent de temps en temps les rassemblements qui se formaient sur les trottoirs. De temajeurmps à autre, il y eut des sifflements et des slogans lancés par la foule. Mais il n'y eut pas d'incident , parce qu'il y avait sur place un fort déploiement policier et que les tentatives isolées de troubler l'ordre public purent être étouffées dans l'œuf. Juste au moment où un groupe de policiers cherchait à disperser les gens qui s'étaient attroupés sur le trottoir devant l'hôtel Fürstenhof, l'accusé, qui se trouvait dans un groupe de gens, s'écria d'une voix distinctement audible : "A bas la guerre ! A bas le gouvernement !" Les policiers qui se trouvaient à proximité, Becker et Rathke, s'emparèrent de l'individu, dont le nom leur était inconnu, pour l'emmener au poste. L'accusé y opposa de la résistance, en croisant les bras dans le dos, en penchant le buste en arrière et en appuyant les pieds contre le sol. Les deux fonctionnaires durent "littéralement soulever" le prisonnier pour le faire avancer. Pendant son transfert au poste de police, l'accusé continua de s'écrier : "A bas la guerre ! A bas le gouvernement !" Peu de temps après l'arrestation de l'accusé, le rassemblement se dispersa. Pendant tous ces événements, plusieurs centaines de soldats traversèrent la Potsdamer Platz, la plupart en provenance ou en direction d'une gare, sans toutefois participer à la manifestation. Quelques-uns, qui voulaient apparemment s'y attarder, furent invités par les patrouilles militaires à continuer leur chemin.

 

1918-1919 : la révolution Sources. Texte de Liebknecht au président du Reichstag

et premier compte-rendu : Spartakusbriefe. Institut für Marxismus-Leninismus beim ZK der SED. Berlin: Dietz-Verlag, 1958. –

Deuxième compte-rendu : Liebknecht, Karl, 1971. Gesammelte Reden und Schriften. Band IX. Berlin: Dietz Verlag. –

Photo de Liebknecht et tract : Zur Geschichte der Kommunistischen Partei Deutschlands. Eine Auswahl von Materialien und Dokumenten aus den Jahren 1914-1946. Berlin: Dietz Verlag, 1954.

 

(Traductions : JP) © Jacques Poitou, 2006.

 

Publié sur le blog le 25.01.2011

Repris le 26 mars 2011

Partager cet article
Repost0
22 mars 2011 2 22 /03 /mars /2011 21:09

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

A propos de la parution du livre aux éditions l'Epervier 


A  lire sur le blog

 

Lettre de Rosa Luxemburg à Sonia Liebknecht, le jour de la condamnation de Karl Liebknecht

 

  Chère Sonitschka, qu’il m’est pénible de ne pas être auprès de vous en ce moment. Mais, je vous en prie, gardez la tête haute. Il y a bien des choses qui vont évoluer. Maintenant, il vous faut partir, n’importe où, à la campagne, au milieu de la nature, de la beauté, il vous faut trouver un endroit où vous soigner. Cela n’a pas de sens de rester où vous êtes et de continuer à vous déprimer, il peut se passer des semaines avant la dernière instance. Je vous en prie, partez dès que possible … Karl, lui aussi, sera certainement soulagé de savoir que vous prenez du repos. Merci mille fois pour votre chère lettre du 10 et pour toutes les bonnes choses. Vous verrez, le printemps prochain, nous irons nous promener ensemble, à la campagne et au jardin botanique, je m’en réjouis déjà. Mais partez tout de suite, Sonitschka ! Ne pourriez-vous aller sur les bords du Lac de Constance, pour vous imprégner un peu de l’atmosphère du Midi ? Avant que vous ne partiez, je voudrais tant vous voir. Adressez une requête à la Kommandantur. Ne tardez pas à m’écrire un petit mot. Gardez courage, malgré tout. Je vous embrasse.


Rosa Luxembourg, Karl Liebknecht, 1916. A bas la guerre! A bas le gouvernement

 

1er mai 1916 K. Liebknecht : A bas la guerre ! A bas le gouvernement ! L'action de Liebknecht et Rosa Luxemburg contre la guerre.

 

Karl Liebknecht, Militarismus und Antimilitarismus, 1907

 

Déclaration de Karl Liebknecht au Reichstag: « Je refuse les crédits militaires demandés »

 

Une interview de Robert Liebknecht, peintre et fils de Karl Liebknecht « Mort à la guerre ».

