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La revue la Commune, en septembre 1998, pose la question "La révolution, c'est pour quand?", François Hollande répond pour le parti socialiste. Il s'appuie bien entendu sur Kautsky et rejette la révolution comme principe de l'action pour changer de société.
"Sans remettre en question l'objectif d'un changement de société, les réformistes ont fondé l'identité du socialisme démocratique sur le rejet du principe révolutionnaire comme modalité nécessaire et souhaitable de l'action collective." François Hollande.
A mettre en regard avec ce que disait Rosa Luxemburg dans Réforme sociale ou révolution.
"Quiconque se prononce en faveur de la réforme légale, au lieu et à l’encontre de la conquête du pouvoir politique et de la révolution sociale, ne choisit pas en réalité une voie plus paisible, plus sûre et plus lente conduisant au même but ; il a en vue un but différent : au lieu de l’instauration d’une société nouvelle, il se contente de modifications superficielles apportées à l’ancienne société. Ainsi les thèses politiques du révisionnisme conduisent-elles à la même conclusion que ses théories économiques. Elles ne visent pas, au fond, à réaliser l’ordre socialiste, mais à réformer l’ordre capitaliste, elles ne cherchent pas à abolir le système du salariat, mais à doser ou à atténuer l’exploitation, en un mot elles veulent supprimer les abus du capitalisme et non le capitalisme lui-même. R. Luxemburg, Réforme sociale ou révolution ?, 1898) voir sur le site bataille socialiste
Et à confronter à l'épreuve des faits!
Texte de François Hollande publié dans la Commune en 1998
" La double question de la démocratie socialiste et institutionnelle fut la grande affaire du XIXe siècle. Entre 1789 et 1871, la France a connu plusieurs mouvements révolutionnaires décisifs, consitutifs de l'identité républicaine. Ils symbolisèrent un combat pour les droits civils et politiques pour l'égalité, la liberté et la participation. La gauche républicaine, en 1789 comme en 1848, était le coeur de cette double matrice des droits sociaux et politiques et revendique encore aujourd'hui cet héritage.
L'action révolutionnaire peut-elle pour autant être pensée comme une fin en soi, et constituer un ressort de l'action politique ? Ce débat a fortement divisé la gauche, au point d'avoir été en France une cause de séparation entre communistes et socialistes. Dans un régime représentatif et démocratique, la transformation sociale se substituait nécessairement à la révolution. La mise en oeuvre d'un projet alternatif à celui des conservateurs devait s'accompagner d'un respect des règles de droit.
Sans remettre en question l'objectif d'un changement de la société, les réformistes ont fondé l'identité du socialisme démocratique sur le rejet du principe révolutionnaire comme modalité nécessaire et souhaitable de l'action collective. A la conférence internationale ouvrière et socialiste de Berne, en février 1919, qui précède la sission dans les partis socialistes, les socialistes démocratiques votèrent une résolution qui affirmait qu'une qu'une "réorganisation sociale, toujours plus profondément pénétrée de socialisme, ne peut être réalisée ni surtout stabilisée, si elle ne repose pas sur les conquêtes de la démocratie, et si elle ne plonge pas ses racines dans les principes de la liberté."
Notre défi est de parvenir à construire une nouvelle forme de solidarité et de nouveaux mécanismes de progrès social La transformation sociale reste le fruit d'un rapport de force. Mais ce qui nous éloigne du modèle révolutionnaire, c'est la manière de construire.La démocratie et le dialogue social doivent être les modes de régulation des conflits à l'image de ce que nous avons entrepris lors du débat sur la réduction du temps de travail.
Marx et Lénine estimaient que l'Etat est par essence un Etat de classe, dont le rôle historique est le maintien de l'ordre social. Nous avons montré au contraire que l'Etat pouvait être l'un des agents essentiels du progrès social et de la redistribution.
Au XIXe siècle, les forces de gauche et de progrès étaient traditionnellement appelées : "le parti du mouvement." Voilà ce que doit être aujourd'hui l'actualité de la notion de révolution pour la gauche démocratique: le mouvement et le progrès social.
Ainsi, du principe révolutionnaire, les socialistes ont préservé un souffle et une volonté qui nous font aller de l'avant et nous préservent de toute satisfaction face à une situation donnée. Kautsky en a illustré l'état d'esprit losqu'il affirmait que le parti social-démocrate est un parti révolutionnaire, il n'est pas un parti qui fait des révolutions.
La Revue Commune
No 11 - Septembre 1998
P 8-9