 

Lettre de Rosa Luxemburg à Sonia Liebknecht après la mort de son frère.

 

Extrait d’une lettre de Rosa Luxembourg à Sonia Liebknecht ... Après un parloir.



lunedì, 21 marzo 2011

A bas la guerre ! A bas le gouvernement ! Karl Liebknecht en 1916

Un livre sur le procès de Karl Liebknecht en 1916      
 
Ecrit par critiquesociale   
Samedi, 19 Mars 2011 18:00

Un livre sur le procès de Karl Liebknecht en 1916

 

Le 1er mai 1916, le groupe spartakiste organisait une manifestation contre la guerre à Berlin. Malgré les risques, des milliers de travailleurs avaient répondu à cet appel répandu par les tracts clandestins diffusés par les militants spartakistes.


Dès le début de la manifestation, Karl Liebknecht avait lancé le mot d'ordre : « A bas la guerre ! A bas le gouvernement ! » Il n'en fallu pas plus pour qu'il soit immédiatement arrêté et emprisonné. Rosa Luxemburg, présente à ses côtés durant une courte période de liberté entre deux longues périodes d'emprisonnement, ne se ménagea pas pour tenter d'empêcher l'arrestation de son camarade : « J'avais cherché […] à le "libérer" de toute la force de mes poings et je m'agrippai à lui et aux policiers jusqu'au commissariat où l'on me mit dehors sans ménagement. »1


La manifestation se poursuivit néanmoins, et comme l'écrivit Paul Frölich : « Pour la première fois dans la capitale la résistance à la guerre s'était manifestée dans la rue. La glace était rompue. »2


Un procès fut intenté à Karl Liebknecht, il fut condamné et resta en prison jusqu'en octobre 1918.

 

Un livre consacré à ce procès vient de paraître sous le titre A bas la guerre ! A bas le gouvernement !3 L'ouvrage regroupe dans l'ordre chronologique différents textes relatifs à ce procès – ou plutôt à ces procès, puisque suite à sa première condamnation Liebknecht fit appel ; le second procès se tint très vite et aggrava la peine.

 

Tout au long de la procédure, Liebknecht, bien qu'avocat de profession, ne cherche nullement à obtenir une peine plus légère. La situation de guerre est à ce point tragique que toute occasion de la dénoncer doit être utilisée. Privé de la tribune du Reichstag, il se saisit politiquement de la tribune de son procès, où il déclare : « Je suis ici pour accuser et non pour me défendre ! »4


De la part de Liebknecht comme de Luxemburg, la logique est la même : profiter de ce procès pour mettre en accusation le gouvernement et le régime lui-même. Ainsi, Liebknecht écrit que « de par sa nature sociale et historique, le gouvernement allemand est un instrument visant à opprimer et à exploiter les masses laborieuses »5. Le système de ce gouvernement « se révèle être un système de véritable violence, de véritable hostilité à l'égard du peuple et de mauvaises intentions vis-à-vis des masses. »6

 

Ayant été arrêté pour sa participation à une manifestation du 1er mai, Liebknecht rappelle le sens de cette journée mondiale de lutte : « le 1er mai est l'occasion solennelle de manifester et de diffuser les idées phares du socialisme ; il est consacré à la dénonciation de toute exploitation, de toute oppression et de toute violation des droits de l'homme, à la propagande pour la solidarité des travailleurs de tous les pays, que la guerre n'a pas fait disparaître mais qui, au contraire, se voit renforcée, et à la propagande contre ce déchirement fratricide. Cette manifestation est pour la paix et contre la guerre. »7


Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg dénoncent à plusieurs reprises « la dictature militaire », qui n'était pas spécifique à l'Allemagne puisqu'elle fut également dénoncée en france à la même période par les pacifistes révolutionnaires du Comité pour la Reprise des Relations Internationales (composé de socialistes internationalistes et de syndicalistes-révolutionnaires). D'ailleurs, Liebknecht souligne que « dans les pays qui étaient autrefois des démocraties, la France, l'Angleterre, l'Italie, la guerre a conduit, dans tous les domaines, à une réaction dont on ne se serait jamais douté jusqu'à présent. »8

 

Résumant le but de son engagement, Karl Liebknecht appelle à « la lutte des classes internationale contre les gouvernements capitalistes et les classes dominantes de tous les pays afin de supprimer toute oppression et toute exploitation, afin de mettre un terme à la guerre et aboutir à une paix faite dans un esprit socialiste. »9 Rosa Luxemburg souligne justement que Liebknecht a été condamné très lourdement « parce qu'il est resté fidèle, dans ses actes et dans ses paroles, aux enseignements du socialisme et aux intérêts de la classe ouvrière. »10

 

 

Les textes de Karl Liebknecht disponibles en français ne sont malheureusement pas très nombreux. Outre des lettres de prison et quelques articles épars, les éditions Maspero avaient publié en 1970 un recueil très utile11, que les éditions La Découverte – qui en détiennent les droits – seraient bien inspirées de rééditer.



Les textes de Karl Liebknecht ici présentés étaient pour certains inédits en français. L'un d'eux avait été traduit par Marcel Ollivier dans le recueil de 1970, qui contient également un extrait des débats du procès en appel (présentés cette fois de façon complète dans cette édition de 2011), ainsi que trois autres textes liés à ce procès qui ne sont pas repris dans A bas la guerre ! A bas le gouvernement !12.


La revue Clarté avait traduit en janvier 1921 cinq de ces textes13, en se basant sur la même source que cette édition de 2011 – à savoir le recueil publié en 1919 en allemand par la revue révolutionnaire Die Aktion. De plus, Clarté avait également traduit un texte de Liebknecht du 17 août 1916 qui n'est pas repris dans ce recueil de 2011 : nous reproduisons ce texte ci-dessous.


Les textes de Rosa Luxemburg ici publiés étaient déjà disponibles en français, dans le recueil Contre la guerre par la révolution14. Ils bénéficient d'une nouvelle traduction.


 

La parution de ce livre a le mérite de nous rappeler les conditions extrêmement difficiles dans lesquelles fut menée la lutte contre la guerre de 1914-1918, par des minoritaires internationalistes de tous les pays belligérants.

 

 

* * *

 

Avec le texte que nous reproduisons ci-dessous, Karl Liebknecht s'adresse au tribunal après avoir appris l'arrestation de Franz Mehring (1846-1919), journaliste et historien socialiste qui avait participé début 1915 à la publication de la revue Die Internationale, première action d'ampleur du groupe spartakiste. Se plaçant toujours en position d'accusateur, Liebknecht ironise pour flétrir les actions du régime.


Nous reprenons la traduction publiée dans Clarté en janvier 1921. Les notes sont celles que nous avons ajoutées, à l'exception d'une note du traducteur qui était déjà présente.

 

« Au Tribunal gouvernemental allemand, Berlin

Berlin, 17 août 1916.

A propos de l'action menée contre moi :

 

Le militariste allemand livre ses batailles les plus glorieuses en Allemagne même, batailles dont aucun journal ne se fait le héraut.


Il livre ses batailles les plus glorieuses en Allemagne, contre des Allemands, contre les gens que la faim tenaille et qui sont assoiffés de liberté et de paix. Il remporte quotidiennement des victoires contre des gens sans défense, contre des femmes, des enfants, des vieillards ; des victoires que ne célèbre aucun carillon. Et il fait, au cours de ces opérations-là, des prisonniers, des milliers de prisonniers, que n'annonce aucun communiqué de G.Q.G.15

 

Le 10 juillet, sa brillante attaque a abattu Rosa Luxemburg16. Il vient maintenant de remporter un nouveau triomphe que chantera la postérité.


Par un assaut hardi il a réussi à maîtriser le septuagénaire Franz Mehring et à emmener prisonnier celui dont les coups faisaient trembler un Bismarck.


Enfin ! L'Allemagne officielle et officieuse respire !


Enfin ! Car il y a longtemps que Franz Mehring a mérité cela ! C'est bien fait pour lui !


Que n'encensait-il l'idole de l'impérialisme ? Pourquoi restait-il fidèle à ses autels, aux autels du Socialisme ? Pourquoi, malgré son grand âge, est-il entré en lice pour la cause sacrée de l'Internationale ?


C'est bien fait pour lui !


Car il est bien un éducateur du peuple allemand – mais il ne sort pas de l'écurie de Herr von Trott zu Solz17. Car il est bien un flambeau de la science allemande, un maître publiciste allemand, un gardien et un champion de civilisation allemande, mais il ne fait pas partie des gardes du corps des Hohenzollern18. Car il est un démolisseur de légendes dorées, mais non point un raccommodeur historiographe de cour. Car il rompt des lances pour la défense des opprimés, mais il n'est point à la solde des puissants. C'est un homme, mais non un laquais.


 

A une époque où les représentants accrédités de la science allemande se font panégyristes de la barbarie et font de la Muse une courtisane ; où, pour jouir à loisir de la liberté extérieure, il est indispensable de se soumettre à la servitude intérieure et de se prosterner humblement devant la dictature militaire ; à une époque où les Jean-qui-rie "social-démocrates" sont au comble de la félicité, escortent en trottinant le carrosse d'Etat allemand et ont la permission de ramasser les miettes de la table ministérielle, où les camarades social-démocrates Schluck et Jau19 ont le privilège de se carrer, pour quelques trimestres de grâce, dans les coussins de l'admission à la cour ; à une époque où les apostats "social-démocrates" peuvent prendre, au grand soleil glorieux, de joyeux ébats ; à une telle époque, la place d'un Mehring n'était pas la liberté, mais la prison.

 

La prison, le seul endroit où l'on ait maintenant droit d'être homme d'honneur en Allemagne ; la prison devenue maintenant la suprême place d'honneur pour le septuagénaire Franz Mehring lui aussi.


Mais la besogne n'est pas encore achevée. Il reste encore des hommes et des femmes, en Allemagne, qui, par milliers et par milliers, s'écrient : "A bas la guerre ! A bas le gouvernement !"


En avant vers de nouveaux exploits, Excellence von Kessel20 ! De nouvelles victoires glorieuses vous attendent – à remporter sur des gens que la faim tenaille et qui ont soif de liberté et de paix ! Contre des femmes, des vieillards, des enfants ! Afin que l'Europe retentisse davantage encore de la gloire immortelle de l'Allemagne !


 

Soldat Karl Liebknecht, aux bataillons de travailleurs. »

 

 


 

 

1 Lettre de Rosa Luxemburg à Clara Zetkin le 12 mai 1916, dans : Rosa Luxemburg, J'étais, je suis, je serai !, correspondance 1914-1919, Editions Maspero, 1977, p. 129.

2 Paul Frölich, Rosa Luxemburg, sa vie et son œuvre, Editions Maspero, 1965, p. 278.

3 Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, Le procès Liebknecht, Editions de l'Epervier, 2011, 94 pages, 9,5 €. Traduction de Cécile Denis.

4 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 49.

5 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 19.

6 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 21.

7 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 23.

8 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 84.

9 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 22.

10 A bas la guerre ! A bas le gouvernement !, op. cit., p. 58.

11 Karl Liebknecht, Militarisme, guerre, révolution, Editions Maspero, 1970, 267 pages.

12 Dans l'édition Maspero, 1970 : lettre de Liebknecht au tribunal du 8 mai 1916 (pp. 160-162), idem 3 juin 1916 (pp. 162-164 ; dans l'édition l'Epervier, 2011 : pp. 31-35), idem 10 juin 1916 (pp. 165-171), déclaration remise à l'audience du 26 juin 1916 (pp. 172-174), et extrait de la défense devant le tribunal (pp. 174-175 ; débats du 23 août 1916, dans l'édition l'Epervier, 2011 : pp. 43-50).

13 « Karl Liebknecht, l'accusé », Clarté n° 50, 51 et 52, des 15, 22 et 29 janvier 1921.

14 Rosa Luxemburg, Contre la guerre par la révolution, lettres de Spartacus et tracts (Spartacus-briefe), Editions Spartacus, 1973, 201 pages.

15 Grand Quartier Général, instance militaire suprême qui menait les opérations de guerre.

16 Après avoir passé une année en prison de février 1915 à février 1916, Rosa Luxemburg venait d'être arrêtée de nouveau le 10 juillet 1916. Elle ne fut libérée, par la Révolution, que début novembre 1918.

17 August von Trott zu Solz, ministre de l'Enseignement dans le gouvernement de l'empereur Guillaume II.

18 Famille qui régnait sur l'Allemagne, dont faisait partie Guillaume II.

19 Intraduisible : noms plébéiens, désignant la basse roture (N. d. T.).

20 Le général Gustav von Kessel, à l'époque gouverneur de Berlin.

 
 
Partager cet article
Repost0
12 mars 2011 6 12 /03 /mars /2011 14:08

  comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.net

l'Archive Internet des Marxistes

Section française

Paul Lafargue

1842 - 1911

Paul Lafargue

Notice biographique

1871 ?

Pie IX au Paradis

1880

Le droit a la paresse

1881

Le parti socialiste allemand

 

La politique de la bourgeoisie

 

Que veulent donc les seigneurs de l'industrie du fer ?

 

Au nom de l'autonomie

 

L'autonomie

 

Le sentimentalisme bourgeois

 

M. Paul Leroy-Beaulieu

1882

La propriété paysanne et l'évolution économique

 

L'ultimatum de Rothschild

 

Les luttes de classes en Flandre de 1336-1348 et de 1379-1385

 

La journée légale de travail réduite à huit heures

 

Un moyen de groupement

 

La base philosophique du Parti ouvrier

 

Le communisme et les services publics

1883

Essai critique sur la révolution française du XVIIIº siècle

1884

Le matérialisme économique de Karl Marx – cours d'économie sociale –

1885

La légende de Victor Hugo

 

Visite à Louise Michel

1886

Les chansons et les cérémonies populaires du mariage

 

Sapho

 

La religion du Capital

 

Le matriarcat

1887

La circoncision, sa signification sociale et religieuse

 

La question Boulanger

1888

Le Parti Ouvrier Français

1890

La propriété - Origine et évolution

 

Souvenirs personnels sur Karl Marx

 

Le darwinisme sur la scène française

1891

"L'Argent" de Zola

 

La boucherie de Fourmies (1er mai 1891)

 

Le 1er Mai et le mouvement socialiste en France

 

Avant-propos à "La Femme et le Socialisme" d'August Bebel

 

Appel aux électeurs de la première circonscription de Lille

1893

Un appétit vendu

 

Socialisme et patriotisme

1894

La langue française avant et après la Révolution

1895

Origine de la propriété en Grèce

 

L'idéalisme et le matérialisme dans la conception de l'histoire

 

Campanella, Etude sur sa vie et sur la Cité du Soleil

1896

Le mythe de l'immaculée conception

 

Les origines du Romantisme

 

Le socialisme et la science sociale

1897

La fonction économique de la Bourse

1899

Le socialisme et la conquête des pouvoirs publics

 

Notre but

1900

Le socialisme et les intellectuels

1903

Les trusts américains

1904

Souvenirs personnels sur F. Engels

 

La question de la femme

1905

Socialisme et internationalisme

1906

Le patriotisme de la bourgeoisie

1907

La crise de l'Or aux États-Unis

1908

De l'antiparlementarisme et des réformes

1909

Le déterminisme économique de K. Marx

 

La croyance en Dieu

 

Origine des idées abstraites

1910

Intervention contre la loi des retraites

 

Le problème de la connaissance

Partager cet article
Repost0
11 mars 2011 5 11 /03 /mars /2011 23:52

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

mehring-copie-1.jpg

 

Il n'y a pas seulement Liebknecht qui ait attiré sur lui les foudres de l'autorité militaire, en 1915, 1916 et 1917.


Je ne saurais oublier le spectacle pathétique de ce brave vieillard qui fut interné avec nous pendant bien des mois : c'était le professeur Franz Mehring, âgé de 71 ans.

 

En avril 1915, Mehring avait lancé une proclamation en faveur de la paix immédiate. Cette proclamation portait non-seulement sa signature mais encore celle de Rosa Luxembourg et de Ledebour. Cela suffit pour lui faire goûter un peu de la Stadvogtei.

 

Mehring était, comme Borchardt, du groupe Spartacus. Très érudit, fin causeur, il nous fit passer avec lui des heures intéressantes, inoubliables. Ces noms de Mehring et de Borchardt, dont je n'avais gardé qu'un faible souvenir, ont pris une importance considérable depuis la révolution en Allemagne. Mehring resta quelque temps avec nous puis fut libéré.

 

Il fut, par la suite, candidat au siège laissé vacant par Liebknecht à Postdam, où il fut défait, mais quelque temps après, sa candidature fut plus heureuse dans une division électorale de la Diète de Prusse.
Il y fut élu par une grande majorité et il siège encore aujourd'hui au Parlement.

 

sur http://www.inlibroveritas.net/lire/oeuvre12203-chapitre57110.html

 


Henri Béland (Docteur)
 
Honorable Henri Sévérin Béland C.P
fut un médecin et homme politique fédéral, provincial et municipal du Québec.

Né à Louiseville en Mauricie, né le 11 octobre 1869  M. Béland étudia la médecine à l'Université Laval. ll pratiqua dans le New Hampshire, il revint ensuite à Saint-Joseph-de-Beauce. Durant la Première Guerre mondiale, il fut docteur en Belgique avant d'être capturé par les Allemands et fait prisonnier de guerre pendant toris ans. De son incarcération, il écrivit le livre Mille et un jours en prison à Berlin paru en 1919.

Il devint maire de Saint-Joseph-de-Beauce de 1897 à 1899. Puis élu député du Parti libéral du Québec dans la circonscription provinciale de Beauce en 1897et réélu par acclamation en 1900. Il démissionna en 1902 pour se présenter au fédéral.

Élu député fédéral du Parti libéral du Canada dans la circonscription  de Beauce en 1902, il fut réélu en 1904, 1908, 1911, 1917, 1921 et en 1922. Il servit comme ministre des Postes en 1911 dans le cabinet de Wilfrid Laurier et ministre du Rétablissement des soldats à la vie civile et ministre administrant le ministère de la Santé de 1921 à 1926. Il démissionna de son poste de député en 1925 pour accepter le poste de sénateur de Lauzon, poste qu'il occupa jusqu'à sa mort le 22 avril 1935.

Biographie rédigée par biopierre et publiée sous Licence de documentation libre (GFDL 1.2)

 


Partager cet article
Repost0
11 mars 2011 5 11 /03 /mars /2011 22:46

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

mehring

 

A consulter sur le site de l'Institut d'Histoire de la révolution française de Paris I

Et sur le blog, les articles dans  la catégorie "Ils l'ont accompagnée":

textes-de-franz-mehring-disponibles-en-allemand-sur-le-net-

L'Internationale_Die_Internationale_1915

gustavo-ii-adolfo-de-suecia-segun-franz-mehring

pourquoi-la-biographie-de-marx-par-mehring-est-elle-si-precieuse-

biographie-de-marx-de-franz-mehring-les-apports-de-rosa-luxemburg-et-clara-zetkin


  siteon0.jpg

Histoire socialiste de la Révolution française
Projet Ducange (Franz Mehring)
La réception en Allemagne de l’Histoire socialiste de la Révolution française de Jean Jaures

Les quelques articles présentés ici offrent deux points de vue méconnus sur l’Histoire socialiste de la Révolution française publiée par Jean Jaurès entre 1901 et 1903 dans le cadre d’une vaste histoire de la France contemporaine. Parmi les réactions lors de la parution de l’oeuvre, celles des sociaux-démocrates allemands sont rarement mentionnées. La critique du social-démocrate Franz Mehring dans la Neue Zeit est résumée le plus souvent à quelques formules, sans la restitution de son propos ; quant à l’appréciation d’Eduard Bernstein dans Die Dokumente des Sozialismus, peu ont jusqu’alors mentionné son existence.

Quelques indications bibliographiques

Sur Franz Mehring et Eduard Bernstein voir :
- DROZ Jacques (dir.), Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier international. Allemagne, Paris, 1990, 543 p.

- JOUSSE Emmanuel, Réviser le marxisme ? d’Édouard Bernstein à Albert Thomas, 1894-1914, Paris, L’Harmattan, 2007, 239 p.

- MOREL Roger, La collaboration de Franz Mehring à la Neue Zeit (1900-1906), Mémoire de maîtrise sous la direction de Jacques Droz, Paris 1, 1976, 123 p.

- SCHELZ-BRANDENBURG Till (ed.), Eduard Bernsteins Briefwechsel mit Karl Kautsky (1895-1905), Francfort – New York, Campus Verlag, 2003, 1159 p.

Sur la Neue Zeit voir :
- SCHUMACHER Alois, La Social-démocratie allemande et la IIIème République. Le regard de la revue Die Neue Zeit, Paris, 2001, 223 p.

Sur la revue Mouvement socialiste voir :
- DACHARY DE FLERS Marion, Lagardelle et l’équipe du Mouvement socialiste. Thèse de doctorat sous la direction de Raoul Girardet, Paris, IEP, 1982, 377 p.

L’Histoire socialiste de la Révolution française de Jean Jaurès en ligne : http://visualiseur.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k498454

 


 

Franz Mehring, né en 1846, a d’abord été un farouche opposant au socialisme avant de rejoindre les rangs de la social-démocratie et de devenir une des figures les plus célèbres de son aile gauche. Auteur de synthèses inspirées par le matérialisme historique, il a notamment écrit une histoire de l’Allemagne, thème privilégié lors de son enseignement à l’école du parti (MEHRING Franz, Deutsche Geschichte vom Ausgange des Mittelalters : ein Leitfaden für Lehrende und Lernende, Berlin, Vorwärts, 1910 – 1911, 2 tomes). Il a occupé d’importantes positions dans la presse sociale-démocrate, dans la Neue Zeit mais aussi dans le journal quotidien Leipziger Volkszeitung. Son attachement à un marxisme orthodoxe l’amène à critiquer les positions et conceptions jaurésiennes sur l’histoire. Un de ses ouvrages les plus célèbres est sa biographie de Karl Marx (1918, réédité en français en 2009 par Bartillat). Adhérent du jeune parti communiste allemand, il meurt peu après sa fondation en 1919.

Présentation de la revue

La Neue Zeit a été fondée en 1883 par le social-démocrate Karl Kautsky, théoricien majeur du SPD d’avant 1914, surnommé le « pape du marxisme ». À l’origine indépendante, Die Neue Zeit devient la principale revue théorique du parti et paraît jusqu’en 1923. Des socialistes et sociaux-démocrates de toute l’Europe y publient des comptes rendus d’ouvrages et surtout des contributions sur l’actualité politique, l’histoire, l’économie, la philosophie,... Elle constitue une source majeure pour comprendre la vie intellectuelle des gauches européennes au tournant des dix-neuvième et vingtième siècles. La Friedrich Ebert Stiftung (fondation du SPD) a entrepris sa numérisation intégrale.

  • Le texte en allemand

MEHRING Franz, « Pour le roi de Prusse : eine Entgegnung », Die Neue Zeit, 1902-1903, tome 1, p. 517-528.

En ligne sur le site de la fondation Friedrich Ebert Stiftung (fondation du Parti social-démocrate allemand) http://library.fes.de/cgi-bin/neuzeit.pl ?id=07.04674&dok=1902-03a&f=190203a_0517&l=190203a_0528

  • Le texte en français

L’article de Mehring avait été traduit immédiatement en français dans Le Mouvement socialiste : MEHRING Franz, « Jaurès historien », Le Mouvement socialiste, mai 1901, p. 46-62.

TEXTE NUMERISE EN PDF

Deuxième traduction de 1973 avec une présentation de l’historienne Irmgard Hartig. HARTIG Irmgard, « Observations sur la querelle entre Jaurès et Mehring, » Annales historiques de la Révolution française, 1/1973, p. 112-127.

TEXTE NUMERISÉ EN PDF

Partager cet article
Repost0
7 mars 2011 1 07 /03 /mars /2011 20:53

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

 

 

L'intervention de David Muhlmann, lors du colloque Présence de Rosa Luxemburg, illustre parfaitement ce qui a été dit dans le précédent article, à savoir l'importance d'une démarche partant de Rosa Luxemburg pour nous aider à réfléchir sur le monde actuel. Il s'agissait en effet selon le titre de la table ronde de s'interroger sur l'actualité de Rosa Luxemburg.

 

Muhlmann a distingué plusieurs points. Si nous ne partageons pas toujours les conclusions tirées, nous avons particulièrement apprécié cette mise en évidence d'éléments, qui nous ont semblé réellement pertinents pour réfléchir le monde actuel.

 

 

1. La voie révolutionnaire

 

Pour D. Mühlmann, il ne s'agit pas chez Rosa Luxemburg seulement d'une posture et en cela elle se distingue de militants comme Kautsky ou Barbusse qui eux aussi ont critiqué Bernstein.

Elle fait l’effort en effet d’analyser les dynamiques qui soutendent les différentes positions et surtout elle refuse la pacification des rapports de classes, l'idée qu'il serait possible de conquérir le pouvoir sans s'affronter.

C'est un acquis fondamental: de sa pensée que de montrer que le socialisme nécessite un saut qualitatif dans les lutte sociales, et que l'on ne peut pas y arriver, sans un affrontement, sans ce saut qualitatif.

On ne peut pas reformer le mode de proprieté sans s’attaquer à l’appareil d’Etat :  il y a nécessité de briser par la force cet appareil.

C'est la leçon de la Commune et des analyses historiques de Marx. Car l'histoire a bien montré que quand elle se voyait en danger, la bourgeoisie a toujours mobilisé l'appareil d'Etat. C'est aussi la leçon du Chili et de la révolution spartakiste qui a échoué à partir du moment où le militarisme s'alliait à la bourgeoisie pour le combattre.

Pour D. Mühlmann, c'est là un des enseignements de Rosa Luxemburg ; il faut s'attendre à un affrontement armé si l'on s'engage dans cette voie

 

 

2. La spontanéité

 

Le deuxième point aborde l'idée de spontanéité et Mühlmann distingue de manière intéressante les notions de spontanéisme et de spontanéité.Et c'est bien ce deuxième point qu'il voit à l'oeuvre chez.Rosa Luxemburg.

Selon lui, pour Rosa Luxemburg, la révolution ne se décrète pas ; mais il existe une réelle capacité des masses à se mobiliser et  elle parie toujours sur l’intelligence des masses.

Des masses qui sont dans un  processus d’auto-émancipation.

Ce qui ne signifie pas pour autant qu'il n'y ait pas de préparation . Bien au contraire, d'où l'importance pour elle, des partis. Il n'y a pas de spontanéité, sans parti sans préparation.

 

 3.Quel socialisme

 

Rosa Luxemburg choisit la voie démocratique, mais elle montre une vigilance constante à la fois contre la bureaucratie, la bureaucratisation du parti allemand, mais aussi face à Lénine. Ainsi en 1904, elle critique la sclérose, le conspirationnisme.

Elle refuse aussi bien l'affadissement que le jusqu’au boutisme bureaucratique. Il ne s'agit pas comme le veut une gauche avant-gardiste, de s’emparer du pouvoir d’Etat et ensuite de le faire fonctionner au service des travailleur.

D. Mühlmann avance alors l'idée suivante. Il ne faut pas céder sur la liberté au profit de l’égalité.

 

 

4. Celle qui a su tenir bon sur l’internationalisme

 

Rosa Luxemburg est celle qui a su tenir bon sur l'internationailsme, un internationalisme de principe contre le chauvinisme délirant de l'époque.

Mais il s'agit de plus d'un internationalisme original..Pas d'un internationalisme pacifiste. C’est "guerre  à la guerre" devenu "la guerre transformée en guerre civile". Etre offensif malgré la guerre, contre la guerre. Pas un pacifisme social-démocrate;

Mais avoir comme par réflexe une sensibilité pour les opprimés, au- dela des frontières.

Il y a alors un point de complication : le nationalisme progressiste, les luttes de libération nationale dont elle ne reconnaît pas la validité même dans les pays opprimés. Et Muhlmann considère qu’elle a eu raison si l'on considère le mouvements de décolonisation. L'anti-impérialisme peut être aujourd’hui un point de contradiction s'il n'est pas lié à des contenus de classe.

 

5. Critique d’une vision linéaire de l’histroire

 

Muhlman discute en abordant ce point l"idée que le capitalisme doit nécessairement être vaincu et que les forces économiques travailleraient pour nous .Au contraire pour lui, le capitalisme peut porter avec lui le capitalisme et mener au pire. La barbarie est possible, le socialisme n’est pas garanti.

 C'est par exemple ce que nous apprend le développement de l’écologie : le capitalisme peut aller jusqu’à miner, détruire  et non pas offrir une perspective. Il souligne alors l'oginalité de Rosa Luxemburg qui n'est certes pas un penseur de l'écologie mais qui a une approche unique comme penseur marxiste. Il y a une certaine sensibilité à la nature qui caractérise Rosa luxemburg : voir les lettres, son herbier...

De même quand elle étudie la religion, elle pointe un certain progressisme du christianisme primitif  et témoigne alors d'une capacité à étudier le passé pour comprendre l’avenir;

 

 

Conclusion

 

Rosa Luxemburd nous invite à un marxisme critique de l’Etat

Son analyse de la dégénerescence socialdémocrate reste essentielle.

 

Cet article est en devenir. Nous avons voulu rapidement donner accès aux idées développées lors de cette intervention.Le texte devrait en être publié bientôt et permettre une discussion plus précise de son contenu.

 

 

 

Partager cet article
Repost0

Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009